Elections 2019 : Le PTB veut des transports en commun gratuits

La mobilité sera l'un des enjeux majeurs des élections du 26 mai. Germain Mugemangango, porte-parole du PTB, veut en faire l'un des outils de la lutte contre le changement climatique. Pour cela, il plaide notamment pour une politique tarifaire avantageuse et une extension du réseau. Cela doit faire des transports en commun «la solution la plus évidente pour se déplacer».
par
Camille
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Le PTB plaide en faveur d'une «révolution climatique». Quelle place pour la mobilité dans cette révolution?

«Une place primordiale! La politique de mobilité a une place importante à occuper dans la lutte contre le changement climatique, ainsi que dans le combat contre la pollution aux particules fines. À ce niveau, les chiffres sont alarmants: la pollution automobile tue désormais autant que la cigarette. Il y a quelques semaines, on a connu un violent épisode de pollution, et certains l'ont ressenti dans leurs poumons. Ils ne pouvaient plus sortir, n'ont pas pu se rendre à leur travail… Il a donc urgence à réduire le trafic.»

Comment y parvenir?

«Pour nous, il faut faire du transport public le premier choix pour se déplacer. Actuellement, 80% des trajets se font en voiture. Ça ne va pas. On doit diviser ce chiffre par deux d'ici 2030. Pour y parvenir, il faut soutenir les opérateurs de transports, au contraire de ce qu'ont fait les derniers gouvernements. Alors que le nombre de passagers a augmenté, les moyens n'ont pas suivi.»

Comment donner envie aux usagers de se tourner vers les transports publics?

«Prenons l'exemple du réseau de bus en Wallonie. Sous la dernière législature, il a diminué de 5.000 km. Des arrêts ont été supprimés, le prix des billets a augmenté. Comment voulez-vous donner envie aux gens de se tourner vers les Tec dans ces conditions? Plutôt que les inviter à utiliser les transports publics, on les invite à prendre leur voiture. Il y a urgence à agir, en améliorant le réseau, en diminuant les tarifs de la SNCB, et en offrant la gratuité des transports en commun dans les villes.»

 

Comment financer la gratuité?

«En Wallonie, la billetterie rapporte 113,5 millions € par an. Au niveau belge, environ 800 millions €. On peut faire le choix politique de compenser ces sommes. De plus en plus de partis plaident d'ailleurs en faveur de la gratuité, après nous avoir assurés pendant des années que ça n'était pas possible. Je note au passage que la lutte a payé, puisque ce qui était jusqu'ici impensable est devenu un thème de campagne! Enfin, une des solutions pour assurer ce financement est de revoir le régime des voitures de société, qui peut permettre de récupérer de 2 à 4 milliards € par an. La gratuité va générer un appel d'air vers les transports en commun.»

Ne risque-t-on pas d'être confrontés à un afflux de voyageurs vers les transports en commun, alors qu'il a de gros besoins en matière d'augmentation de l'offre et d'extension du réseau?

«Effectivement, on ne peut se contenter de compenser les recettes de billetterie. Il faut également investir massivement, afin de ne pas se retrouver avec des transports surchargés. Il est aussi urgent d'étendre le réseau, car celui qui vit en zone rurale loin de tout arrêt se fiche bien de la gratuité, s'il n'a pas accès au réseau… On doit donc mettre les moyens nécessaires pour créer de nouveaux points d'arrêt, et améliorer la desserte des lignes qui sont déjà très fréquentées.»

Cela aura un coût…

«Peut-être, mais voir uniquement le coût revient à négliger le fait que la situation actuelle nous coûte également très cher. C'est un investissement, et il y aura donc un retour. Il sera environnemental et sanitaire, puisque cela va réduire la pollution de l'air, et donc limiter les diverses infections respiratoires qui sont liées à la pollution. Il sera aussi économique, puisque les files coûtent cher à notre économie, sans parler des absences liées au travail du fait des maladies respiratoires.»

La SNCB

Comment doper l'usage du train, qui offre les meilleures capacités pour le transport de ville à ville?

«Une part importante du trafic automobile est due aux déplacements des navetteurs. Nous proposons donc la gratuité du train pour les trajets domicile travail, ainsi que dans toute la zone bruxelloise. Ailleurs, le prix des trajets doit être compris entre 1,5 et 7,5 €. Les allers-retours à 30 € comme on les connaît aujourd'hui, ça n'est pas tenable. Imaginez le budget pour une famille avec des enfants!»

Certaines lignes sont déjà très fréquentées…

«Nous proposons un plan d'investissement de 50 milliards € d'ici 2030. Aujourd'hui, prendre le train coûte cher, est compliqué du fait du manque de points d'arrêt en zone rurale, et expose à des retards. On ne peut pas continuer comme cela. Grâce à ces investissements, la SNCB doit augmenter ses capacités et devenir le maillon central du réseau de transport.»

Certains partis évoquent la possibilité d'avoir recours à des sociétés privées…

«C'est une erreur. Au contraire, il faut que l'intégralité du secteur ferroviaire revienne dans le giron du public. On doit donc s'assurer que la SNCB reste un opérateur public. On ne peut pas avoir une compagnie qui d'un côté paye des dividendes à ses actionnaires, et de l'autre offre un service sûr, de qualité, et peu coûteux pour les usagers.»

Certains partis proposent un système de taxes intelligentes pour dissuader d'utiliser la voiture. Qu'en pensez-vous?

«Nous ne sommes pas favorables à ces taxes et autres vignettes, même si nous souhaitons que les voyageurs se tournent vers les transports en commun. Un bon nombre des usagers de la voiture n'ont pas le choix. Ils sont contraints d'utiliser leur véhicule, puisqu'ils n'ont pas d'alternative en transports en commun. Et le budget de ces taxes vient alimenter le budget de l'État, qui ne l'utilise pas pour développer des alternatives, mais pour alléger les impôts des multinationales. Si on ne commence pas par proposer des alternatives, alors on ne fait que pénaliser les citoyens.

Quelle place pour le vélo dans la mobilité de demain? Germain Mugemangango, porte-parole du PTB, réclame des «infrastructures adaptées».

«Il est indispensable de faire la promotion du vélo. Cela veut dire offrir des solutions aux besoins des cyclistes, notamment en créant des parkings sécurisés dans les gares, en mettant à disposition des vélos partagés dans les gares, comme cela existe déjà avec Blue Bike. Mais surtout, on doit repenser le paysage urbain. Sur les routes où ça roule vite, il faut des pistes cyclables en site propre. On ne peut pas avoir des cyclistes qui tentent de survivre à côté de voitures qui les frôlent à plus de 50 km/h.»