Élections 2019: Ecolo veut plus d'espace pour piétons et cyclistes

La mobilité sera l'un des enjeux majeurs des élections du 26 mai. Manu Disabato, tête de liste Ecolo aux régionales pour la zone Mons-Borinage, fait le point sur les priorités des Verts en matière de mobilité.
par
Camille
Temps de lecture 5 min.

Il y a beaucoup à faire en matière de mobilité. Quelles sont les premières mesures à prendre?

«Il y a tellement à faire qu'on sait à peine par où commencer! Mais un point essentiel à nos yeux est de revoir la fiscalité. Le système actuel est trop favorable à la voiture, notamment avec le système des voitures salaires. Je ne vise évidemment pas les voitures des infirmiers, des plombiers, des indépendants, pour qui c'est un outil de travail. Mais bien les voitures qui sont un élément de la rémunération de certains travailleurs. On estime que cela coûte 3,3 milliards € par an à la Belgique. L'OCDE, la Commission européenne, le Conseil des finances, disent qu'il serait préférable d'y mettre fin. Il faut en organiser la sortie.»

Les derniers gouvernements ont eu des difficultés à proposer des alternatives à la voiture salaire…

«Ça n'est pas simple, car la voiture est un élément culturel. Beaucoup de ceux qui bénéficient d'une voiture salaire ont du mal à envisager de faire autrement. Mais cela est en train de changer grâce aux jeunes générations. Elles sont de moins en moins attachées au fait de posséder une voiture et privilégient le service qu'elle peut rendre. Les jeunes sont aussi de moins en moins nombreux à passer le permis de conduire. Il faut accompagner ces nouveaux modes de vie.»

LE VÉLO

On compte de plus en plus de cyclistes. C'est bon signe?

«À Bruxelles, l'usage du vélo explose. C'est d'autant plus une bonne nouvelle que le fait d'avoir de nombreux cyclistes dans les rues donne envie à d'autres personnes de s'y mettre.»

Mais de nombreux cyclistes se plaignent du manque d'infrastructures…

«Chez Ecolo, nous plaidons depuis longtemps pour un rééquilibrage de l'espace publique. Il faut accorder plus de place aux cyclistes, aux piétons, et aux transports en commun, et un peu moins à la voiture. Actuellement, on compte parfois deux ou trois voitures par ménage. Ces véhicules sont à l'arrêt 97% du temps… Ils occupent de l'espace au sol, qui pourrait être attribué à d'autres usages.»

LE MÉTRO

Quelle est la position d'Ecolo sur le métro nord à Bruxelles?

«Nous ne sommes pas opposés au métro par principe, mais nous demandons d'avancer prudemment sur ce dossier. Ces travaux vont avoir un impact sur la qualité de vie des riverains, il faut donc ne pas prendre cela à la légère. Comme il s'agit d'un investissement lourd, pas question de faire un choix qui se révélerait mal pensé. Avant de se prononcer, il est donc primordial d'obtenir des garanties sur le financement, afin d'éviter des retards de travaux, et de mener une analyse rue par rue, ligne par ligne.»

D'autres partis soulignent que le métro est la seule alternative pour répondre à la hausse de la demande que l'on peut attendre sur l'axe nord sud…

«Partout où un tramway à haute qualité de service peut répondre aux besoins, il faut privilégier cette option. Elle est moins coûteuse et plus rapide à mettre en place. Or, on ne peut pas attendre.»

LA GRATUITE

Comme plusieurs partis, vous plaidez en faveur de la gratuité pour certains usagers.

«À notre avis, il serait judicieux d'offrir la gratuité des transports en commun aux moins de 25ans. Ils prendraient ainsi l'habitude de les utiliser, et se tourneraient moins vers la voiture. De nombreux jeunes ont déjà fait cette transition dans leur tête. Il faut inciter ceux pour qui ça n'est pas encore une évidence.»

Comment financer une telle mesure?

«Pour le moment, je constate qu'on investit de l'argent dans le développement de nouvelles infrastructures routières. Il me semblerait surtout plus adéquat d'investir cet argent au profit d'une meilleure desserte par les transports en commun. Par ailleurs, la Wallonie a adopté il y a quelques années la taxe kilométrique pour les camions. Dès le début, Ecolo avait plaidé pour qu'une partie de la recette soit attribuée au financement d'alternatives à la voiture.»

LES ZONES RURALES

En zone rurale, il est plus compliqué de se passer de voiture individuelle. Comment changer cette situation?

«Effectivement, il ne faut pas oublier que les défis ne sont pas les mêmes quand on vit à la campagne. Il n'y a pas de secret, il faudra investir dans des solutions de transport alternatives. Le vélo en est parfois une. En Wallonie, certains croient encore que mettre des pointillés le long de la route fait une piste cyclable. Ça n'est pas le cas, notamment sur les grands axes. Il faut de vraies infrastructures, en site propre. C'est cela qui donnera envie de se tourner vers le vélo.»

La gratuité peut être séduisante, mais l'offre de transports fait parfois défaut…

«Il y a effectivement un problème de desserte. Les plages horaires ne sont pas toujours très étendues, il n'y a parfois pas du tout de desserte les week-ends… L'offre en zone rurale doit être étendue, cela fait partie du refinancement des réseaux de transport en faveur duquel nous plaidons. Un autre problème est celui des arrêts parfois très espacés. Nous sommes favorables à développer un système d'arrêts à la demande, au moins à partir d'une certaine heure, comme le font déjà certains chauffeurs de bus de manière informelle. Un tel système serait rassurant, notamment par rapport au risque de harcèlement tard le soir.»

Le train, la base du système de transports en commun

Les écologistes plaident depuis longtemps pour un réseau ferroviaire ambitieux. Pour Manu Disabato, l'offre doit encore être étoffée.

L'un des points noirs de la politique de mobilité est le bouclage du RER…

«Il y a évidemment urgence à boucler ces travaux. Cela permettra de doper l'offre de la SNCB dans et autour de Bruxelles. Ce type de réseaux express locaux qui utilise les voies ferrées doit également être développé comme à Liège et Charleroi. Ces réseaux locaux ont un gros potentiel pour dissuader les particuliers d'avoir recours à la voiture. Enfin, c'est une évidence, mais il faudra absolument travailler sur ce point dans les années à venir: la ponctualité. Elle doit être améliorée, sous peine de décourager totalement les usagers.»

Dans les zones rurales, le train peut-il être une solution?

«Nous estimons qu'il est nécessaire de préserver les petites lignes et les gares rurales. C'est même un domaine où il faut réinvestir, afin d'offrir une plus grande amplitude horaire. Ces petites lignes permettent de ramener des passagers vers les plus grands axes.»