En France, les harceleurs de rue pourraient bientôt recevoir des amendes

Harceler une femme dans la rue pourrait très prochainement être passible d'une amende en France. Mais la mesure suscite les réserves d'associations féministes ou d'universitaires qui s'interrogent sur son efficacité.
par
ThomasW
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«Hey mademoiselle», «Charmante !», «Tu me donnes ton numéro ?» La scène est tristement classique: une femme marche dans la rue, un inconnu l'aborde, se montre insistant.

« Le corps des femmes n'est pas un bien public »

Quasi quotidien, ce harcèlement subi par de nombreuses femmes dans l'espace public et les transports en commun est dans le viseur du gouvernement. Dès son arrivée, la secrétaire d'Etat à l'Égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, affirmait que «le corps des femmes n'est pas un bien public».

Fin septembre, elle a installé avec les ministres de la Justice et de l'Intérieur un groupe de travail «transpartisan» composé de cinq députés (quatre femmes et un homme). Il est chargé d'auditionner des experts et de réfléchir à un projet de loi.

 

 

Une zone grise entre la séduction et l'agression

«Le harcèlement de rue n'est pas caractérisé dans la loi. Il y a d'un côté la séduction, qui est consentie entre deux adultes, et de l'autre l'agression sexuelle ou l'injure publique qui sont caractérisées. Entre les deux, c'est une zone grise», a expliqué Mme Schiappa lors de sa conférence de rentrée.

Selon elle, la nouvelle infraction pourrait «accompagner» la création de la police de sécurité du quotidien (PSQ), dont l'expérimentation doit débuter début 2018. Dès lors, il ne sera pas possible de déposer plainte au commissariat. L'agent de police devra constater lui-même l'infraction et établir un procès-verbal.

 

 

De nombreuses questions

Quels éléments seront retenus pour caractériser un harcèlement ? Les policiers seront-ils formés ? Combien coûtera l'amende ? Le projet pose de nombreuses questions.

«En l'état actuel des choses, on a peur que ça ne marche pas», dit à l'AFP Marine Stoll, de l'association Stop harcèlement de rue. «Si l'agent doit être témoin ou si la victime doit venir devant lui avec son harceleur, ça paraît très difficile, voire contre-productif, car il y aura peu de verbalisations».

S'il n'est pas question de mettre «un policier derrière chaque femme», la mesure aura avant tout «une valeur d'exemple», justifie le gouvernement. Mais les associations craignent que «soient particulièrement ciblés les quartiers populaires, fréquemment montrés du doigt», alors que «les milliers de témoignages que nous recevons prouvent que le harcèlement de rue s'illustre absolument partout», poursuit Marine Stoll.