Va-t-on bientôt lever le tabou sur les salaires en entreprise?

Grand incontournable des entretiens d’embauche, le sujet des prétentions salariales embarrasse souvent les candidats à l’emploi. En effet, il n’est pas toujours évident de négocier un salaire plus élevé que celui de son précédent poste.

par
ETX Daily Up Studio
Temps de lecture 3 min.

Faire le pari de la transparence salariale, voilà l’ambition de la nouvelle campagne de Liberty Hive. Cette plateforme de mise en relation de consultants dans les médias l’a lancée le 9 janvier dernier afin de faire évoluer les mentalités en matière d’inégalités salariales au Royaume-Uni. Depuis 2018, les entreprises de plus de 250 salariés sont légalement tenues de divulguer et d’expliquer chaque année les écarts de revenus au sein de leur organisation. La promulgation de cette loi avait notamment permis de révéler des disparités salariales substantielles entre les hommes et les femmes, surtout dans la finance.

Mais ce n’est pas suffisant pour Kate Merritt et Laura Braithwaite, les fondatrices de Liberty Hive. Les deux femmes militent pour que les entreprises soient dans l’obligation d’indiquer la rémunération qu’elles proposent dans leurs offres d’emploi, et qu’elles ne puissent plus demander aux candidats potentiels leur précédent salaire. Selon elles, ces mesures favoriseraient l’équité en luttant contre les écarts de rémunération.

En effet, certaines catégories d’actifs ont traditionnellement été sous-payées, notamment les femmes et les personnes issues de minorités. Le fait de leur demander leur historique de salaires les pousserait inconsciemment à prétendre à une rémunération similaire à celle qu’elles ont toujours eu, même si elle ne reflète pas réellement leurs compétences.

Le fantôme de l’historique de salaires

Une enquête de l’association britannique Fawcett Society datant de 2021 révèle que 61% des femmes interrogées sur leur historique de salaires trouvent que cela nuit à leur confiance en elles dans la sphère professionnelle. Quelque 58% ont même l’impression que leur faible rémunération «revient les hanter» lorsqu’elles abordent le sujet avec un recruteur. «Dans le meilleur des cas, les questions sur l’historique de salaires sont agaçantes», avait déclaré Jemima Olchawski, directrice générale de Fawcett Society, au moment de la publication des résultats de l’enquête. «Mais cela vaut plus loin que cela. Demander l’historique de rémunération peut impliquer que les inégalités salariales passées suivent les femmes, les personnes issues de minorités ethniques et les personnes en situation de handicap tout au long de leur carrière. Cela signifie également que les nouveaux employeurs reproduisent les écarts salariaux d’autres organisations».

C’est pourquoi Liberty Hive a annoncé qu’elle ne demanderait plus l’historique de salaires lors des entretiens d’embauche et qu’elle encouragerait ses partenaires commerciaux à mettre en place des grilles de rémunérations transparentes. La start-up invite d’autres organisations britanniques à en faire autant. Et pour cause, le Royaume-Uni est à la traîne par rapport à d’autres pays en matière de transparence salariale.

L’Islande en avance

L’Islande est devenue une pionnière sur le sujet en imposant l’égalité salariale dès 2018. Depuis cette date, les entreprises de plus de 25 salariés et les administrations nationales sont contraintes de prouver qu’à poste et compétences égales, hommes et femmes touchent le même salaire. Un organisme indépendant est chargé de vérifier qu’elles répondent à ces critères et leur délivre une certification, à renouveler tous les trois ans. Celles qui n’appliquent pas cette politique écopent d’une amende de 50.000 couronnes (environ 324 euros) par jour, au maximum. Aux Etats-Unis, une vingtaine d’États américains interdisent aux employeurs d’interroger les candidats à l’emploi sur leurs précédentes rémunérations dans un souci d’équité. De quoi redonner du pouvoir aux salariés, à l’heure où le marché du travail est marqué par l’inquiétude.

Retrouvez toute l’actu sur Metrotime.be