Le porno engagé et éthique séduit de plus en plus les jeunes adultes : «Ça a impacté ma vision du sexe»

Depuis quelques années, parallèlement aux mastodontes du secteur de la pornographie, un mouvement se développe et rencontre de plus en plus de succès: le porno éthique et engagé.

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Les chiffres du porno en Belgique ont de quoi faire tourner la tête. Selon les statistiques d’un célèbre site gratuit de contenu X, le Belge resterait près de neuf minutes en ligne lors de chaque visite, soit près de deux fois plus longtemps que les Cubains. Et lorsqu’il faut faire une recherche sur le contenu recherché, les Belges sont les seuls Européens à ne pas faire de recherche sur leur propre nationalité. Pour trouver du contenu à leur goût, ils ont plutôt tendance à rechercher «French» (Français.e) plutôt que «Belgian» (Belge). Le profil des visiteurs est quant à lui moins diversifié que dans d’autres pays puisque plus de la moitié des consommateurs de porno en ligne ont moins de 35 ans et seulement un peu plus de 5% ont plus de 65 ans.

Du porno différent

Mais oubliez Pornhub, Dorcel et Jacquie et Michel. Depuis quelques années, une nouvelle tendance émerge, celle du porno éthique. Par opposition à l’industrie du X dominante, l’objectif est de proposer du contenu pornographique respectueux des acteurs dans lequel ils sont correctement traités et rémunérés. Le principe est également de ne pas proposer uniquement du contenu fait par des hommes, pour des hommes. Les maîtres mots de ses vidéos sont donc le respect et le naturel. Cellulite, poils sous les aisselles, seins naturels, ce porno se veut au plus proche de la réalité et il y en a pour tous les goûts, les tailles et les couleurs.

Cette nouvelle tendance est plutôt réjouissante. En effet, selon une étude, un quart des Américains âgés de 18 à 24 ans déclarent que la pornographie est leur source d’information la plus utile en matière de relations sexuelles. Chez cet échantillon représentatif de jeunes adultes, le porno arrive devant les partenaires sexuels, mais également les amis, les parents, les médias, et les professionnels de santé. «La mauvaise nouvelle est que les jeunes adultes ne comprennent pas à quoi sert la pornographie. Une grande partie de la pornographie en ligne, qui est gratuite, existe pour se divertir et pour permettre aux créateurs de gagner de l’argent. Elle n’est pas là pour vous apprendre ce que vous êtes censé faire quand vous avez des relations sexuelles», explique le Dr Emily Rothman, principale auteure de l’étude. D’ailleurs, selon les statistiques chez nous, près d’un consommateur sur deux a tenté de reproduire des positions ou des scènes vues dans des films pornographiques.

Les confessions de Sébastien

La bonne nouvelle est que de plus en plus de jeunes ont désormais conscience de l’impact néfaste de la pornographie gratuite sur Internet. Malgré le coût parfois conséquent, ils décident de mettre la main… au portefeuille, pour consommer du porno éthique. À l’instar d’un abonnement à Netflix, Spotify ou Disney+, ils optent pour un abonnement payant pour jouir de leur plaisir solitaire. C’est le cas de Sébastien. Ce jeune Bruxellois de 26 ans est abonné à XConfessions. «J’ai découvert ce concept après avoir discuté de la consommation du porno avec une amie. J’ai trouvé que c’était une bonne chose de se tourner vers ce mode de consommation. Après avoir fait quelques recherches, je me suis tourné vers XConfessions. Je savais que c’était l’un des pionniers en la matière et une valeur sûre.»

Sébastien paye donc 143 $ par an, soit environ 130€, pour avoir accès à cette plateforme. Mais en quoi consiste le contenu proposé? «Le principe est que les vidéos partent de fantasmes envoyés par la communauté. À partir de ces confessions, le réalisateur ou la réalisatrice réalise un film porno. Ça se focalise davantage sur le rapport entre les personnes, plutôt que leur plastique et leur physique. De la sorte, tu te focalises plus sur l’humain et sur le plaisir que sur le rapport sexuel en tant que tel. Personnellement, je n’ai jamais été attiré par les stars du X qui simulent leur plaisir et tournent les scènes à la chaîne. Là on ressent vraiment qu’ils sont dans un moment qu’ils kiffent tous les deux, qu’ils sont là de leur plein gré et qu’ils sont payés pour ça», détaille le jeune Bruxellois.

S’il accepte volontiers de payer cet abonnement pour avoir accès à du porno différent, Sébastien avoue que tous les contenus ne sont pas pour lui. «C’est hyper inclusif. Tu peux donc parfois te retrouver avec des trans en plein milieu de ton porno. Ce n’est pas spécialement mon truc mais ce n’est pas grave non plus. Il me suffit de fermer la vidéo et de passer à autre chose. Le contenu reste essentiellement focalisé sur les rapports hétéros mais il peut y avoir des rapports gays, bis ou trans. Dans les films, les acteurs ne doivent pas remplir de critères précis pour y figurer. Il n’y a aucun standard. Comme dans la sexualité à travers le monde, on peut retrouver des personnes tatouées ou avec les seins refaits, tout comme des filles avec de la cellulite ou des poils». Bref, il y a un peu de tout et pour tout le monde.

Une façon de s’engager

Beau joueur et partageur, Sébastien n’hésite pas à partager ses identifiants avec ses amis pour qu’ils découvrent XConfessions. «Des potes m’ont demandé d’avoir mes identifiants et c’est essentiellement des meufs à vrai dire. Elles sont curieuses de découvrir». Mais cet abonnement n’empêche pas Sébastien à de temps en temps retourner sur des sites pornos mainstream. «Ça m’arrive encore car parfois j’ai la flemme de choisir et de trouver une vidéo que je kiffe. Je me suis déjà fait la réflexion que ce n’était pas bien mais je me dis aussi que c’est déjà un bon pas de ma part de payer pour ça. C’est une façon de m’engager».

«Ça a impacté ma vision du sexe»

Enfin, à l’heure de terminer cette interview, nous avons demandé à Sébastien si ce porno éthique et engagé avait eu un impact sur sa sexualité. «Ça a contribué à mon éveil au niveau de la sexualité et à la façon dont j’ai envie de vivre mes rapports dans la vraie vie. C’est un tout qui va aussi avec le consentement ou encore à l’ouverture à des pratiques qu’on ne connaît pas spécialement. Tout ça se retrouve dans le porno éthique et ça a impacté ma vision du sexe. C’est aussi un moyen d’ouvrir la discussion avec plein de personnes et qui permet de changer la vision des gens sur la sexualité. C’est important et je pense qu’il y a encore beaucoup de chemin à faire même si je trouve qu’on est sur la bonne voie», conclut le jeune homme.