Être ou ne pas être tendance, telle est la question (tendance) du moment

Elles ont fait et défait la mode pendant des décennies, jusqu’à devenir ces derniers mois omniprésentes, si ce n’est envahissantes. Les tendances mode sont partout, au point de n’être plus nulle part, sinon mentionnées sous la forme d’un hashtag perdu dans les méandres du virtuel. De quoi s’interroger sur leur pertinence à l’aube d’une nouvelle année qui devrait consacrer expression de soi et mode raisonnée.

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par
ETX
Temps de lecture 5 min.

Tendance. Un mot que l’on utilise aujourd’hui pour tout et n’importe quoi, accompagnant de micro-phénomènes tout droit sortis des réseaux sociaux, des séries Netflix, et autres univers virtuels. Il n’est plus question de suivre les inspirations saisonnières des plus grands créateurs de mode, et des influenceuses les plus aguerries, mais de se laisser aller à des impulsions qui, progressivement, tuent lesdites tendances. Une chose qui devrait être renforcée dans les mois à venir par la volonté des consommateurs de se tourner vers une mode plus engagée et raisonnée, et d’affirmer leur personnalité avec un style singulier, loin des tendances préconisées par TikTok.

Des micro-tendances par milliers

Avant l’ère des réseaux sociaux et du streaming, et plus précisément de TikTok et de Netflix, les tendances étaient déjà nombreuses mais semblaient maîtrisées. Prenant leur source sur les podiums new-yorkais, londoniens, milanais, ou parisiens, elles émergeaient, puis explosaient, sous l’impulsion de personnalités publiques, sur tapis rouges ou dans la rue, pour finir leur course effrénée dans nos placards, et ce pour – au moins – une saison. Un cycle critiqué par les défenseurs d’une mode plus raisonnée, mais qui permettait de donner le ton, accompagnant souvent des changements sociétaux d’envergure.

Ça, c’était avant. Désormais, les tendances, ou devrait-on dire les micro-tendances, poussent aussi vite que des champignons, à raison d’une, deux, voire trois par semaine. Un rythme fou qui les rend d’autant plus éphémères, et d’autant moins impactantes. Barbiecore, balletcore, cottagecore, goblincore, kidcore, normcore, regencycore, ou ’en-core’ gorpcore et fetishcore, entre autres, comptent parmi les ’tendances’ qui ont rythmé l’année 2022 et généré des milliards de vues sur TikTok. De quoi faire cliquer les utilisateurs en quête de nouveautés, bien décidés à faire figure de précurseurs en la matière.

Et c’est sans compter sur l’influence des séries télévisées sur la mode, de la comédie romantique «Emily in Paris» aux drames historiques «The Crown» et «La Chronique des Bridgerton», qui sont elles aussi à l’origine de dizaines d’inspirations mode, du corset au béret en passant par les gants longs, les perruques, et autres accessoires anachroniques que le commun des mortels ne portera sans doute jamais. Les tendances se suivent sans jamais se ressembler – ou presque – à un rythme effréné, au point de ne plus rien signifier, si ce n’est un goût prononcé pour l’éphémère et les styles divers et variés.

’Weird girl’, la tendance anti-tendance

L’accumulation des tendances est telle qu’une nouvelle tendance – et c’est le comble – est née pour pointer du doigt le phénomène. C’est à n’y plus rien comprendre. «Weird girl», également né sur les réseaux sociaux, avec pas moins de 140 millions de vues à son actif sur TikTok, prend le contre-pied de cette multiplication des micro-tendances en conviant chacun à adopter un style unique et singulier. L’objectif? Ne pas suivre les tendances, ne pas embrasser les codes établis, et laisser libre cours à son imagination, sa créativité, sans se soucier du qu’en-dira-t-on.

D’après le moteur de recherche de mode mondial Lyst, le style «Weird girl», que l’on peut traduire par «Fille bizarre», serait l’esthétique mode de l’année sur TikTok. Brouillant clairement les pistes, et permettant d’aborder la mode différemment, cette énième tendance tend à démontrer que les utilisateurs des réseaux sociaux semblent eux-mêmes lassés de cette succession – sans fin – des tendances mode en tout genre.

Expression de soi et urgence climatique

Qu’on se le dise, les tendances – celles qui émergent des défilés – ne naissent pas par hasard, et sont le fruit d’études approfondies, se voulant le plus souvent les reflets de changements sociétaux d’envergure. D’où le fait qu’elles prennent leur source non pas sur un, mais plusieurs podiums, et ce simultanément dans les quatre capitales de la mode. Indispensables pour l’ensemble de l’industrie, du luxe aux enseignes de prêt-à-porter, elles donnent le ton de la saison, et ce même si certains critiques un rythme bien trop effréné. Chose qui pourrait leur nuire dans un future proche, du fait des nouveaux enjeux environnementaux auxquels doivent faire face les acteurs du secteur.

Qui dit slow fashion, dit fabrication plus lente, entre durabilité et éco-responsabilité… Des termes en totale opposition avec le principe même des tendances. On peut donc s’attendre dans les mois à venir, en plus de cette lassitude à assimiler trop de tendances, à voir leur impact s’amoindrir, avec un retour à un dressing plus basique. Un phénomène renforcé par le besoin du public d’afficher un style plus singulier, en lien avec la personnalité, plus que les tendances du moment, soulignant non pas l’expression d’une inspiration prédéfinie, mais de soi. Deux choses qui pourraient participer à la fin des tendances mode, ou, peut-être, à un retour aux tendances dites classiques, saisonnières, uniquement. Et même, à l’émergence de ces micro-tendances dans un autre monde, le métavers, où les utilisateurs pourraient exprimer comme bon leur semble toutes leurs inspirations et leurs envies.

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