Voici les trois grandes pistes explorées par les scientifiques en matière de contraception masculine

La recherche est lente en matière de contraception masculine, mais elle avance. Voici trois grandes pistes, qui ont été présentées lundi à un congrès organisé à Paris sous l’égide de l’Académie de médecine.

par
ETX Daily Up Studio
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Ces travaux n’en sont toutefois qu’à un stade encore précoce. Les essais cliniques sont rares en la matière face à des difficultés à la fois scientifiques et économiques, l’industrie pharmaceutique manifestant peu d’intérêt pour le sujet.

Un gel sur l’épaule

C’est la piste de recherche la plus avancée, même si les études sont encore loin de permettre d’envisager une commercialisation rapide.

Il s’agit d’un gel à appliquer chaque jour sur son épaule. Il contient à la fois une hormone féminine, dite progestative, pour bloquer la formation de spermatozoïdes, et de la testostérone, afin de compenser les effets de la première sur la libido ou la pilosité.

Pourquoi passer par voie cutanée et non orale, comme les pilules féminines? C’est que la testostérone est mieux assimilée par ce canal. Absorbée dans une pilule, ses effets disparaissent avant même la fin de la journée. Via un gel, ils persistent plus longtemps.

Les essais, principalement réalisés aux Etats-Unis, sont actuellement en phase 2, la plus avancée pour des travaux en cours sur un contraceptif masculin. Réalisés auprès d’environ 200 couples, ils doivent donner une première idée de l’efficacité de cette méthode, dont la sécurité et la réversibilité sont déjà suffisamment avérées.

Selon l’endocrinologue Régine Sitruk-Ware, qui participe à ces essais et organise par ailleurs le colloque de Paris, les premiers résultats sont suffisamment bons pour accélérer la marche.

«Ce produit semble très efficace et très bien accepté», rapporte-t-elle à l’AFP. Les chercheurs vont demander d’ores et déjà aux autorités sanitaires américaines d’autoriser la phase suivante, qui permettra de s’assurer réellement de l’efficacité du produit en le testant sur un nombre bien plus grand de personnes.

On est toutefois encore loin d’une mise sur le marché. «En principe, on pourrait dire dans cinq ans mais c’est la vue optimiste, il arrive toujours des obstacles imprévus à surmonter en cours de développement», prévient Mme Sitruk-Ware.

Des pilules restent à l’étude

A cause des difficultés à assimiler la testostérone par voie orale, une pilule masculine est difficile à concevoir. Mais des chercheurs continuent à suivre cette voie et ont obtenu de premiers résultats encourageants sur l’homme ces dernières années.

Pour y arriver, il a fallu renoncer à un concept: celui qui, comme le gel décrit ci-dessus, consiste à associer deux hormones, un progestatif associé à de la testostérone.

A la place, les chercheurs travaillent à partir d’une seule hormone. Celle-ci détient, à la fois, les deux effets souhaités: progestatif, en limitant la production de spermatozoïdes, et androgène, en remplaçant le rôle de la testostérone.

On connaît, en fait, deux hormones synthétiques qui peuvent jouer ce double rôle. Des recherches sont donc en cours sur des pilules élaborées à partir de chacune d’entre elles.

Ces dernières années, ces recherches ont passé un premier stade, qui permet de garantir que ces pilules sont bien tolérées, donc sans effet secondaire grave et systématique.

On sait aussi qu’elles ne semblent pas avoir d’effet irréversible sur la fertilité. Reste maintenant à évaluer si elles sont suffisamment efficaces.

«Malheureusement, à cause du Covid, les essais et les résultats prennent beaucoup de temps», a expliqué à l’AFP la chercheuse Stephanie Page, qui travaille sur l’une de ces pilules.

Un produit bloquant le sperme

C’est une piste encore moins avancée que les deux précédentes, mais pour laquelle de premiers essais sur l’homme doivent commencer en fin d’année pour d’abord s’assurer qu’elle est bien tolérée sans effet secondaire marqué.

Le principe est d’injecter un gel qui bloque les spermatozoïdes lors de l’éjaculation, sans empêcher celle-ci. Les promoteurs de cette méthode, élaborée par la startup américaine Contraline, promettent des années de tranquillité après l’injection.

Ce fonctionnement s’apparente à une vasectomie même si, contrairement à celle-ci, les concepteurs assurent que l’effet du gel est systématiquement réversible.

L’idée n’est par ailleurs pas neuve. Un concept semblable, dit Risug, a fait l’objet pendant plusieurs années d’études en Inde. Les chercheurs avaient fait état de résultats positifs en 2019, mais, depuis, n’ont pas donné de nouvelle.