Trois raisons pour lesquelles nous ne parviendrons jamais à éradiquer la Covid-19

Il y a trois ans, le Covid-19 bouleversait la planète. La pandémie n'est pas terminée et les chercheurs préviennent qu'il faut s'attendre à d'autres épidémies en tirant les leçons de la crise qu'elle a engendrée pour mieux s'y préparer.

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Rédaction en ligne avec AFP
Temps de lecture 3 min.

La pandémie de Covid est-elle bientôt terminée?

«Nous n'en sommes pas encore là», a averti début décembre l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Si au moins 90% de la population mondiale présente une forme d'immunité, «des lacunes dans la surveillance, les tests, le séquençage et la vaccination continuent à créer les conditions idéales pour l'émergence d'un nouveau variant préoccupant qui pourrait causer une mortalité significative», a prévenu son directeur général Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Quand une pandémie prend-elle fin ?

C'est l'OMS qui déclare la fin d'une pandémie. «C'est toujours un moment extrêmement important, souvent sujet à des controverses», a relevé la semaine dernière Philippe Sansonetti, microbiologiste, lors d'un colloque à l'Institut Pasteur, jugeant que l'organisation n'était probablement pas disposée à «siffler la fin» de la pandémie.

Pourquoi a-t-on du mal à éradiquer le coronavirus ?

Ce que les experts anticipent, c'est une transformation progressive de la pandémie en un virus endémique, continuant de circuler et provoquant des résurgences régulières de la maladie. C'est le cas aujourd'hui de la rougeole ou la grippe saisonnière. Pourra-t-on éradiquer un jour cette maladie? C'est très peu probable.

Et ce, pour trois raisons, souligne Philippe Sansonetti.

1. Pour éradiquer un virus, il faut que la maladie soit cliniquement visible. Or, une part des porteurs de la Covid-19 sont en effet asymptomatiques, ce qui nuit aux mesures d'isolement.

2. Un virus ne saurait être éradiqué tant qu’il y a un réservoir animal. Et, contrairement à la variole, le virus se transmet aux animaux et pourrait continuer à circuler chez eux et réinfecter l'humain.

3. Enfin, seul un vaccin très efficace, qui protège à vie permet de se débarasser définitivement d’une maladie. Or, les vaccins actuels protègent bien contre les formes graves de la maladie mais peu contre les réinfections, et des doses de rappel restent nécessaires.

«Le Covid-19 coche toutes les mauvaises cases», conclut le microbiologiste.

Quels sont les principaux risques à venir?

Pour Etienne Simon-Lorière, directeur de l'unité génomique évolutive des virus à ARN à l'Institut Pasteur, «on laisse aujourd'hui beaucoup trop circuler le virus»: à chaque fois qu'il infecte une personne, des mutations peuvent apparaître et sont susceptibles de le faire évoluer vers des formes plus ou moins sévères. «Même si ça nous arrangerait tous de croire cela, on n'a aucune raison de penser qu'il va devenir plus sympathique», a-t-il prévenu.

Par ailleurs, d'autres virus respiratoires pourraient émerger: depuis l'apparition du Sras, du Mers, et du Sars-Cov2, «on a retrouvé une bonne dizaine de coronavirus chez des chauve-souris qui pourraient potentiellement infecter l'homme», a relevé Arnaud Fontanet, spécialiste des maladies émergentes à l'Institut Pasteur. Environ 60%/70% des maladies émergentes sont d'origine zoonotique, c'est-à-dire qu'elles se transmettent naturellement des animaux vertébrés à l'homme et vice versa. En occupant des zones du globe de plus en plus larges, en voyageant, en intensifiant ses interactions avec les animaux, les humains contribuent à perturber l'écosystème et à favoriser la transmission des virus.

Comment s'y préparer?

Pour Arnaud Fontanet, «beaucoup peut et doit être fait au début d'une épidémie». Ainsi, en 2020, le Danemark a décidé un confinement très tôt, ce qui lui a permis d'en sortir plus vite, a-t-il fait valoir.

Autre impératif: «avoir une capacité de développement de tests très précoce», au début d'une épidémie, de manière à isoler les malades très rapidement. «Malheureusement, aujourd'hui on est encore dans la réaction, pas dans l'anticipation», regrette le chercheur. Au niveau international, le concept «one health» (une seul santé), apparu au début des années 2000, qui promeut une approche globale des enjeux sanitaires avec des liens étroits entre la santé humaine, celle des animaux et l'environnement, est de nouveau mise en avant. Un projet d'accord mondial sur la gestion des pandémies était aussi en discussion la semaine dernière à Genève, dans l'espoir d'éviter les erreurs ayant marqué la lutte contre le Covid-19.