Le procès des attentats du 13 novembre s’ouvre aujourd’hui à Paris

Près de six ans après les attentats jihadistes du 13 novembre, la justice replonge, à partir de demain, pour près de neuf mois dans l’horreur de ces crimes de masse.

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Sous sécurité maximale, la cour d’assises spéciale de Paris va juger 20 accusés, dont Salah Abdeslam, le seul survivant des commandos téléguidés par le groupe État islamique (EI). Les attentats ont fait 130 morts et plus de 350 blessés à Paris et Saint-Denis, et profondément traumatisé tout un pays. Ce procès a nécessité deux ans de préparation et la construction d’une salle d’audience ad hoc au cœur de l’historique palais de justice de la capitale. L’ampleur est hors-norme par le nombre de parties civiles (près de 1.800). Cela constitue donc un défi inédit pour l’institution judiciaire, particulièrement en temps de pandémie et de menace terroriste toujours élevée. Seule une partie -quelque 300- des proches de victimes et rescapés des attaques, les plus sanglantes de l’après-guerre, témoignera.

Une charge émotionnelle pour les victimes

Face à la cour et aux 14 accusés présents -six sont jugés par défaut- les victimes raconteront à la barre pendant cinq semaines, de fin septembre à fin octobre, cette nuit d’épouvante et ses séquelles, des drames personnels mêlés à un effroi collectif. «Chacun a ses propres attentes, mais on sait que c’est un jalon important pour notre vie d’après», estime Arthur Dénouveaux, rescapé du Bataclan et président de l’association Life for Paris. Ces prises de parole vont «faire rentrer l’humanité dans le procès», il faudra accepter certains «débordements» d’émotions, prévient-il.

Les avocats de Salah Abdeslam eux, mettent en garde: «ce procès promet d’être chargé en émotions, la justice se devra toutefois de les tenir à distance si elle ne veut pas perdre de vue les principes qui fondent notre État de droit», expliquent Olivia Ronen et Martin Vettes. «Nous veillerons à ce que ce procès exceptionnel ne devienne pas un procès d’exception», soulignent-ils. «S’il est essentiel que tous les acteurs de ce procès puissent s’exprimer, les victimes ayant besoin que leur douleur soit entendue, il ne faut pas perdre de vue que c’est avant tout le procès des accusés, qui devront être jugés à la hauteur de leur implication respective et au regard de leur parcours et de leur personnalité propres», renchérit une autre avocate de la défense, Léa Dordilly.

Quatre années d’enquête

Quatre années d’investigations ont permis de reconstituer une grande partie de la logistique des attentats, du parcours à travers l’Europe des membres des commandos, revenus de Syrie par la route des migrants, à leurs planques louées en Belgique et près de Paris.

L’enquête met au jour une cellule djihadiste bien plus importante derrière ces attaques, celle qui a également frappé l’aéroport et le métro de Bruxelles le 22 mars 2016, faisant 32 morts. En l’absence du donneur d’ordres, le vétéran du djihad Oussama Atar, et d’autres hauts gradés de l’EI dont les frères Fabien et Jean-Michel Clain, présumés morts et jugés par défaut, tous les regards seront tournés vers Salah Abdeslam et Mohamed Abrini, «l’homme au chapeau» des attentats de Bruxelles. Douze des 20 accusés encourent la réclusion criminelle à perpétuité. Trois accusés, contre lesquels pèsent les charges les moins lourdes, comparaîtront libres sous contrôle judiciaire. Plus d’une centaine de témoins ont été cités, dont de nombreux enquêteurs français et belges, et l’ex-président François Hollande.

Ce procès sera le deuxième en matière de terrorisme, après celui des attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher, à être intégralement filmé au titre des archives audiovisuelles de la justice.