Accord sur les dégâts climatiques, mais sans ambition contre le réchauffement: voici à quoi a abouti la COP27

Les près de 200 États réunis depuis le 6 novembre à Charm el-Cheikh, pour la 27e conférence climat de l’Onu (COP27), sont finalement parvenus à une décision finale, dans la nuit de dimanche, après des négociations âpres et à rallonge, qui ont dépassé de plus de 30 heures l’horaire initial.

par
Belga
Temps de lecture 4 min.

Si les négociateurs ont convenu de la création d’un fonds consacré aux pertes et préjudices des pays en développement face au changement climatique, un pas qualifié «d’historique», d’autres volets de l’accord laissent sur leur faim, en premier lieu celui de l’ambition à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Un fonds pour les pertes et préjudices

À l’ouverture de la dernière séance plénière de la COP27, au cœur de la nuit, son président, l’Égyptien Sameh Shoukry avait imploré les délégués à approuver les textes sur la table, jugeant qu’ils représentaient «le plus haut niveau d’ambition atteignable à cet instant» et «notre message collectif au monde». Il a fini par être entendu au cours d’une plénière de clôture hachée par plusieurs suspensions de séance.

La création d’un fonds pour les dégâts climatiques subis par les pays en développement «particulièrement vulnérables» est une victoire pour les nations du Sud qui la réclamaient depuis longtemps. Mais «l’établissement d’un fonds pour les pertes et préjudices n’est pas de la charité», a réagi la ministre pakistanaise Sherry Rehman, qui présidait le groupe G77+Chine, réunissant plus de 130 pays dans les négociations climat. «C’est un acompte sur notre futur commun, un acompte sur la justice climatique.»

«Ce fonds doit devenir le canot de sauvetage dont nous avons besoin. Mais ce n’est qu’un canot de sauvetage face à l’ouragan qui se prépare», a pour sa part déclaré le représentant de l’Alliance des petits États insulaires (Aosis).

L’objectif d’1,5ºC réaffirmé

Dans le clan européen, le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, faisait la moue dimanche matin. Et pas seulement à cause de la nuit blanche qu’il venait de passer. Certes les Vingt-Sept avaient fait une ouverture sur le fonds pour les pertes et dommages mais l’UE en espérait bien davantage sur le plan de l’ambition. «Trop de parties ne sont pas prêtes à faire des efforts accrus, certains ont même voulu revenir en arrière par rapport au pacte de Glasgow», dont l’objectif est de maintenir en vie l’objectif de limiter à 1,5ºC la hausse du mercure mondial, a dénoncé le Néerlandais.

Le «Plan de mise en œuvre de Charm el-Cheikh» adopté dimanche matin réaffirme cet objectif d’1,5ºC, sachant que chaque fraction de degré à son importance et que les émissions de gaz à effet de serre devront reculer de 43% d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2019. Les pays qui n’ont pas encore rendu de nouvelle contribution déterminée au niveau national (NDC), laquelle reprend les engagements des États pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, sont d’ailleurs exhortés à le faire aussi vite que possible avant la COP28.

Mais le texte de Charm el-Cheikh ne pipe mot sur une sortie des énergies fossiles, pourtant responsables du réchauffement. Il se contente de reprendre l’appel, certes lui aussi historique, mais alambiqué, de la COP26 à Glasgow, d’une réduction de l’utilisation (sans système de capture et de stockage de CO2) du charbon comme combustible et d’une sortie «des subventions inefficaces aux énergies fossiles».

En revanche, l’accord de la nuit dernière lance une invitation inédite aux banques multilatérales de développement, aux institutions financières internationales et à leurs actionnaires pour qu’ils revoient «leurs pratiques et priorités», mobilisent du financement climat et définissent «une nouvelle vision» à même de répondre à l’urgence climatique mondiale. Ces institutions sont également priées de tripler leur déploiement de financement climat d’ici 2025.

Un accord très critiqué

Les réactions mitigées des ONG environnementales aux aboutissements de la COP27 démontrent à quel point certaines attentes placées dans cette nouvelle conférence climat ont été déçues et combien il reste à faire pour garder une Terre vivable.

Pour le secrétaire général de l’Onu, qui d’ordinaire ne mâche pas ses mots pour rappeler l’urgence climatique, cette COP27 «a fait un important pas en avant» vers plus de justice. Mais Antonio Gutteres concède que le problème des émissions de gaz à effet de serre, qui continuent d’augmenter, n’a pas été traité à Charm el-Cheikh. «Un fonds pour les pertes et dommages est essentiel mais il n’est pas une réponse si la crise climatique raye un petit État insulaire de la carte ou transforme tout un pays d’Afrique en désert», résume le Portugais, sous forme de mise en garde.

Les regards sont d’ores et déjà tournés vers la COP28, prévue fin 2023, et qui sera organisée aux Émirats Arabes Unis. Avant cela, la COP15 biodiversité, retardée par la pandémie, se déroulera en décembre prochain à Montréal. Une COP biodiversité à laquelle le texte de décision de la COP27 ne fait, étonnamment, nulle mention.