Qui décrochera la Palme d’or ce soir à Cannes?

Le jury du Festival de Cannes décerne samedi soir la prestigieuse Palme d’or, épilogue d’une édition qui aura tenu sa promesse jusqu’au bout: célébrer malgré la pandémie le retour dans les salles et les retrouvailles du cinéma mondial.

par
AFP
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Qui succédera à «Parasite» du Sud-Coréen Bong Joon-ho, couronné en 2019, avant le coronavirus? Cette année, aucun favori ne se détache nettement, au terme d’une compétition de bonne tenue qui a compté pas moins de 24 films en compétition officielle.

Pour délibérer, le jury présidé par le cinéaste américain Spike Lee, premier artiste afro-américain à ce poste, et comptant des personnalités aussi diverses que le cinéaste Brésilien Kleber Mendonça Filho ou la chanteuse Mylène Farmer, va se retirer dans une villa cannoise.

Au sein du jury, «chacun a une opinion différente», avait confié Spike Lee dans les premiers jours du festival. «J’ai promis aux gens du jury que je ne serai pas un dictateur, que je serai démocratique… mais jusqu’à un certain point, puisque si le jury est partagé à quatre contre quatre, c’est moi qui décide! On va se marrer!».

Parmi les films qui ont le plus marqué la Croisette, «Drive my car», du Japonais Ryusuke Hamaguchi, est le favori de la presse internationale. Ce film-fleuve à l’esthétisme éblouissant, adapté d’une nouvelle de Haruki Murakami, met en scène deux êtres hantés par le passé.

Dans d’autres genres, personne n’a oublié «Annette», opéra-rock de Leos Carax, depuis sa projection en fanfare à l’ouverture, et beaucoup citent «Julie (en 12 chapitres)», fine observation des mœurs amoureuses de la jeunesse d’aujourd’hui, à la tonalité féministe, par le Norvégien Joachim Trier.

À moins que le jury ne saisisse l’occasion de primer une femme, pour la deuxième fois seulement, 28 ans après «La Leçon de piano» de Jane Campion – pourquoi pas la benjamine de la compétition Julia Ducournau, auteur du film le plus gore, «Titane», boudé par la critique mais qui n’a laissé personne indifférent.

Souffle féministe

Un sacre, à Cannes, du Russe Kirill Serebrennikov, en disgrâce à Moscou et interdit de quitter son pays après une condamnation, ou de Nadav Lapid, critique acerbe d’Israël, enverrait un message politique fort.

Parmi les cinéastes qui ont déjà obtenu la Palme d’or et tentent de rejoindre le club très fermé des neuf réalisateurs deux fois couronnés, seul Apichatpong Weerasethakul a convaincu une partie de la critique avec son film, pourtant le plus hermétique. Les derniers opus de Nanni Moretti et Jacques Audiard ont paru à beaucoup perdre en souffle ou en singularité.

Plus largement, à l’image d’une industrie travaillée par les évolutions sociétales, les films cannois, dans la compétition et au-delà, ont fait souffler un vent frais: malgré seulement quatre réalisatrices en compétition, le féminisme est omniprésent. Des réalisateurs s’en sont emparés, et les relations lesbiennes par exemple ont désormais toute leur place.

Le climat aussi a occupé une place plus importante que jamais, avec une sélection spéciale de films sur l’environnement, allant au-delà du manifeste, comme avec Aïssa Maïga qui s’est connectée à son histoire familiale dans «Marcher sur l’eau», pour aborder la question de l’accessibilité de cette ressource. Le sujet reste une grosse question pour le festival, qui a encore du chemin à faire pour continuer de réduire son empreinte écologique.

La soirée de samedi sera aussi l’occasion de remettre une Palme d’or d’honneur au cinéaste italien Marco Bellocchio, qui après cinq décennies de carrière engagée, n’épargnant ni l’armée ni la religion, présente un documentaire très personnel, «Marx peut attendre».

Et après l’émotion du palmarès, la Croisette va pouvoir décompresser. Cannes projette en clôture et en avant-première la comédie française la plus attendue de l’été, «OSS 117, Alerte rouge en Afrique noire», signée Nicolas Bedos avec Jean Dujardin toujours, en Hubert Bonisseur de La Bath, rejoint par Pierre Niney et Fatou N’Diaye.