Woodie Smalls déjà dans la cour des grands

par
Gaetan
Temps de lecture 3 min.

Proche des 2m de haut, casquette vissée sur la tête, le prodige du rap belge Woodie Smalls élève notre scène hip-hop parmi l'élite. Avant de le recroiser sur les scènes des festivals qui se l'arrachent (Couleur Café le 1/7, les Ardentes le 7/7 ou Dour le 16/7), nous avons retracé ensemble la fulgurance de son succès et nous avons envisagé la durabilité de son avenir.

De nombreux médias parlent de toi en tant qu'étoile montante du hip-hop belge. C'est une sacrée pression!

«Oui mais c'est vraiment cool que les gens aiment ma musique et je suis flatté de toute cette attention. En tant qu'artiste, c'est déjà un accomplissement en soi!»

On te compare souvent à des artistes comme A Tribe Called Quest, Tyler The Creator ou the Pharcyde. Personnellement, je reconnais des touches de Chiddy Bang. Comment est-ce que tu décrirais ta musique et où est-ce que tu la placerais sur l'éventail du genre?

«Chiddy Bang, vraiment? Merci pour le compliment! (rires) Ma musique est très ‘jeune ', elle est joyeuse, colorée et fun mais elle peut aussi être mélancolique, triste. Vraiment triste. Mais fun! (rires)»

Toujours à propos de ton style. On retrouve une tonalité old school mais on discerne également des touches plus modernes…

«Oui, j'aime vraiment regrouper ces deux mondes!»

C'est ce mix qui plaît particulièrement au public?

«Oui, je m'en rends surtout compte en concert: les gens retrouvent des références old school qu'ils connaissent et ils accrochent sur les touches plus modernes. Et je pense que c'est le contraste entre les deux styles qui plaît souvent aux gens.»

Tu es plutôt précoce concernant la musique. Tu as commencé à… 6 ans, c'est ça?

«À 8 ans! Je chantais tout le temps avec mon cousin, on passait notre temps à faire ça, vraiment… Dès qu'on se retrouvait, on écrivait des paroles et puis on se dirigeait vers le studio de mon oncle où on avait élu domicile (rires). Je me souviens qu'à l'époque j'étais incapable de composer une chanson entière. J'écrivais une phrase, une seize et c'était tout. K (K1D, son ami d'enfance, NDLR.) m'a appris à aller jusqu'au bout des choses. Il m'a dit: ‘Quand tu commences une chanson, tu dois la faire en entier: tu dois écrire les paroles, tu dois trouver un refrain accrocheur.' Le simple fait de réaliser toutes ces choses en m'amusant -aller au studio avec mes potes et m'éclater à écrire, à composer- c'est la raison pour laquelle j'ai persévéré.»

J'ai cru comprendre que la musique était une affaire de famille et de potes. Est-ce plus facile pour toi de travailler dans ce contexte?

«Oui, c'est plus naturel pour moi de faire de la musique quand mes potes sont là, quand on se marre… Ce serait plus difficile entouré de personnes que je ne connais pas. Ce ne serait plus spontané. Avec mes potes, c'est fluide: je parle des choses qui me tiennent à cœur, je définis les beats moi-même. Je m'investis à chaque étape et j'adore la vision d'ensemble que ça me donne.»

Est-ce que ta famille t'aide à gérer ta carrière, surtout depuis que ta musique est devenue un véritable business?

«Mon père m'aide au quotidien. Il me rappelle qu'il faut que je sois prudent, où que j'aille, quoi que je fasse… Il me dit de ne pas à me comporter comme si j'étais une star. Et ma mère m'encourage à rester tel que je suis, à continuer à me comporter normalement, comme j'aimerais que l'on se comporte avec moi en fait. Ils me maintiennent les pieds sur terre.»

Le succès a été très vite au rendez-vous. Désormais, tu fais tous les festivals, tu es l'invité de nombreux médias -et pas seulement les spécialisés… Comment gères-tu cela? Comment gardes-tu les pieds sur terre?

«La réponse peut paraître banale mais j'essaie de rester moi-même. Mes potes me considèrent et me traitent comme avant, comme je suis en fait. Ils seraient les premiers à me calmer et à me chambrer si je prenais la grosse tête (rires). Je vis toujours dans le même environnement, je suis une personne normale.»

As-tu déjà des nouveaux projets sur le feu?

«J'ai tellement hâte de sortir le nouvel album! On s'est éclatés à le faire et j'adore vraiment le résultat. Diverses influences s'y mêlent à nouveau et je suis super-content du son. Je le préfère même à ‘Soft Parade'. Je suis tellement impatient qu'il sorte… tellement hâte que je n'ai pas pu m'empêcher de commencer à chanter certains nouveaux morceaux sur scène (rires)! Et les réactions sont top! J'adore voir les gens s'éclater lors de mes concerts, c'est la meilleure chose au monde. Quand tu vois une fille danser sur ta musique ou un gars qui s'éclate, qui bouge la tête en rythme, c'est vraiment génial! Pour moi, c'est le meilleur retour que je puisse avoir.»

 

À l'heure où la scène hip-hop noire-jaune-rouge séduit à l'internationale et où les 16 mesures francophones s'exportent à foison, ce surdoué néerlandophone (qui rappe en anglais) jette une part de lumière sur le rap du nord du pays. Originaire de Saint-Nicolas en Flandre-Orientale, Woodie Smalls (Sylvestre Salumu de son vrai nom) propose un style US schizophrénique efficace qui s'appuie sur un flow puissant et rapide et des instrus appliquées. Dans son premier album «Soft Parade», il conjugue à merveille des sons ambiancés et mélancoliques. Ses clips colorés newschool et ses vibes oldschool qui sentent bon le ricain dépoussiéré des années 90 entrent dans la tête pour ne plus en sortir. Pour résumer: un talent à l'image de sa grandeur et inversement proportionnel à son jeune âge.

CD : 4/5

 

Sélection de clichés (de la photographe Marine Bardin) pris lors de la représentation Woodie Smalls aux Nuits Bota