L'homme d'une Brique dans le Ventre

par
joris
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Depuis 11 ans, Cédric Wautier nous montre que l'adage selon lequel le Belge a une brique dans le ventre n'est pas complètement un stéréotype. Tous les samedis, accompagné de sa comparse Virginie Jacobs, il nous introduit dans des intérieurs qui font le bonheur de leurs propriétaires. De grand standing, ou bien plus modeste, ils ont souvent pour point commun un goût pour l'astuce et cette volonté de nous en faire profiter.

Une « Brique dans le ventre » a trouvé un large public. Quelle est la recette ?

Le titre l'exprime bien, on dit depuis toujours que le Belge a une brique dans le ventre. Et c'est encore le cas aujourd'hui. C'est l'une des principales préoccupations du Belge que d'acheter un appartement ou une maison, en tout cas se faire un chouette chez-soi. Et ce qui marche également, c'est ce mélange entre de l'information et un ton assez jovial et léger. Et il y a aussi un côté curieux :

que se passe-t-il derrière cette façade que je vois peut-être tous les jours ? Et moi, j'ai envie que les propriétaires racontent l'histoire de leur maison.

Comment en êtes-vous venu à devenir le monsieur décoration de la RTBF ?

(rires) Je ne suis pas le monsieur décoration car je suis un très mauvais décorateur et bricoleur. En fait, c'est un hasard. Il y a 11 ans, j'avais travaillé pour le producteur de l'émission en tant que journaliste, et il m'avait parlé d'un projet d'émission consacré à la maison. On a fait un numéro zéro avec un architecte à la présentation, mais on a préféré que ce soit quelqu'un d'autre, en tout cas pas un professionnel de la construction. On a fait un second numéro zéro qui a marché, et trois semaines plus tard, on était sur antenne. Et cela fait 11 ans que ça dure.

Vient-on vers vous en rue pour vous demander un conseil ?

Les gens sont assez discrets, mais il m'est arrivé à des mariages qu'on me demande, par exemple, des conseils sur des panneaux photovoltaïques. Mais je ne suis pas un spécialiste, je suis davantage un passeur, je fais parler les gens de leur projet. D'ailleurs je ne veux pas être spécialiste parce que je perdrais ce regard. J'oublierais peut-être de poser les questions que se pose le grand public.

On ne s'en lasse pas après 11 ans ?

Non, c'est toujours agréable parce que l'émission marche très bien. Et chaque semaine, c'est une maison différente, avec un accueil différent, et une histoire. D'autant que si les gens nous accueillent chez eux, c'est qu'ils sont heureux à l'idée de partager une assez belle aventure qu'était la restauration d'une maison ou sa construction. On tombe très rarement sur des grincheux (rires). C'est une vraie émission familiale, tout le monde ne la regarde pas mais tout le monde la connaît.

Comment se construit l'émission ? Qui contacte qui ?

Alors au niveau de l'émission, il y a Sandrine et Emilie qui cherchent, qui passent leur temps sur des sites d'architecte, qui consultent tout une série de magazines. Nous aussi, au niveau de l'équipe, on n'hésite pas à laisser notre carte quand on croise quelque chose d'intéressant. Mais après autant d'années, on a créé des liens avec notamment des architectes qui peuvent nous renseigner. Parfois, ce sont les gens qui nous contactent en évoquant leur projet. On en discute au niveau de la production. Quant au choix de sujets, on essaye d'amener une émission cohérente et assez équilibrée. Par exemple, si je suis dans une maison un peu hors budget entre guillemets, on essaye alors de trouver des sujets plus terre-à-terre et qui permettent aux gens de réduire leur facture. Et si je suis dans une maison plus modeste, on choisira sans doute des sujets qui font un peu plus rêver.

L'angle est surtout de trouver des idées originales, pour gagner plus d'espace notamment.

Oui, c'est un peu notre leitmotiv. Que les gens puissent se dire : ‘tiens, on pourrait peut-être faire cela chez nous, utiliser telle solution en terme d'isolation, de gain d'espace, de matériaux. Parfois on se retrouve chez des propriétaires qui ont laissé totalement carte blanche à l'architecte, et d'autres qui avaient des exigences très particulières.

Vous aimez aussi mettre en exergue les matériaux de chez nous : le bois, la pierre bleue, etc.

Ah si on peut parler des matériaux de chez nous, c'est tant mieux. Il y a quelques jours, on a justement parlé de blocs en terre cuite qui sont une invention wallonne. C'est une façon de mettre en avant nos artisans et nos produits. On a justement un peu plus de temps qu'un magazine papier pour redécouvrir un matériau.

Au fil des ans, vous avez vu des tendances apparaître ou disparaître ?

Au début de l'émission, quand on évoquait des maisons en bois, les gens prenaient les propriétaires pour des baba-cools qui produisaient du fromage de chèvre au fond du jardin. Aujourd'hui, ce n'est clairement plus le cas. Le bois s'est largement développé. La question de l'énergie est beaucoup plus présente. On ne rénove plus aujourd'hui une maison comme on le faisait il y a à peine cinq ans. Les standards ont bien évolué, et c'est une bonne chose. Par contre, ce qui a peu évolué, ce sont les règles d'urbanisme. Il y a une frilosité chez certains services qui oublient qu'on vit au 21e siècle, que les habitats ont changé et que c'est débile de se calquer sur des maisons qui ont été construites au début du 20e siècle. C'est en train de changer, mais c'est lourd et lent.

C'est lourd et lent au sud du pays, tandis qu'en Flandre, c'est plus facilement la fête aux architectes. Vous êtes là aussi pour faire bouger les choses.

Je pense que tout le monde est là pour faire bouger les choses. Les magazines papier, les opérations porte-ouvertes dans les maisons, mais aussi la présence d'architectes dans les services d'urbanisme alors qu'avant c'était très administratif, etc. Et effectivement, en Flandre, c'est plus ouvert. Dans certaines régions en tout cas. Mais on tombe vite dans le stéréotype de la maison d'architecte contemporaine avec, au niveau déco, des grands designers plutôt que la personnalité des propriétaires.

Quels sont vos goûts personnels ?

En fait, je vis dans une maison typiquement bruxelloise du début du 20e siècle que j'essaye de restaurer petit à petit en l'adaptant à nos modes de vie. Dans mes rêves, j'aimerais un chouette terrain en plein cœur de la ville pour pouvoir construire une maison à ossature bois avec des niveaux assez simples mais avec beaucoup de chaleur. Une vraie maison familiale. Avec une belle pièce de vie. J'aime recevoir des amis et la vie de famille.

Ce samedi 28 février, Cédric et Virginie se promèneront dans les allées de Batibouw pour une spéciale ‘Brique dans le ventre' consacrée à ce salon. A voir à 20h20 sur La Une.

Qui est Cédric Wautier ?

Ancien étudiant à l'Ihecs, en communication appliquée, Cédric Wautier est entré comme pigiste à la RTBF avant d'intégrer le Service des Sports de la RTBF pendant deux ans. Journaliste pour des émissions diverses telles que « Télétourisme » ou « La Clé des Champs », il participe au lancement, en 2004, de l'émission « Une Brique dans le ventre » consacrée à l'habitat, avec un succès qui ne se dément pas. Il a également été chroniqueur culturel pour l'émission « Cinquante degrés nord ».

Par Pierre Jacobs