Eva Green dans la cité du péché

par
Jerome
Temps de lecture 4 min.

En Amérique, la suite longuement attendue de ‘Sin City' n'a pas réussi à répondre aux énormes attentes. Pourtant ‘J'ai tué pour elle' n'a pas manqué d'attention à sa sortie: une affiche où les seins d'Eva Green transparaissaient un peu trop à travers sa robe, avait été censurée. Un studio de cinéma ne peut rêver meilleur marketing. Metro a rencontré la fière propriétaire des objets du scandale.

Il n'est pas dans nos habitudes de commencer une interview en parlant de seins, mais n'avez-vous pas trouvé ce scandale un peu ridicule? ‘Sin City' parle de violence explicite, mais une suggestion de nudité sur l'affiche, c'est impossible.

Eva Green: «Absolument, tout cela est très hypocrite. Sur cette affiche j'ai aussi, par exemple, un revolver dans les mains, mais là personne qui trouve quelque chose à redire. C'est bizarre, non? Les seins n'ont jamais tué personne jusqu'ici, les armes si. Je ne comprends vraiment pas pourquoi quelqu'un s'offusquerait de cette image. Elle est tout de même très élégante, non? Il n'y a rien de vulgaire là-dedans, on suggère davantage qu'on ne montre. Mais bon, dans le film proprement dit, il y a bien sûr un peu plus de nudité.»

Les gens qui ont été choqués par cette affiche devaient savoir avec quel genre de film vous avez fait vos débuts d'actrice: dans ‘Innocents' (‘The Dreamers') de Bernardo Bertolucci, vous vous baladez complètement nue quasi tout le temps. Oseriez-vous encore ce genre de choses aujourd'hui?

«Bah, je ne sais pas. Je serais de toute manière trop vieille pour ça. (rires) Mais je ne le regrette pas, en tous les cas. Sans ce film, je ne serai pas où je suis. Et cela a été une expérience formidable. La sexualité est au cœur de ‘Innocents', chaque seconde de nudité était donc justifiée. Tout comme dans ‘J'ai tué pour elle' d'ailleurs, car mon personnage est une femme fatale qui se sert de son corps pour utiliser les hommes. Son corps nu est une arme.»

Ne trouvez-vous pas plus difficile aujourd'hui de se déshabiller devant la caméra? Sur internet, on n'a aucun contrôle sur ce genre d'images...

«Cela a toujours été un peu le cas, même si ce n'était que dans la tête des gens. Lorsque ‘Innocents' est sorti, on ne parlait que des scènes de sexe. Alors, en tant qu'actrice, vous vous demandez quand même: ‘Est-ce tout ce que les gens retiennent de ma prestation?' Mais c'est vrai en revanche que l'internet n'améliore pas les choses. En soi, je me fiche de ce que les gens pensent: si les scènes de nudité sont belles et artistiques, je les défends totalement. Seulement, sur internet, vous n'avez aucun contrôle de ce que l'on en fait, et c'est parfois un peu dégoûtant. Internet, les médias sociaux... Ce n'est pas mon truc.»

Pour en revenir à ‘Sin City': contrairement à beaucoup d'autres membres du casting, vous ne jouiez pas dans la première partie, comment vous êtes-vous retrouvée dans la deuxième?

«Robert Rodriguez et Frank Miller, les réalisateurs, m'avaient demandé de lire le scénario. Deux mois avant le tournage, je les ai rencontrés, et ce n'est qu'une semaine avant de commencer, que j'ai finalement eu la confirmation. J'avais envie de pouvoir jouer une vraie femme fatale pour une fois. Ce genre de personnage extrême, qui à un moment se fait passer pour un petit oiseau vulnérable pour se transformer ensuite en salope meurtrière, cela peut être incroyablement amusant. Elle est une sorte de caméléon qui joue avec le désir des hommes: elle change continuellement de couleur pour manipuler ses victimes.»

Y a-t-il aussi une femme fatale en vous? Vesper Lynd, la James Bond girl que vous jouiez dans ‘Casino Royale', s'avérait finalement une manipulatrice, elle aussi.

«Parfois je le voudrais bien, mais non. (rires) Ce pouvoir d'hypnotiser les hommes d'un regard, beaucoup de femmes en rêvent. Mais je ne suis absolument pas comme ça. Je suis le contraire d'une femme fatale.»

‘Sin City' imite le style visuel des romans graphiques de Frank Miller, qui a lui-même coréalisé le film. Était-il très précis dans la recréation de ses dessins de BD à l'écran?

«Oui. Les réalisateurs travaillent souvent avec un story-board, mais ici cela allait beaucoup plus loin que ça. Nous sommes vraiment restés très fidèles aux dessins de Frank. Je n'avais encore jamais vécu ce genre de choses. Il fallait alors par exemple que je place ma jambe dans une position très précise... Au début, je m'inquiétais un peu du fait que cela me limiterait, mais après quelques jours, vous trouvez quand même, dans ce contexte très clairement délimité, une certaine spontané. Nous pouvions tout de même bouger un peu, ouf. (rires) Tout le tournage en outre se faisait dans un studio rempli d'écrans verts. Pas l'environnement le plus stimulant, mais grâce à dieu je pouvais quand même jouer avec des gens de chair et de sang. Certains collègues n'avaient pas cette chance...»

Lieven Trio

@l_trio