Pourquoi les tueurs en série nous passionnent-ils et s’agit-il d’une fascination morbide?

Depuis maintenant un mois, la série «Dahmer» connaît un succès planétaire. Celle-ci retrace le parcours de Jeffrey Dahmer, tueur en série qui a fait 17 victimes dans années 80 aux États-Unis. Mais pourquoi les histoires de ces hommes qui ont créé tant de souffrances nous fascinent-elles autant et, surtout s’agit-il d’un intérêt morbide?

par
Sébastien Paulus
Temps de lecture 4 min.

Depuis sa création, le cinéma a toujours eu un lien particulier avec les tueurs en série. Avant lui, la littérature a, elle aussi, créé beaucoup d’histoires autour des meurtres en série, qui semblent être un sujet qui intéresse beaucoup le grand public. Depuis le mois dernier, la série «Dahmer» montre encore que les téléspectateurs répondent présents quand on leur raconte l’histoire des tueurs en série. À l’heure d’écrire ces lignes, la série cumule 300 millions d’heures de visionnage et pourrait battre des records. Celle-ci dépeint le parcours de Jeffrey Dahmer, qui aura tué 17 jeunes hommes entre 1978 et 1991 aux États-Unis, avant d’être arrêté puis tué par son codétenu en 1994.

Pourquoi est-on fascinés?

La question mérite naturellement d’être posée, et un premier élément qui y répond est de constater que cette fascination vient d’une incompréhension de la façon de penser des serial killers. «On ne sait pas réellement comment sont les tueurs en série, car si on le savait, il n’y aurait aucune fascination», explique l’auteure du livre UK Serial Killers Emily Tibbats.

Et si cette fascination existe, c’est peut-être aussi parce que les séries dépeignent un visage trop glamour de ces hommes: «Ce sont souvent des types hyper intelligents, des antihéros mais des héros quand même. On choisit à chaque fois des acteurs qui sont plutôt beaux. Ils en deviennent des tueurs «glamour». Or la plupart des tueurs en série sont pourtant des «messieurs-tout-le-monde» et c’est d’ailleurs grâce à ça qu’ils arrivent à tuer.»

Effectivement, si l’on se penche sur le «vrai» Jeffrey Damher, il s’agissait d’un homme solitaire et qui passait inaperçu. Il n’avait éveillé la méfiance de personne, si ce n’est de ses voisins qui avaient signalé à la police des odeurs étranges ainsi qu’un comportement bizarre. Si l’on remonte un peu l’histoire des tueurs en série, c’est Jack l’éventreur qui a été le premier à fasciner le grand public.

Enfin, Joseph Agostini, psychologue de son état, explique à nos confrères d’Ouest-France que nous sommes fascinés par le phénomène de pulsion : «Ce qui nous fascine, c’est ce qui nous dépasse, donc la pulsion, qu’elle soit sexuelle ou criminelle. La pulsion rôde toujours quelque part dans l’humain. Ce serait naïf de dire que l’homme ne s’intéresse pas à la question du meurtre. Elle est même fondatrice de notre civilisation. Dans n’importe quel ouvrage religieux on trouve du sang et de la rivalité.»

Des dérives inquiétantes

Cette fascination peut parfois prendre une tournure inquiétante, notamment lorsque certains affichent leur soutien à ces tueurs en série. Le psychologue affirme qu’il s’agit d’un signal d’alerte important: «C’est de l’ordre de la pathologie psychiatrique. L’entourage doit s’en inquiéter sérieusement: ça dévoile une part morbide de la personne dans le meilleur des cas, et une part meurtrière dans le pire.»

«Prendre du plaisir à regarder ces séries, c’est avoir perdu le sens de la réalité, car il ne faut pas oublier que Dahmer est un être humain qui a vraiment existé et qui a fait beaucoup de mal», conclut l’expert.

Dans un autre ordre d’idées, les collections concernant ces tueurs continuent de connaître un succès grandissant. présent en vente. Taylor James, qui dirige Cult Collectibles à Vancouver, au Canada, a déclaré qu’il était prêt à se séparer des lunettes de prison du tueur en série pour 150.000 $. Taylor James dit avoir mis la main sur les lunettes il y a quelques années, avec un tas d’autres souvenirs de Dahmer. L’urne contenant les cendres du tueur a été mise en vente au prix de 250.000$. C’est peut-être dans ce genre de cas que l’on peut parler sans trop se mouiller de fascination morbide...