Renate Reinsve crève l’écran dans «Julie en 12 chapitres»: «J’ai senti une connexion avec le rôle»

A star is born! Lauréate du prix d’interprétation à Cannes alors qu’elle envisageait de lâcher le métier, la Norvégienne Renate Reinsve est venue présenter ’Julie en douze chapitres’ au dernier festival de Gand. Un film coup de cœur rendant ses lettres de noblesse à un genre souvent sous-estimé: la comédie romantique!

par
Stanislas Ide
Temps de lecture 3 min.

Comment Joachim Trier vous a-t-il repérée pour le rôle de Julie, cette jeune femme incapable d’arrêter ses choix sereinement?

Renate Reinsve : «Il a écrit le rôle pour moi! Je disais une petite réplique dans son film ’Oslo, 31 août’, et il m’a dit que j’étais faite pour tenir un rôle principal. Quand il a vu les années passer sans que ça n’arrive, il a sorti son clavier. Il avait remarqué que chacune de nos conversations terminait en questionnements existentiels, comme ce qu’est l’amour, ou pourquoi les mêmes schémas nous attirent dans les mêmes galères, encore et encore. Et grâce au théâtre, il savait que je passais facilement du drame à la comédie.»

Vous avez réagi comment?

«J’étais très nerveuse mais j’ai directement senti une connexion avec le rôle. Maintenant que le film a été montré, je réalise que je ne suis vraiment pas la seule. Tout le monde vient vers moi pour me dire qu’ils se sont vus sur le grand écran grâce à Julie.»

D’où vient cet écho que Julie nous renvoie si facilement?

«Je pense qu’elle est bien ancrée dans l’époque actuelle, et qu’elle met en évidence la confusion que notre génération peut ressentir face à au paradoxe des choix. C’est un concept économique, mais je trouve qu’il marche bien pour nos états d’âme. Nos ancêtres devaient choisir leurs carrières ou leurs familles très tôt, alors que nous pouvons changer de métier ou d’amant quand on veut. C’est très bien, mais ça implique un choc avec la culture qui nous précède. Et avec le capitalisme de nos sociétés, qui réduit nos échanges à de simples interactions de pouvoir. Il suffit de regarder Instagram, c’est un marché.»

Les Millenials ont-ils trop de liberté?

«Non, mais cette abondance de choix peut nous agiter, nous rendre un peu nerveux… Le film parle du besoin d’accepter les moments merdiques de nos vies pour ce qu’ils sont, sans trop les intellectualiser, et en essayant même de les célébrer.»

Review

Et si on prenait la comédie romantique au sérieux? Alors que le genre s’enfonce avec Netflix dans un sillon de plus en plus mielleux, le Norvégien Joachim Trier corrige le tir, et nous sert une ambitieuse fantaisie sur l’amour au temps des Millennials. Julie et ses douze chroniques se trouvent ainsi à (l’étonnante) croisée des chemins entre l’humour intello de Woody Allen et le montage pop de ‘How I Met Your Mother’. Sur papier, il s’agit d’un triangle amoureux, mais la formule est transcendée par la mise en scène ludique (bonne chance pour choisir votre scène préférée parmi les pépites), par un propos actuel osant titiller nos boomers, et une actrice crevant l’écran avec son humour et sa vulnérabilité. Choisir, c’est renoncer… mais ne passez pas à côté de Julie, vous le regretteriez!