«La Civil» raconte l’histoire d’une mère mexicaine qui s’engage dans une lutte contre les cartels

Rencontre avec la réalisatrice Teodora Ana Mihai à propos de ‘La Civil’ et du côté sombre du Mexique.

par
Ruben Nollet
Temps de lecture 3 min.

Être invité au Festival de Cannes pour y présenter son second long-métrage, ce n’est pas donné à tout le monde. Teodora Ana Mihai (40), née en Roumanie, mais en Belgique depuis ses 8 ans, a réussi cet exploit avec ‘La Civil’, l’histoire d’une mère mexicaine qui, suite à l’enlèvement de sa fille, s’engage dans une lutte contre les cartels. Mais en réalité, tout avait commencé par un documentaire sur des adolescents.

Teodora Ana Mihai: «L’adolescence est une période intense et magnifique, pleine de conflits. Je me demandais comment c’était pour les jeunes au Mexique, où sévit depuis plus de 15 ans une guerre avec les cartels de la drogue et où la violence fait partie de la vie quotidienne. Presque tous les adolescents que j’ai rencontrés, avaient une histoire de violence à raconter. Et ce qui est triste, c’est que ces jeunes veulent souvent d’eux-mêmes rejoindre les cartels, pour le bling-bling et l’argent facile. Et tant pis si on les utilise comme de la chair à canon.»

Comment en êtes-vous arrivée à raconter l’histoire d’une mère?

«Durant mes recherches, j’entendais souvent parler de Miriam Rodríguez. Sa fille avait été enlevée et elle ne l’avait jamais revue, même si elle avait payé plusieurs rançons. Lorsque je l’ai rencontrée en 2015, cela a été comme une claque: je devais utiliser son histoire et parler d’une mère qui cherche son enfant. Au départ, je pensais à un documentaire, mais comme il était trop dangereux de se déplacer en voiture avec elle, c’est finalement devenu une fiction. ‘La Civil’ n’est pas la vie de Miriam Rodríguez. Nous y avons intégré bien d’autres sources d’inspiration.»

‘La Civil’ a tout de même parfois des allures de documentaire. Où placez-vous la limite?

«En réalité, je ne crois pas aux étiquettes ‘documentaire’ ou ‘fiction’. J’utilise beaucoup de trucs de la fiction dans mes documentaires et inversement. Les deux sont du cinéma pour moi. Ici, je voulais créer l’impression qu’on suit le personnage principal en temps réel. De cette manière, nous voulons montrer aussi qu’on fait quasi inévitablement partie de la violence quand on est touché par celle-ci. Ce cycle de violence devient une partie de qui vous êtes.»

Notre critique de «La Civil» :

Entendre parler d’enlèvement est une chose, mais quand c’est votre propre fille qui est en danger, c’est tout à fait différent. C’est ce que découvre Cielo, une maman mexicaine, lorsque sa fille Laura se fait kidnapper. Et le plus terrifiant dans ‘La Civil’ c’est que tout semble si banal. Au commissariat de police, les murs sont couverts de photos de personnes disparues, dans la rue des militaires lourdement armés patrouillent, et les ravisseurs sont des gamins au sourire narquois. Mais Cielo (Arcelia Ramírez, très convaincante) refuse de se laisser faire, et cela a des conséquences pour tout son entourage. Finalement, ‘La Civil’ se mue en un polar bouleversant, très audacieux de la réalisatrice Teodora Ana Mihai, nouvelle voix du cinéma belge. 4/5