Franck Dubosc dévoile sa tendresse dans «Rumba la vie»: «Je n’ai jamais eu peur de ma part de féminité»

Dans ‘Rumba la vie’, son deuxième film en tant que réalisateur, l’acteur Franck Dubosc dévoile une tendresse qu’on ne lui soupçonnait pas. À travers l’histoire d’un homme suivant les cours de danse de la fille qu’il a abandonnée 20 ans plus tôt, Dubosc touche en plein cœur. Et semble ravi de nous étonner au passage!

par
Stanislas Ide
Temps de lecture 5 min.

Le film est-il né d’une envie de danser?

Franck Dubosc: «Non, non, surtout pas un film de danse! Justement, je voulais éviter l’écueil du genre. Après tout, il y a des gens que ça rebute. Même moi, quand on me parle d’un film de danse, franchement, il faut trouver la bonne accroche. Non, ce qui m’a donné envie d’écrire ‘Rumba la vie’, c’est le décor du studio de danse, qui n’a pas d’âge. C’est ça qui me plaisait, tant d’un point de vue sonore que visuel. J’aime ce qui est vintage, et mon personnage Tony l’est aussi avec son vieux blouson en cuir et sa moustache. Bon après, il a fallu mettre une histoire à l’intérieur de ce décor et cette musique.»

Les cours de danse permettent à Tony de détendre sa façade machiste aussi…

[S’emballe avant la fin de la question] «C’est pour ça qu’il est attachant, on a tous envie de voir le bougon sortir son côté féminin, et c’est pour ça que j’ai choisi la danse. Avec un gars comme Tony, la pudeur du départ est extrême, tout comme l’accomplissement final. Et c’est vrai que je n’ai jamais eu peur de ma part de féminité. Je ne me suis jamais dit que c’était quelque chose à cacher. Vous l’avez vu, il y a beaucoup de femmes dans le film. Travailler avec toutes ces actrices ravit cette part que j’ai en moi, et j’aime quand nous les hommes avons accès à cette ouverture-là. Tony ne l’a pas, mais il va la découvrir.»

En plus de réaliser, vous écrivez le scénario. Un processus proche de l’écriture de vos spectacles?

«Ce sont deux choses très différentes. Dans mes spectacles, j’écris beaucoup pour plaire au public. Et je ferai exactement pareil dès que je m’y remets. Alors qu’ici, j’ai d’abord écrit pour me plaire à moi. C’est une autre façon de bosser, même si j’espère bien entendu que ça plaira aux spectateurs. Je ne suis pas inconscient, et puis je ne fais pas ça pour me faire rire tout seul dans mon salon. Disons que je m’autorise à penser à mon plaisir. C’est une écriture plus délicieuse, que je savoure bien mieux que celle de mes one-man shows. Les spectacles, c’est plus laborieux. C’est un travail tellement technique, alors que pour un film je me contente de me raconter une histoire, et d’imaginer son univers.»

Tony marque un certain dédain pour la culture à plusieurs reprises. Comment votre famille a-t-elle réagi à votre choix de métier?

«Ah très bien, rien à voir! Mes parents ne pouvaient pas me payer d’études, donc c’était assez facile de leur dire que j’allais faire ce que je veux (rires). Ils ont eu un raisonnement assez logique. Ils se sont dit que quitte à être au chômage, mieux valait y être dans un métier qu’on aime. Bon, ils ont eu peur, comme tous les parents. Peut-être même qu’ils se sont dit que ça me passerait. Mais assez vite, ils se sont habitués à l’idée que j’allais en vivre.»

Vos fils ont-ils vu le film?

«Ils jouent même dedans! Ils sont dans les scènes d’autocar scolaire avec tous leurs copains, et ça les a beaucoup amusés. Pour le reste, ils se foutent un peu du milieu du cinéma. Ils ont vu le film et leurs copains ont adoré. Eux, quand ils voient mes films, ils me disent toujours qu’ils aiment bien, mais le cinéma reste ce qui leur enlève leur père. Donc je ne crois pas qu’ils puissent adorer ce que je fais sans réserve.»

Que nous réservez-vous au-delà de ‘Rumba la vie’?

«J’ai joué dans cinq films qui vont sortir dans l’année à venir. Le premier, ce sera ‘Plancha’ avec Lambert Wilson et Guillaume de Tonquédec, la suite de ‘Barbecue’. Et puis je vais me mettre à l’écriture du troisième hein!»

Pouvez-vous nous dire de quoi ça parle?

[Taquin] «Non, non, non… Je le garde encore un peu pour moi!»

Review:

Comment réagiriez-vous si votre médecin vous disait que la fin était proche? Tony (Franck Dubosc), le chauffeur de bus scolaire le plus taciturne de France, semble presque s’en foutre. Il n’a de comptes à rendre à personne, si ce n’est à la fille qu’il a abandonnée 25 ans plus tôt. Prenant son courage à deux mains, il lui rend visite au studio de danse où elle enseigne, mais sa timidité l’emporte. Reste une seule solution: s’inscrire à son cours de rumba! Dubosc, l’acteur, a beau être connu pour ses rôles un peu criards (‘Camping’), son alter ego réalisateur nous marque avant tout par la tendresse et la finesse de son écriture. Le récit évite habilement les écueils de la comédie française téléphonés par le pitch (le père ou l’amant, on imagine le désastre), sans tuer l’humour cash de Dubosc. Et la mayonnaise prend, portée par la photographie soignée et la douceur iconoclaste des personnages, rappelant les meilleures comédies sociales anglaises. La bonne surprise de l’été! 3/5