Il échange une mâchoire de requin de 360 millions d’années contre... quelques bières

Une mâchoire de requin découverte en province de Liège vient d’être datée à plus de 360 millions d’années par une équipe de chercheurs de l’Institut royal des sciences naturelles de Belgique, a indiqué celui-ci mercredi.

par
Belga
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Cette mâchoire a été ramenée par un groupe de paléontologues amateurs néerlandais après une chasse aux fossiles dans les Ardennes, comme ils avaient l’habitude d’en faire entre 1980 et 2001. Le maxillaire avait ensuite été offert à l’Institut en 2016. L’os avait lui-même été cédé aux Néerlandais par un ouvrier des Carrières Thomas à Comblain-au-Pont, en province de Liège, contre quelques bières.

Bien que l’on sache déjà que des requins ont nagé autrefois dans nos contrées, il s’agit d’une découverte exceptionnelle en raison de sa rareté. En effet, ce cartilage provenant d’une espèce de requins préhistoriques, appelés Ctenacanthidae et dont la longueur pouvait atteindre 2,5 mètres, est particulièrement bien conservé au sein d’une roche. Pourtant, les sédiments bruts dans lesquels le fossile a été retrouvé, principalement de l’arkose (un type de grès), sont généralement peu propices à la fossilisation des cartilages. L’analyse de ces sédiments, qui remontent à une période où le massif des Ardennes était encore une mer profonde, a permis à l’équipe de recherche de dater le fossile.

Un environnement hostique pour les requins

Cette mâchoire est ainsi le fossile de cartilage de requin le plus vieux d’Europe. Des découvertes similaires n’avaient été réalisées qu’aux États-Unis et en Australie. Dents et épines dorsales sont les éléments de requins les plus souvent retrouvés.

Autre phénomène qui explique la rareté d’une telle découverte: l’organisation de la chaîne alimentaire à l’époque où vivaient ces spécimens. Selon les scientifiques, il semblerait que les requins évoluaient dans un environnement hostile et étaient des proies appréciées de poissons prédateurs et placodermes (munis d’une sorte de carapace) qui, eux, pouvaient atteindre huit mètres de long. «C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles on retrouve si peu de fossiles de requins en bon état. Beaucoup de corps de requins n’ont pas pu se fossiliser car leur population était faible et nombre d’entre eux finissaient par être mangés par des prédateurs. La population de requins était constamment sous pression», explique Sébastien Olive, paléontologue à l’Institut royal des sciences naturelles. «Leur véritable évolution et diversification n’a eu lieu qu’après la disparition de leurs prédateurs à l’ère Carbonifère, il y a 300 à 360 millions d’années.»

Grâce à une analyse 3D de la roche dans laquelle se trouve la mâchoire, les scientifiques ont pu déterminer la taille du spécimen auquel elle appartenait. «L’exemplaire en question devait mesurer environ 1,80 mètre. Nous pouvons le déterminer sur la base de la taille de la mâchoire inférieure, qui mesure 22 centimètres de long et 8,5 centimètres de haut.»

Ces travaux ont été publiés dans la revue scientifique américaine Journal of Vertebrate Paleontology.