Au Cimetière d’Ixelles, une fêtarde sur deux a déjà été victime de violences dans les bars

Plus de la moitié des clientes de bars ou de discothèques du Cimetière d’Ixelles et de la place Flagey affirment avoir été victimes de harcèlement ou d’agression sexuelle. C’est ce qui ressort d’une enquête réalisée par le cabinet de conseil Egerie Research pour le compte de la commune d’Ixelles, et relayée vendredi par Le Soir.

par
Belga
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Ce rapport «Diagnostic intersectionnel du vécu des femmes, des personnes sexisées, racisées et faisant partie de la communauté LGBTQIA+ du monde de la nuit» avait été commandé dans la foulée des révélations d’agressions dans le monde de la nuit sous la bannière #balancetonbar en 2021.

Il ressort que la majorité des sondées se sent en sécurité dans les cafés (71%), mais beaucoup moins dans les discothèques (26%), et encore moins sur la voie publique (21%).

Une large majorité de 96% affirment avoir déjà dû faire face, de manière directe ou indirecte, à au moins une situation de violence sexiste ou sexuelle, détaille la commune d’Ixelles dans un communiqué. «76% ont reçu des commentaires sur leur apparence, anatomie, vêtements, 15%, ont été droguées à leur insu (GHB…), 11,9%, ont subi une agression d’ordre sexuel; dans près d’un cas sur deux, les agressions et/ou violences subies avaient également un caractère discriminant visant l’apparence physique, la couleur de peau, l’orientation sexuelle, le handicap ou l’identité de genre.»

Une violence intégrée comme une norme

Le rapport souligne aussi que la violence subie dans le contexte festif est intégrée comme une norme par les femmes et personnes sexisées, et qu’elles mettent en place des stratégies énergivores pour se protéger (organiser le retour, faire attention à sa tenue, prévoir qui contacter en cas de problème, vérifier que son GSM est bien chargé, etc.).

Par ailleurs, 50% des sondées disent, face à une agression, vouloir faire appel à la police, mais seulement 36% disent avoir confiance en elle.

«On connaissait cette réalité du terrain. Avec ce diagnostic et ces données chiffrées, les pouvoirs publics ne pourront plus nier les faits», a réagi auprès de Belga Laura Baiwir, porte-parole de l’Union Féministe Inclusive et Autogérée (Ufia), qui note avoir été associée aux démarches de la commune d’Ixelles.

La députée bruxelloise Margaux De Ré (Ecolo), très active sur le sujet des violences de genre, approuve la démarche de la commune. «Au lieu de se ruer sur des mesures, on a plutôt décidé d’écouter les personnes concernées pour apporter des solutions adaptées. Un diagnostic ne résout pas le problème, mais les chiffres permettent de passer à l’action et d’évaluer l’évolution de la situation dans le futur.»

Boîte à outils

L’enquête d’Egerie Research comportait aussi une phase d’élaboration d’un catalogue de mesures pour contrecarrer le phénomène des violences, en concertation avec les acteurs et actrices concernées. Ce catalogue comprend des formations obligatoires, la sensibilisation du grand public et des mesures spécifiques dans les bars, notamment.

Pour mettre en œuvre ces mesures, la commune d’Ixelles indique avoir activé son «Conseil de la nuit», une instance qui rassemble la commune, la zone de police, le secteur horeca ainsi que les universités.

«Nous serons évidemment très vigilantes à ce qui va être mis en place», signale Laura Baiwir. Pour elle, il est primordial que certaines mesures deviennent contraignantes afin que le secteur les implémente réellement.

«Sans sanctions, il n’y aura pas de garantie que des mesures seront appliquées. On réfléchit par exemple à ce que le ou la bourgmestre puisse imposer la fermeture temporaire d’un établissement lorsqu’il est visé par un certain nombre de plaintes.»

L’idée est aussi que d’autres communes ou instances puissent puiser dans la boîte à outils de mesures. Le bourgmestre d’Ixelles Christos Doulkeridis (Ecolo) s’est engagé à partager les résultats de l’enquête aux instances fédérales, régionales et locales du pays.