Un Bruxellois emprisonné pendant huit jours par erreur à cause de sa couleur de peau

Un jeune Bruxellois de 26 ans a été enfermé durant huit jours parce qu'il ressemblait à un individu dont l'avis de recherche a été diffusé par l'émission "Faroek" sur VTM. N'ayant rien à voir avec les faits dont il était soupçonné c'est, semble-t-il, sa couleur qui est à l'origine de cette incroyable méprise...
par
sebastien.paulus
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En juin 2020, l'émission "Faroek" diffusait un avis de recherche pour retrouver un individu auteur de phising ayprès d'une septuagénaire dilbeekoise en février. Il avait dérobé à sa victime 20.000 €, qu'il avait ensuite joué dans un casino aux Pays-Bas.

Il y a quelques jours, Shengetai "Tai" Sithole, un Bruxellois de 26 ans, a été arrêté pour les faits décrits ci-dessus. Un témoin l'a reconnu comme étant le suspect de l'avis de recherche, et il a donc été écroué par la police. Pourtant, le jeune homme ne ressemble en rien à la description diffusée par VTM, comme le déplore son avocate Selma Benkhelifa auprès de "Het Laatste Nieuws": "En réalité, aucun élément ne le désigne comme étant l'auteur des faits."

Un emprisonnement qui pose question

Tai a été interpellé à son travail le 10 mars dernier. Il a comparu le lendemain devant le juge d'instruction, qui a décidé de le garder en détention préventive. Après cinq jours, la chambre du conseil a décidé de le libérer, mais il a dû rester en prison parce que le parquet a fait appel.

"Même s'ils voulaient vérifier des éléments, la privation de liberté n'était pas nécessaire. Il ne s'agit pas d'actes de violence graves, et Tai n'a pas de casier judiciaire. Le seul élément du dossier contre lui est ce témoin. Tous les autres éléments parlent en sa faveur. Le témoin décrit l'auteur comme un homme ayant un accent hollandais. Mais Tai n'est pas Néerlandais et il n'a pas du tout l'accent hollandais. De plus, l'enquête montre que son téléphone ne s'est jamais trouvé à proximité des lieux où s'est rendu l'auteur du crime. Ce témoin s'est trompé”, a détaillé l'avocate.

Un séjour "horrible"

C'est finalement jeudi dernier, après huit jours, que le cauchemar de Tai a pris fin et qu'il a pu quitter la prison de Saint-Gilles en fin d'après-midi. Son père, Paul Lhoir, est dans l'incompréhension: "Nous ne comprenons pas pourquoi cela a pris autant de temps. S'il avait été blanc, je pense que cela ne serait jamais arrivé."

L'émotion était grande au moment où Tai a retrouvé ses proches à la sortie de la prison, sous les applaudissements de quelques proches venus le soutenir. "Merci à tous ceux qui m'ont soutenu. J'espère que tout ira bien maintenant. C'était horrible, comme dans les films mais en bien pire", explique-t-il.

Une compensation demandée

Son avocate, qui déplore une forme de racisme, demande une compensation: "C'est une somme forfaitaire: 80 euros par jour. Ce n'est pas grand-chose, mais nous devons l'exiger, par principe. Ce genre d'erreur de la part du tribunal peut avoir de graves conséquences. Heureusement, Tai a un patron sympa, qui croit fermement en son innocence. Mais la plupart des gens ne sont pas comme ça. ‘Il n'y a pas de fumée sans feu”, dit-on. Il aurait pu perdre son emploi, et bien plus encore."

"Tout d'abord, on constate ce préjugé selon lequel ‘toutes les personnes de couleur se ressemblent. Et en plus de cela, je ne pense pas qu'ils auraient détenu quelqu'un ayant la peau blanche aussi longtemps pour de tels faits. Heureusement que Tai est bien entouré. Sa famille et ses amis sont derrière lui, il connaît des journalistes à Bruzz,... Cela a aidé son cas. Sinon, il aurait pu passer inaperçu.", conclut-elle.