Sur les planches cette semaine - 26 mars 2015

par
Nicolas
Temps de lecture 2 min.

Envie de théâtre ce week-end? Metro vous en dit plus sur les spectacles à voir en Belgique francophone.

Platonov

"Laisse tomber les filles, un jour c'est toi qu'on laissera!" Ce refrain bien connu s'annonce comme une triste prédiction pour Platonov, bel esprit russe, fougueux et séducteur, qui aime côtoyer la vieille aristocratie autant que les jeunes filles. Quand ce dernier retrouve lors d'une fête entre amis son ancien amour marié à son meilleur ami, le doute s'empare de lui, aujourd'hui maqué avec une innocente de bonne famille. Et encore s'il n'y avait que celle-là, la générale semble aussi très sensible au charme du poète charmeur.

De cette œuvre de jeunesse de Tchékhov -dans laquelle on retrouve déjà les forces qui feront de l'auteur un monstre du théâtre-, Thibaut Wenger en a tiré une bien jolie version. La mise en scène en clair obscur et privilégiant les face à face en avant-plan, la fête étant laissée à l'arrière d'un rideau de plastique, nous invite directement au manège amoureux qui va se jouer devant nous. Et ce qui aurait pu paraître comme du simple marivaudage dans ses premiers instants se transforme vite en une comédie douce-amère. Ah jeunesse! Gourmande et indécise à la fois. Les hésitations du Platonov (magistral Fabien Magry) font des dégâts, déstabilisant la gent féminine, l'horripilant et la poussant presque à la neurasthénie. Wenger voit et révèle dans ce personnage l'image de l'époque: celle de l'incertitude.

Énergique, naturel et fluide, le jeu des comédiens nous fait vibrer. On en vient presque à oublier la longueur du spectacle (près de 4h entracte compris), tant à la sortie on a pris plaisir à cette aventure théâtrale, où l'on a pu retrouver un esprit de troupe quelque peu oublié.

Orphelins

Dans un appartement cosy, un couple s'apprête à passer une soirée tranquille. Mais lorsqu'on sonne à la porte, Helen et Danny ne s'imaginent pas que leur tendre moment va se transformer en cauchemar. Sur le pas de la porte apparaît alors le jeune frère d'Helen, Liam, le T-shirt ensanglanté. Effarement et inquiétude l'emportent, d'autant que les explications du jeune homme sont particulièrement étranges. Au fil de son récit, il avoue tout de go avoir tué, là au coin de la rue, sous les fenêtres de sa sœur et de son beau-frère. Que faire quand l'on apprend qu'un proche a commis l'irréparable ? Cette douloureuse question, l'auteur britannique Dennis Kelly nous la pose en n'hésitant pas de confronter ses personnages à la peur, décortiquant en arrière-plan la jeunesse mouvementée d'Helen et Liam -orphelins, nous dit le titre de cette pièce. Patrice Mincke fait de cette pièce sobre et concrète, où la violence s'infiltre par effraction, un excellent thriller psychologique en tirant le jeu de son trio d'acteurs au cordeau. Anne-Pascale Clairembourg, primée " meilleure comédienne" aux derniers Prix de la critique, incarne avec justesse une femme partagée entre l'amour inconditionnel pour son cadet, la révélation Pierre Lognay (nominé comme "espoir masculin" lors de la même cérémonie), personnage étonnamment insensible à ce qu'il vient de faire, et la douceur paisible de son quotidien partagé avec Danny, joué par Itsik Elbaz encore une fois excellent. Une reprise de choix!

Maintenant ou jamais

Voici le genre de spectacle où d'entrée de jeu le public est invité à la fête, apéro compris. La compagnie Circa Tsuica a l'art de mettre ses spectateurs à l'aise au son d'une fanfare joyeuse. Et une fois assis, ceux-ci en prennent plein les yeux. "Cycles et musique" aurait pu être le titre de ce spectacle de cirque où la convivialité rime avec la solidarité (tiens, en effet ça rime). Vous pensiez qu'on ne pouvait mettre qu'une seule personne, voire deux, sur un vélo ? Détrompez-vous, on peut y monter à 3, 4, 5, 6,... à condition d'avoir un sacré sens de l'équilibre et de bons copains pour vous tendre la main. Comme la fanfare trouve son harmonie une fois toute les partitions synchronisées, les numéros des Circa Tsuica réussissent lorsque toutes et tous accomplissent leur gamme acrobatique. Le titre "Maintenant ou jamais" renvoie à ces secondes où l'artiste s'apprête à s'élancer dans sa roue Cyr, sur son trapèze ou bien encore sur sa bascule, autres agrès utilisés pendant cette heure et demie faite d'humour et de bonne humeur. Avec l'envie de partager encore et encore, puisque sous le chapiteau, on se plaît à prolonger le plaisir d'être avec des amis pendant une after-party, fanfare comprise, bien évidemment.

Nicolas Naizy

Crédits: Michel Boermans / Yves Kerstius / Nicolas Joubard