Quel cadre légal pour l'accouchement dans la discrétion ?

par
Nicolas
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Un nouveau bébé a été recueilli par l'ASBL anversoise Moeders voor Moeders, le neuvième depuis 2000. L'enfant a été abandonné à l'automne dernier, mais l'ASBL ne dévoile cette information que maintenant car une période est toujours prévue au cas où la mère se signalerait pour récupérer son enfant. Le bébé, en bonne santé, a reçu le prénom de Maarten. Dans ce cas-ci, la personne qui a déposé l'enfant n'a pas emporté l'enveloppe dans laquelle se trouvent des informations permettant de récupérer le bébé. Après plusieurs semaines, Maarten, âgé de de moins de 24 heures au moment de sa découverte et pesant 2,9 kilos, a été placé dans une famille d'accueil. Celle-ci peut l'adopter après six mois.

Le président du CPAS d'Anvers Fons Duchateau (N-VA) espère qu'à "relativement court terme" une solution législative puisse être trouvée afin qu'il soit possible d'accoucher dans la discrétion à l'hôpital. Cette disposition devrait aussi proposer le suivi psycho-social adéquat à la mère, a-t-il réagi.

Belga / J. Roosens

L'asbl Moeders voor Moeders a, immédiatement après la découverte du bébé fin de l'année dernière, et comme l'exige la procédure, avisé le président du CPAS et le parquet. "Je suis satisfait qu'il ait été possible de garder l'information secrète pendant quelques mois afin de donner suffisamment de temps à la mère pour éventuellement revenir sur sa décision", a ajouté M. Duchateau. "L'enfant a entre-temps passé quelque temps déjà dans une famille d'accueil. La procédure d'adoption pourrait commencer avant l'été si la mère ne donne plus signe de vie d'ici là."

Droit de l'enfant vs. vie privée de la mère

"Accoucher sous X est possible en France mais ne constitue pas non plus une solution miracle", selon Fons Duchateau. "Je suis résolument pour une législation en matière d'accouchement dans la discrétion. Actuellement, une mère aux abois qui ne veut pas que quiconque soit au courant et qui ne souhaite pas voir son nom sur un acte de naissance, choisit forcément d'accoucher chez elle. Permettre d'accoucher dans la discrétion lui assurerait les soins et le suivi nécessaire. On pourrait aussi créer un organe de médiation qui interviendrait plus tard si l'enfant souhaite chercher à établir un contact, afin que les données d'identité de la mère ne soient pas lâchées d'un coup. Je me suis laissé dire qu'une telle réglementation serait constitutionnellement possible."

En Belgique, le cadre légal pour l'accouchement dans la discrétion est en débat. Des avancées avaient été réalisées lors de la dernière législature. Un texte avait semblé faire consensus, mais celui-ci avait buté sur l'opposition entre le droit de l'enfant à connaître ses origines et le respect de la vie privée de la mère.

Belga / N. Lambert

Depuis 2007, les socialistes flamands ont déposé à chaque législature une proposition sur l'accouchement dans la discrétion. Leur texte prévoit la possibilité pour l'enfant de tracer sa mère après un certain temps, mais uniquement avec l'accord de cette dernière. Le sp.a reconnaît que la "boîte à bébés" a permis de sauver des vies, mais le parti estime que cette solution n'est plus adaptée à l'époque actuelle.

La proposition peut immédiatement être inscrite à l'agenda de la commission compétente, souligne la députée sp.a Karin Jiroflée. "Les auditions ont eu lieu au Sénat depuis un certain temps, les rapports sont disponibles", précise l'élue. Elle ajoute attendre avec impatience les amendements constructifs des partis de la majorité, qui appellent aujourd'hui à une solution mais s'étaient opposés à un accord lors de la précédente législature.

Laisser le juge décider ?

Le cdH, par la voix de sa députée Vanessa Matz, a rappelé aussi avoir déposé une proposition de loi sur l'accouchement dans la discrétion. "Cette proposition équilibrée, sur la table depuis quatre à cinq ans, permettrait d'éviter le recours à ce type de boîte à bébés comme celle d'Anvers, ou pour certaines femmes de devoir aller accoucher en France", a-t-elle réagi.

Pour les humanistes, il est temps que la Belgique légifère sur l'accouchement dans la discrétion, le pays étant l'un des derniers États européens à ne pas disposer d'un cadre légal à ce sujet, a-t-elle fait valoir.

L'opportunité d'une telle loi fait l'objet depuis plusieurs années d'un débat en Belgique, chaque parti ayant formulé ses propres propositions sur ce sujet éthique délicat. L'une des difficultés porte sur le droit pour les enfants à connaître leur origine une fois plus grands, et comment concilier cela avec la volonté de discrétion de la mère. Le cdH propose à cet effet de laisser au juge de la famille, et non à la mère comme le propose le sp.a, le dernier mot pour trancher ces volontés contradictoires en la matière.