«Oublier tout ce que je sais sur le jazz pour chanter avec une voix rude et âpre»

par
Kevin
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La quatrième saison de Boardwalk Empire met en scène toute une série de nouveaux personnages. Le plus intéressant est sans conteste la chanteuse de jazz Daughter Maitland. À l'occasion de la sortie de la saison quatre de Boardwalk Empire en DVD et en Blu-Ray, nous vous proposons une interview de Margot Bingham, l'actrice qui interprète Daughter Maitland.

Vous attendiez-vous à ce que le rôle de Daughter Maitland soit autant salué? (Le magazine américain Rolling Stone a qualifié le rôle de révélation de l'année.)

Je ne m'y attendais pas du tout! Lorsque le studio m'a appelée, je savais seulement qu'ils avaient besoin d'une chanteuse de jazz. On m'a dit que je participerais à un ou deux épisodes. Après coup, je suis contente de ne pas avoir su dès le départ que j'avais un rôle important. J'aurais eu peur et je l'aurais probablement massacré!

Était-ce un rôle difficile? Vous deviez souvent chanter et danser pendant vos scènes.

C'était comme si on m'imposait un nouveau défi à chaque épisode. Je devais chanter dans le premier, je devais danser devant tout un tas de gens dans le deuxième, puis j'ai dû faire des cascades... cela n'a pas arrêté! Si le but des metteurs en scène était que je travaille dur et que j'apprenne à connaître mes limites, ils y sont certainement parvenus. Cela a été une expérience particulièrement passionnante.

Comment décririez-vous Daughter?

C'est une battante. Elle a déjà pas mal vécu malgré son jeune âge. Elle est mûre pour son âge mais elle n'hésite pas non plus à se montrer rebelle. Quand le propriétaire du club lui dit ce qu'elle doit chanter, elle refuse et choisit sa propre chanson. C'est une femme qui en a!

Cette saison de Boardwalk Empire s'intéresse-t-elle davantage aux Noirs?

Oui et c'est bien de voir que les auteurs de la série veulent donner une image correcte de l'époque et qu'on s'y intéresse au jazz, à la Renaissance de Harlem (un courant littéraire regroupant des auteurs noirs américains), à Marcus Garvey (un pionnier dans la lutte pour les droits civils des Noirs américains) et au mouvement en faveur de l'émancipation des Noirs.

Vous avez joué la plupart de vos scènes avec Michael K. Williams et Jeffrey Wright, des acteurs chevronnés. Comment s'est passée cette collaboration?

Comme je suis une grande fan de Michael, j'étais vraiment impatiente de travailler avec lui. Je pense que personne ne pouvait prédire que nous formerions un aussi bon duo! Nous sommes devenus de bons amis et cela transparaît aussi à l'écran. Jeffrey est incroyable, très gentil et particulièrement intelligent. J'ai énormément appris en travaillant avec lui. Il a un grand sens de l'humour pince-sans-rire. Il me racontait les trucs les plus dingues en gardant un visage imperturbable. Et au moment où je le croyais, il criait «je t'ai eu!».

De quelles chanteuses vous êtes-vous inspirée?

Bessie Smith, Ethel Waters et Joséphine Baker ont été mes trois sources d'inspiration principales. J'ai eu la chance de ne pas devoir incarner un personnage historique car cela aurait été un grand frein dans l'interprétation du rôle. Les auteurs m'ont laissé pas mal de liberté de création pour Daughter. J'en ignore la raison mais ils me faisaient confiance.

Était-ce difficile d'adapter votre style de chant pour la série, vu que vous êtes vous-même chanteuse?

Beaucoup d'artistes des années 20 ne devaient leur succès qu'à leur timbre de voix ou à leur lien personnel avec les textes et la musique. Leur style était beaucoup plus brut. Cela a été pour moi un challenge d'oublier tout ce que je sais sur le jazz et de chanter avec une voix aussi rude et âpre. Comme chanteuse vous voulez toujours faire plus, mais la musique est parfois tellement plus belle quand vous restez simple.

Qu'avez-vous pensé de votre style de coiffure sur le plateau?

Mes coiffures ont été une expérience amusante. J'ai normalement une énorme afro, que les stylistes devaient mouiller tous les jours. Je me promenais avec une tête de chien trempé tous les jours! Ensuite, ils me lissaient les cheveux et plaçaient un postiche avec les boucles en accroche-cœur typiques. Je pensais souvent aux femmes qui à l'époque réalisaient elles-mêmes ce genre de coiffure, c'est une prestation terrible!

Et de vos tenues?

J'ai eu énormément de chance avec les costumes et le maquillage. J'étais toujours parfaitement habillée et particulièrement enthousiaste quand je devais enfiler de nouvelles tenues. Je me demandais toujours à quoi elles allaient ressembler.

Votre carrière musicale en tant que Margot B marche aussi bien. Avez-vous l'intention de vous investir à la fois dans la musique et dans le cinéma?

Je vais essayer de m'investir le plus possible dans ces deux carrières, jusqu'à en faire tourner la tête des gens (rire)! Pour l'instant, j'arrive encore à me partager entre Margot Bingham et Margot B. Beaucoup de gens me disent que c'est une grossière erreur d'avoir deux noms différents, mais je ne suis pas de cet avis. Quand je chante toute seule, je suis Margot B. Si je dois jouer et chanter, je suis Margot Bingham. Je veux qu'il y ait une distinction entre les deux.

Votre père, Craig Bingham, était un sportif célèbre. Vous a-t-il conseillée pour affronter la célébrité?

J'ai un lien fort avec ma famille et ils me soutiennent toujours. Je suis bien consciente que je proviens d'une famille connue. C'est la raison pour laquelle je me suis mise à chanter sous le nom de Margot B au lieu de Margot Bingham. Je suis fière de ce qu'a fait mon père mais je voulais déterminer moi-même mon avenir. Ceci dit, mon père est un vrai pro et j'ai beaucoup appris de lui.

Le rôle de Daughter Maitland est-il votre grande révélation?

Absolument, surtout parce que j'ai eu la chance de chanter et de jouer et d'être appréciée pour ces deux facettes. J'ai même eu quelques épisodes sans musique. C'est vraiment le rôle de ma vie!