Les Suisses votent pour l'interdiction du voile intégral

Le voile intégral est désormais interdit en Suisse. Une majorité de Suisses a accepté dimanche, par 52%, l'initiative populaire souhaitant interdire toute forme de dissimulation du visage dans l'espace public, selon les projections de l'institut gfs.bern. La marge d'erreur est de plus ou moins deux points.
par
oriane.renette
Temps de lecture 3 min.

L'acceptation de l'initiative n'est pas une véritable surprise. Dès le début de la campagne, le texte a cartonné dans les sondages, avant de reculer tout en restant en tête.

Le texte interdit toute forme de dissimulation du visage dans l'espace public. Il concerne autant la burqa ou le niqab que les cagoules de casseurs ou de hooligans.

Un texte "contraire au principe de liberté"

Mais le comité d'Egerkingen, qui a proposé l'initiative populaire, a surtout dans son viseur le voile intégral, symbole à ses yeux d'un islam fondamentaliste qui ne correspond pas, selon lui, aux valeurs de la démocratie.

Les opposants, à savoir le Conseil fédéral, le Parlement et les principales organisations religieuses, n'ont cessé de rappeler que ce texte était contraire au principe de liberté et qu'il stigmatisait la minorité musulmane.

Amnesty dénonce une discrimination

Avec l'acceptation de l'initiative anti-burqa, la section suisse d'Amnesty International (AI) dénonce une nouvelle initiative «qui discrimine une communauté religieuse en particulier». A ses yeux, ce texte alimente inutilement la division et les craintes.

L'interdiction du voile intégral n'est pas une mesure visant la libération des femmes, estime l'ONG de défense des droits humains. Il s'agit au contraire d'une dangereuse politique symbolique qui viole la liberté d'expression et de religion, critique Cyrielle Huguenot, responsable des droits des femmes à AI Suisse, citée dans un communiqué.

L'ONG demande aux élus politiques et au gouvernement de «soutenir sans équivoque les droits fondamentaux des minorités religieuses du pays et de s'engager pour une cohabitation pacifique». Elle exige notamment des mesures pour garantir que l'interdiction du voile intégral ne marginalise pas les femmes concernées et ne les exclue pas de l'espace public.

Amnesty appelle également les autorités à renforcer les mesures visant à protéger les femmes qui subissent réellement des violences et des discriminations en Suisse, quelles que soient leur religion et leur origine.

Une décision potentiellement nuisible pour le tourisme

La Fédération suisse du tourisme (FST) regrette aussi cette interdiction du voile intégral. Le secteur, qui souffre déjà beaucoup de la pandémie de coronavirus, ne peut pas se permettre de complications supplémentaires, a déclaré la directrice de la FST, Barbara Gisi.

La Suisse, pays ouvert, a accueilli avec plaisir des touristes entièrement voilées. Ces hôtes aisées venant des pays du Golfe sont désormais perdues, a déploré Mme Gisi, interrogée par Keystone-ATS.

Selon Barbara Gisi, l'exemple du Tessin montre que l'interdiction de la burqa a un impact sur le tourisme. Depuis le vote de 2016, le canton a perdu 30% de visiteurs des pays du Golfe. La directrice de la FST estime que l'interdiction a été le facteur décisif.

Lire aussi : Une ASBL belge condamnée pour discrimination envers les mères voilées