Les bouteilles en verre font leur retour en grâce

C'est une tendance qui n'est pas prête de s'arrêter. De plus en plus de Belges délaissent les bouteilles en plastique pour se tourner vers les bouteilles en verre.
par
ThomasW
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Plusieurs dizaines d'années après sa disparition, verra-t-on bientôt des laitiers à nouveau venir déposer des bouteilles de lait en verre directement chez les habitants? Ce retour est en bonne voie! Dans un contexte de prise de conscience environnementale et de tendance du zéro déchet, les bonnes vieilles bouteilles en verre font un retour tonitruant.

Un phénomène en plein essor

Le retour en grâce des bouteilles en verre en Belgique est constaté aussi bien dans les supermarchés que chez les distributeurs indépendants. Les bouteilles d'eau plate et pétillante sont les principales concernées par ce changement d'habitude. Faute d'alternatives, en tout cas dans les supermarchés, les bouteilles en verre de sodas, de jus de fruits et de lait connaissent une progression moins forte, mais elles sont tout de même de plus en plus plébiscitées. «Nous avons constaté une augmentation de 20% des volumes des bouteilles en verre en 2019 et cette augmentation se confirme en 2020», nous indique Karima Ghozzi, porte-parole de Delhaize. La chaîne belge de supermarchés s'adapte à cette demande croissante en introduisant de nouvelles références dans les rayons. «En avril, nous allons introduire une eau belge en bouteille en verre d'un litre. Nous privilégions les eaux belges dans les contenants en verre, car elles sont plus lourdes que des bouteilles en plastique et ce serait un non-sens d'émettre plus de CO2 pour les faire venir de plus loin», précise Karima Ghozzi.

BELGA PHOTO NICOLAS LAMBERT

Optez pour les bouteilles consignées

Si les bouteilles en verre font un retour tonitruant dans les rayons des supermarchés, elles ne sont pas toutes aussi intéressantes d'un point de vue écologique. En effet, une bouteille consignée va produire 79% de gaz à effet de serre de moins qu'une bouteille dite de verre perdu. Une bouteille consignée devra être lavée mais elle va être réutilisée en moyenne plus de 19 fois, tandis que la bouteille non consignée et jetée dans une bulle à verre va devoir être fondue dans un four à 1.500ºC pour ensuite servir à fabriquer une autre bouteille. En Belgique, la consigne sur les bouteilles en verre n'a jamais vraiment disparu. Mais ce n'est pas le cas en France où depuis les années 1960, elle n'existe quasiment plus. Pourtant, une étude reprise par la fondation Nicolas Hulot montre que la consigne limite l'usage des ressources naturelles utilisées et permet d'économiser jusqu'à 75% d'énergie et 33% d'eau par rapport au recyclage.

Malgré le retour en force des bouteilles en verre, elles sont encore loin de faire de l'ombre aux bouteilles en plastique qui représentent encore 95% des bouteilles vendues en Belgique.

Thomas Wallemacq

Ph. Green Peas

Interview : «La consigne reste encore quelque chose de marginal»

Ph. Green Peas

Chantal Suarez (en bas à droite) a installé son épicerie durable Green Peas fin 2016 à Court-Saint-Etienne, dans le Brabant wallon. Agronome de formation, elle a travaillé pendant longtemps dans l'agro-industrie avant de se «recycler» et de lancer son propre magasin autour de la réduction des déchets et du fait de privilégier un circuit local et le plus court possible. Les bouteilles et les contenants en verre y occupent donc une place primordiale.

Trouve-t-on encore des bouteilles en plastique dans votre épicerie?

«Ah non, absolument pas. Ce n'est pas possible. Vade retro satana (rires). Même pour les cosmétiques, je propose des flacons en aluminium ou des petits tubes et bocaux.»

Les bouteilles en verre que vous proposez sont-elles toutes consignées?

«Malheureusement, non. La consigne reste encore quelque chose de marginal. Mais malgré tout, en trois ans d'existence, nous avons géré 32.000 consignes dans l'épicerie. Le problème est qu'il y a toute une gestion du lavage qui demande des investissements et qui est très compliquée pour les petits producteurs et les petites structures. Nous proposons, par exemple, des supers produits venant de micro-brasseries mais qui ne peuvent pas gérer le nettoyage de leurs bouteilles. Les consignes sont réservées aux toutes petites structures qui peuvent se permettre de laver les contenants au lave-vaisselle ou alors aux gros producteurs qui ont cette volonté derrière de proposer un tel système. Quand j'ai le choix, je privilégie toujours les producteurs qui proposent des contenants consignés.»

D'un point de vue écologique, privilégiez-vous la bouteille en verre non consignée ou le Tetra Pak qui sera recyclé?

«Le verre, même non-consigné. Des études ont montré qu'au niveau de l'emprunte carbone, le fait de fondre et de recycler le verre reste plus intéressant d'un point de vue environnemental que de recycler du Tetra Pak ou une bouteille en plastique PET.»

Depuis janvier, vous proposez des bouteilles en verre, consignées, de lait pasteurisé. Malgré l'absence de certification bio, vous avez opté pour la marque belge Inex. Pourquoi ce choix?

«Deux possibilités s'offraient à nous: soit du lait bio en Tetra Pak, soit du lait non bio en bouteille en verre non consignée mais qui est du lait 100% belge et de pâturage. Pour l'instant, je continue de proposer les deux mais les bouteilles en verre rencontrent un grand succès.»

Ph. Green Peas

Actuellement, il n'existe pas de producteurs de lait qui proposent leurs produits dans des bouteilles en verre dans le Brabant wallon?

«En petit producteur directement à la ferme, nous n'avons trouvé personne. Il faut dire qu'il y a des contraintes. C'est notamment lourd à porter et il faut laver les bouteilles. Si vous n'avez ni l'envie ni la vraie motivation de faire un geste pour la planète à ce niveau-là, le verre n'est que contrainte. Mais ça va bouger»

Comment voyez-vous les choses évoluer dans le futur?

«Sur les trois ans de l'existence de l'épicerie, je vois déjà la différence au niveau des producteurs, des distributeurs et des clients. On a fait un bond de géant. Quand on voit le nombre d'épiceries qui ouvrent en adoptant ce système, on voit que les gens ont envie de revenir à ces petites structures. Ceux qui ne regardent pas que le prix ont perdu confiance dans la grande distribution. On ne sait pas d'où viennent les produits, comment ont été traités les animaux, les humains, la liste des ingrédients sur les étiquettes font peur. Les gens qui viennent acheter du lait ici savent que c'est du lait local, belge et que le producteur a été correctement rémunéré. Pour le peu de maîtrise que je peux avoir là-dessus, j'aime bien savoir où va mon argent. À un moment donné, il y a forcément quelqu'un qui est lésé. On ne peut pas faire de la qualité, rémunérer correctement, ne pas exploiter de la main-d'œuvre et des animaux, à des prix cassés.» (tw)