Le Kanal ouvre ses portes

Ce mois de mai 2018 sera à marquer d'une pierre blanche dans l'histoire culturelle de Bruxelles. C'est en effet ce week-end que le Kanal – Centre Pompidou va pousser ses premiers cris dans l'ancien complexe Citroën situé en bord de canal.
par
Pierre
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Avant que ne commencent en 2019 les grands travaux destinés à remodeler radicalement les lieux, il a en effet été décidé de profiter de ces espaces bruts pour y proposer des expositions temporaires -et bien d'autres choses encore- à découvrir en avant-première durant ce grand week-end d'ouverture.

"J'ai construit le timing de cette année de préfiguration en fonction d'une ligne du temps par rapport aux débuts des travaux", explique Yves Goldstein, chargé de ce projet d'envergure par le gouvernement bruxellois.

"Depuis le choix du projet architectural jusqu'aux débuts des travaux, il y avait un vide de 14-15 mois. J'ai donc proposé d'ouvrir ce bâtiment pour montrer tout son potentiel, d'autant qu'il va être radicalement transformé. Et c'est l'occasion également pour les Bruxellois de découvrir un bâtiment emblématique qui date de 1935 et qu'ils n'ont finalement jamais vu."

A terme, ce vaste espace aura pour vocation de devenir un pôle culturel d'importance mais également un lieu de vie pour les personnes qui s'y rendront. Une philosophie que l'on retrouve déjà aujourd'hui. "L'idée est que les gens ne rentrent pas dans un musée, mais dans une ville, un espace publique. On a voulu créer cette impression pour ces expositions, mais on va l'accentuer encore plus pour le projet définitif."

Plus qu'un simple lieu d'exposition, ce sera donc un lieu de vie, avec ses divers espaces, qui sera proposé dès ce samedi aux visiteurs. "On veut avoir véritablement ici un espace public, gratuit, avec déjà de l'art, des petites expos pour les gens qui, s'ils le désirent, pourront prendre leur ticket pour visiter les grands parcours d'exposition qui, eux, sont payants. Il y aura également un espace horeca. Les espaces publics comme les lieux d'exposition auront des horaires particuliers parce que notre ambition est d'être ouvert de midi à 22h en semaine, et de midi à minuit le week-end. On veut tenter, dans cette année d'ouverture, un bouillonnement de vie culturelle en journée et en soirée."

Des artistes de taille XXL

©Ross Lovegrove ©Centre Pompidou, MNAMCCI/Philippe Migeat/Dist. RMNGP © Simone Cupoli

En association avec les commissaires du Centre Pompidou de Paris, un important choix d'œuvres, parmi les plus grands artistes, ont été sélectionnés en fonction des conditions climatiques et hygrométriques d'un espace qui reste encore assez brut, mais aussi en gardant en mémoire la philosophie des différentes espace de cet ancien garage.

"Les lieux ont conditionné le choix des œuvres en termes de conservation, mais aussi de thématique", ajoute en effet Yves Goldstein. "Par exemple, dans l'ancien espace administration, on a joué sur la thématique du bureau avec notamment une installation de Marcel Broodthaers qui dialogue avec un Duchamp dans la même pièce."

Et de la partie administrative, on passe aux ateliers de mécanique proprement dits. "On y accueille de pièces d'exception pour une petite histoire de la tôle dans l'art plastique en travaillant vraiment sur la philosophie de ce lieu. On a du Calder, Vasarely, Ron Arad, Lichtenstein, Donald Judd, Duchamp, Juan gris qui fut l'un des premiers à utiliser cette matière, César dont la concrétion semble avoir été faite pour ce lieu, et « Oracle », une œuvre majeure de Robert Rauschenberg qui joue sur le recyclage pour créer une sorte de symphonie."

Et au détour d'une salle, c'est un endroit étrange, "L'usine des films amateurs", que l'on traverse et que l'on doit aux équipes du réalisateur français Michel Gondry. "Ce sont en fait des studios de cinéma où les gens pourront s'inscrire, durant trois jours par semaine, pour y réaliser leur propre film. On y trouve des open-space de bureau, une 2e classe de train, une cuisine, une chambre à coucher, un zinneke café, une boîte de nuit, etc. Ce n'est pas en tant que telle une exposition, les gens pourront s'y promener quand cet espace ne sera pas utilisé."

C'est la Fondation Kanal qui pilote ce projet en partenariat (de 10 ans) avec le Centre Pompidou de Paris. Mais "c'est un projet de co-construction", tient à préciser Yves Goldstein. "On voulait construire avec leur aide, un espace culturel majeur de dimension bruxelloise, belge et internationale. Ce partenariat, c'est surtout beaucoup de transfert de connaissances, de savoir-faire, d'expériences, mais c'est l'occasion de puiser dans leur catalogue d'œuvres d'art."

Un pôle d'architecture

Belga / Laurie Dieffembacq

Mais si ce partenariat permettra de mettre sur pied un musée d'art, le Kanal aura également son musée d'architecture avec le CIVA qui va également y installer ses activités (collections, expos, archives). "Pour la phase de préfiguration, nous allons animer le showroom avec une trentaine d'étudiants en architecture qui ont conçu des structures", explique son directeur Pieter Van Damme.

"Le Civa va également animer des débats, des conférences, etc. On a également monté une exposition sur l'histoire du bâtiment sur base de notre collection d'archives, et aussi une autre sur les sept projets du concours international d'architecture, avec en exergue celui qui a été sélectionné pour le grand projet Kanal."

C'est d'ailleurs l'association momentanée des bureaux noAarchitecten (Bruxelles), EM2N (Zurich-Suisse) et Sergison Bates (Londres-Angleterre) qui a été choisie pour transformer l'ex-complexe de Citroën Yser.

"A terme, il y aura un musée - centre d'architecture qui sera construit au sein du pôle Kanal et à côté du musée d'art contemporain. Et ce sera l'occasion de créer des synergies entre art et architecture. On va travailler ensemble pour se renforcer."

Et de fait, les collections se complètement déjà puisque certains projets des architectes Jean Prouvé et Toyo ito ont été choisies par le Centre Pompidou pour être présentées lors de ces expositions d'ouverture à découvrir dès ce week-end de fête qui se fera également en musique.

Pierre Jacobs