Le bastion carolo

Il s'en est passé des choses à Charleroi en six années de mandat de Paul Magnette. Elu en 2012 par près de 24.000 voix, c'est la première fois qu'il devra défendre son bilan. L'actuelle coalition PS/MR/cdH sera-t-elle reconduite en octobre ? C'est très loin d'être sûr… Beaucoup de facteurs extra-communaux vont entrer en jeu.
par
Pierre
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Paul Magnette espère faire de cette élection un plébiscite qui pourrait être une étape vers la reconquête de la Région voire du fédéral. Historiquement, la première ville wallonne et ses environs restent un bastion du PS.

Mais le MR d'Olivier Chastel commence à gagner des parts, comme à Courcelles et Seneffe. D'autres villes pourraient également tomber dans le giron libéral (Fleurus, Fontaine-L'évêque…).

Avant 2012, le PS carolo semblait essoufflé par des années d'affairisme, des pratiques douteuses et une lourde mainmise de ténors politiques qui profitaient d'une hégémonie constante du parti sans trop se fatiguer.

Mais, sentant le vent tourner, Paul Magnette débarquait dans la place avec une fraîcheur que les sympathisants considérèrent comme salvatrice. Et de fait, 24.000 voix de préférence, et 30 sièges sur les 51 possibles pour son parti. Pari gagné.

Six années de projets

En six années de coalition, il est visiblement clair que Charleroi a quelque peu changé. Des grands projets immobiliers ont été lancés, l'activité commerciale –dans une ville devenue chancre- s'est améliorée, notamment grâce à l'implantation du centre commercial Rive Gauche, tout un quartier a été reconstruit, la criminalité a été réduite, etc.

Il faut dire que Paul Magnette tenait également en main les clés du porte-monnaie en étant ministre-président wallon de juillet 2014 à juillet 2017. Ceci pouvant expliquer cela.

Mais le niveau socio-économique a-t-il pour autant été tiré vers le haut ? Rien n'est moins sûr… Les effets de tous ces changements sont difficilement calculables sur le très court terme. Toutefois, en 2016, un Carolo actif sur quatre restait au chômage, un chiffre qui atteignait 45% chez les jeunes, tandis que la question de la pauvreté n'évoluait guère. Quant au niveau d'éducation de la population, elle restait très en deçà de la Wallonie en général.

C'est sans doute là que se situent les enjeux de la prochaine élection. Si la ville semble avoir entamé une timide renaissance, la population voudra également en profiter. Mais qui aura les clés de la prochaine législature ?

En 2007, PS, MR et cdH avaient signé pour une tripartite qui devait durer trois mandats, jusqu'en 2024( !). Mais en politique, encore moins qu'ailleurs, rien n'est éternel. Le changement de majorité au niveau wallon a rebattu les cartes, tandis que des événements extérieurs sont venus s'inscrire dans le débat.

Quelle coalition ?

Ainsi, le PS a-t-il connu de nouvelles affaires, notamment à Liège, qui sont venues écorner une fois de plus son image, laissant le PTB s'installer durablement sur sa gauche. Au MR, rien ne garantit que la politique de Charles Michel en coalition avec la N-VA au niveau fédéral ne jouera pas sur le vote des électeurs.

Quant au cdH, les récents sondages ne l'ont pas placé au mieux de sa forme, loin de là, et le coup de force de Benoît Lutgen en juin 2017, lui a sans doute fermé les portes d'une nouvelle coalition à Charleroi.

C'est l'actuel échevin de la propreté Cyprien Devilers qui sera tête de liste MR face à Magnette. Olivier Chastel a donc décidé de laisser la main à une nouvelle génération. Se dirige-t-on vers une coalition PS-MR ?

A quelques jours de l'élection, personne n'osera l'affirmer. Mais on voit mal le PTB être invité, tandis que DéFI ne semble pas grandir dans les sondages. La surprise viendra-t-elle d'Ecolo dans l'opposition depuis trois décennies ?

Il y a en tout cas de l'espace pour ce parti. Mais il est à parier que la prochaine coalition au niveau communal sera liée à des négociations pour d'autres niveaux de pouvoir.

Pierre Jacobs