Julien Clerc : « J'ai eu l'impression de passer ma vie à être découvert »

Julien Clerc semble éternel et la longévité de sa carrière, qui dure depuis maintenant plus de 50 ans, force l'admiration. « Terrien » plonge l'auditeur dans des chansons profondément actuelles, interprétées par un artiste qui n'est pourtant pas un habitué des thématiques sociales. Le Français évoque le monde comme il l'imagine et comme il l'a vécu, en tant que témoin privilégié de l'Histoire.
par
oriane.renette
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C'est votre 26 e album studio et cette longévité n'est pas à mettre sur le compte de la chance ou du hasard. Mais à quoi l'attribuez-vous ?

Julien Clerc : « La musique, c'est ce qui me plaît dans la vie, il n'y a jamais rien d'autre qui m'a intéressé. Composer des mélodies sur des textes que je reçois, c'est mon seul point d'intérêt. C'est une des raisons pour lesquelles je suis encore là, car je continue de faire mon métier et que ça m'amuse toujours autant. L'inspiration est encore là, à ma grande surprise, lorsque je reçois un texte. Cela demande beaucoup de travail et beaucoup de temps, parce que pour 12 morceaux que l'on veut sur un album, il en faut beaucoup plus. »

On perçoit que vous chantez la société plutôt que l'amour, ce qui rend l'album extrêmement actuel. Était-ce une demande de votre part auprès de vos auteurs ?

« Pas du tout, mais cela découle aussi de leur jeunesse. Je me suis toujours refusé à tenir la plume ou intervenir dans leur travail. Cela m'est peut-être arrivé deux ou trois fois de demander un sujet de chanson, mais cela relève de l'exception. Tout d'un coup, sans doute à cause des temps que nous vivons, les auteurs ont eu envie de me faire porte-parole de leurs préoccupations, ce qui est un honneur. J'ai réalisé que l'album ne ressemblerait pas aux autres et c'est le choix des auteurs. »

Est-ce que le fait d'aborder ces sujets nouveaux vous permet de toucher un nouveau public ?

« On verra sur scène quelle population sera là. J'ai eu l'impression de passer ma vie à être découvert. J'ai mis du temps à vendre des disques, même si vu de l'extérieur ça semblait être des débuts en fanfare, cela a pris du temps et j'ai dû construire mon répertoire. Je fais de la musique populaire, mais toujours un peu moins que mes collègues. »

Dans « mademoiselle », vous rendez hommage aux enseignantes. Quel souvenir gardez-vous de votre passage derrière les bancs de l'école ?

« Je n'aimais pas beaucoup l'école, mais j'ai eu la chance de faire des études relativement longues. Certains professeurs m'ont beaucoup marqué et je m'en souviens encore de façon extrêmement vivante malgré mon âge. Là c'est une chanson qui rend hommage aux institutrices de mon époque. J'espère que celles qui officient aujourd'hui enseignent encore ce que sont les grandes cités industrielles, Victor Hugo et Paul Verlaine. J'espère aussi qu'elles expliquent encore la différence entre les marchands de révolution, et les peuples pour de bon. »

Est-ce que votre notoriété vous a permis d'être un témoin privilégié de l'histoire ?

« C'est certain, en tout cas en France voire même un petit peu en Belgique. Je n'aurais pas connu la France de Michel Platini si je n'avais pas été chanteur. C'est l'entraîneur de l'époque Michel Hidalgo qui était fan de moi et qui emmenait donc le groupe à chacun de mes concerts. Ils en avaient marre de moi (rires). J'ai eu la chance de bien connaître François Mitterrand, qui est un personnage atypique et très important dans l'histoire de la France. J'ai vu le monde accélérer comme il ne l'avait jamais fait au niveau technologique, même dans mon métier. Il faut parfois s'accrocher pour accepter certaines choses, mais je l'ai fait ! »

Est-ce que la crise que nous sommes toujours en train de traverser est un accélérateur de changements ?

« Je crois qu'il va y avoir des prises de conscience. On le voit déjà dans le combat des femmes, que j'ai toujours connu, puisqu'avec Miou-Miou on était très proches de Gisèle Halimi. La libération de la parole que l'on connaît actuellement est unique. Je pense également que la prise de conscience de l'état de la planète que nous laissons à nos enfants va se généraliser. Est-ce qu'au nom du sacro-saint progrès, nous n'avons pas sacrifié la jeunesse de demain ? Je pense qu'on le saura bien assez tôt mais oui, nous rentrons dans une période tout à fait révolutionnaire. »

Julien clerc sera en concert à Forest national le 4 décembre prochain, si les restrictions sanitaires le permettent.

Sébastien Paulus

Sur ce 26e album studio, Julien Clerc s'est une nouvelle fois entouré des meilleurs auteurs de l'Hexagone pour aborder des sujets très actuels. De la violence faite aux femmes, à l'écologie, en passant par le Brexit, les textes sans être subversifs viennent traiter d'une actualité vive, à l'aube d'un temps révolutionnaire, des aveux du Français. La passion de l'artiste est toujours bien présente et l'on retrouve sur « Terrien » les balades qui font son charme et qui sauront plaire à ses fans.

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