Gringe: "Avec le recul, je me dis que j'ai quatre - cinq bons morceaux"

C'est à cœur ouvert que Gringe livrait «Enfant Lune» en novembre dernier. Un premier album dans lequel le rappeur, et acteur, français s'est donné corps et âme, quitte à regretter, aujourd'hui, certains choix musicaux.
par
ThomasW
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Quel a été le déclic pour vous lancer dans le rap en solo alors que vous débutez votre carrière dans le cinéma?

«J'étais dans un élan de peur qu'il n'y ait plus rien derrière. Le cinéma, c'est toujours quelque chose de nouveau et d'hyper incertain. Du coup, il fallait que je me lance dans un projet chronophage, qui m'occupe et qui ait du sens. C'était un peu la suite logique après deux albums de groupe.»

Peut-on dire que Gringe a laissé sa plume à Guillaume (son vrai prénom, NDLR) pour un album aussi intime?

«Ouais totalement. Mais maintenant que je l'ai digéré je me demande si c'était l'endroit pour faire quelque chose d'aussi personnel.»

Il y a des morceaux que vous regrettez?

«Avec le recul, je me dis que j'ai quatre-cinq bons morceaux. Le reste est très expérimental et parfois maladroit dans le choix des prods. Il y a peut-être un manque de cohérence. Mais ça m'a apporté une vraie expérience. C'est hyper valorisant d'avoir initié ce projet et de l'avoir amené au bout. C'est un premier album et il a forcément des défauts, il fallait qu'il soit comme ça.»

Quelles sont les cinq chansons que vous garderiez?

«‘Paradis noir', ‘Karma', ‘Pièces détachées' et surtout ‘Scanner'. Dans le lot, je mettrais certainement ‘Pour la nuit' ou un morceau où je donne mon regard un peu désabusé sur les relations homme-femme.»

Dans ‘Paradis Noir', vous dites que vous ne vous considérez pas comme un exemple face aux nombreux fans des Casseurs Flowters. Vous ne vous sentez pas légitime face à tout ce succès?

«C'est surtout que là la démarche est tellement personnelle qu'effectivement je ne me sens pas leader d'opinion et je ne le vois pas comme quelque chose qui cristallise les mots d'une génération. Je ne le considère pas comme un album étendard. Je n'ai jamais eu cette prétention de vouloir éveiller les consciences.»

Cet album semble avoir exorcisé certains de vos démons, vous semblez plus apaisé dans ‘Karma'.

«C'est grâce au côté auto-analytique de ce morceau-là et de l'album en général. Au moment où je me mets à fond dans l'écriture, je suis en psychanalyse. Mais il y a aussi le fait d'avoir tout catalysé dans un album. Ça m'a fait passer une espèce de cap. C'est marrant, on dit souvent aux artistes au bout de deux-trois albums que c'est l'album de la maturité alors que moi, mon premier, c'est un album sur la maturité.»

Du coup, vous laissez-vous guider par le karma pour la suite?

«Ouais beaucoup. Je n'ai reçu aucune éducation religieuse mais le karma, c'est un peu ma religion. C'est un état d'esprit à cultiver.»

Ph. M. Cotellon

Comment abordez-vous la vie aujourd'hui?

«Pour l'instant, je réfléchis assez de manière pragmatique. Je prépare les concerts même si je n'ai pas encore eu le temps de couper complètement et que je suis très fatigué. J'espère toujours des projets cinéma à côté. Je me suis créé une dynamique de vie et j'aimerais bien la solidifier et l'emmener plus loin. Ma seule préoccupation, c'est de pouvoir continuer de travailler. Plus je prends de l'âge et moins je suis à l'aise avec l'idée de me retrouver face à moi sans rien faire. C'est pour moi le meilleur moyen de devenir fou.»

En 2015, vous disiez avoir eu un déclic pour la comédie avec ‘Comment c'est loin'. Aujourd'hui, vous avez un déclic pour le rap solo?

«Oui même si je ne me vois pas me replonger dans l'état dans lequel je me suis mis pour travailler sur cet album. Pour l'instant, j'écris pour me vider la tête mais je préfère quand même la comédie.»

 

C'est plus facile d'interpréter quelqu'un d'autre que d'être soi-même?

«C'est ça! Il va bien falloir que j'apprenne à me créer des filtres dans la musique, à ne pas me surexposer d'un coup comme ça dans l'écriture. Ou à trouver des moyens de diversion.»

Laura Sengler

Gringe se produira à guichets fermés le 1er février 2019 au Reflektor de Liège

Ph. D.R