Face au terrorisme, le fichier PNR refait débat

par
Camille
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Faut-il adopter d'urgence le Passenger Name record? Depuis des mois, ce dossier envenime les relations entre les États membres de l'UE et les eurodéputés. Les premiers y voient un outil indispensable pour lutter contre le terrorisme. Et les seconds s'inquiètent d'un instrument trop intrusif pour la vie privée de personnes qui n'ont rien à se reprocher. La France avait relancé le débat sur la mise en place de ce dispositif au lendemain l'attaque contre Charlie Hebdo, en janvier dernier. Quelques heures après les explosions qui ont frappé Brussels Airport et la station Maelbeek, Manuel Valls a encore une fois appelé les eurodéputés à voter le texte permettant sa mise en place. Les États pressent d'ailleurs leurs eurodéputés pour qu'ils cessent de s'opposer à ce texte.

Un nouveau vote devrait intervenir courant avril. Le dispositif, tel qu'envisagé, regroupera les données privées (nom, adresse, numéro de carte de paiement, téléphone, mail…) recueillis par les compagnies aériennes pour tous leurs passagers. L'objectif est de pouvoir suivre plus facilement les trajets des potentiels terroristes. Notamment ceux qui se seraient rendus auparavant dans des pays jugés «à risque».

Ambivalence des Etats

Mais pour de nombreux eurodéputés, la mise en place d'une telle base de données ne va pas de soi. La députée libérale néerlandais Sophie In ‘t Veld a répété à de nombreuses reprises son inquiétude de voir collectées les données personnelles d'individus dont le seul «crime» est d'avoir pris l'avion. La cour européenne de Justice a d'ailleurs souligné, dans une affaire liée aux données personnelles, que «la rétention de données peut se faire uniquement pour des personnes déjà soupçonnées d'un crime», et non pour «toute une population». D'autres eurodéputés pointent l'inefficacité d'un tel programme. L'écologiste Jan-Philip Albrecht remarque que les tueurs de Charlie Hebdo étaient déjà connus des services de sécurité. Dès lors, le PNR servirait surtout à surveiller des «non suspects». Un avis partagé par des experts du renseignement, qui rappellent que ceux qui rentrent en Europe sous leur véritable identité sont rarement dangereux. À l'inverse, les véritables menaces disposent de faux papiers, ou bien entrent par voie terrestre.

Les opposants mettent en avant des alternatives. Au sein des élus écologistes, on estime qu'il serait préférable de mieux partager les données dont disposent déjà les services de renseignements de différents pays. Mais ce partage se heurte souvent aux pratiques du terrain. Hier, l'eurodéputé conservateur Arnaud Danjean déplorait le manque de volonté de coopération des États, «par temps calme», soucieux de leur souveraineté. Et de leur capacité à se demander ce «que fait l'UE?» dès qu'un attentat frappe.