Dès que le vent resoufflera...
La France aime ses artistes et leur rendre hommage. Après la flopée d'albums en duos et le carton de la «Génération Goldman», c'est au tour de Renaud d'y passer. En toute conscience, d'ailleurs, et produit par son ami de toujours Alain Lanty. Dans sa «Bande», on croise Cœur de Pirate, Bénabar, HF Thiéfaine, Benjamin Biolay, Nolwenn, Jean-Louis Aubert... Pour quelques jolis instants, et d'autres qui le sont beaucoup moins.
Avant d'intégrer ce projet, quel était votre rapport à Renaud?
Cœur de Pirate: «Pour moi, Renaud, c'est la base de la chanson française. Il n'y a pas beaucoup de gens qui arrivent à toucher toutes les générations. Et c'est vraiment son cas. Moi qui ai 24 ans, je suis encore touchée par son répertoire. Quand il écrit ses chansons, il a une réelle conversation avec celui qui écoute. C'est en partie pour cela que l'on se retrouve dans ce qu'il chante.»
Le «Mistral Gagnant», c'est un choix qui coulait de source pour vous. Ça correspond bien à votre univers.
CdP: «Oui, et puis c'était la seule dont je me sentais prête à attaquer. J'ai beaucoup de mal à penser que je serais capable de reprendre les chansons de gens qui ont plus de vécu. Je n'ai jamais touché à Brel, j'ai essayé une fois Gainsbourg mais ça n'allait pas. Là, pour le coup, je me sentais capable de la faire.»
Comment s'est passé le choix des morceaux. Les artistes avaient-ils leurs mots à dire?
Alain Lanty: «Au départ, on avait établi une liste de chansons, pas forcément des hits, mais aussi des morceaux méconnus, ou qui étaient passés inaperçus et qui nous semblaient bon de faire revivre. Et à cette liste on a opposé des interprètes qui nous paraissaient être soit les dignes héritiers dans leur écriture soit dans leur interprétation ou leur comportement dans la vie. Et on a fait simplement des rapports entre telle chanson et tel artiste. Quand on les a contactés, ils étaient pratiquement tous d'accord avec notre choix. D'autres nous ont proposé des morceaux que nous n'avions pas repris. On a donc fait des ajouts de bon goût. Quant à ‘Mistral Gagnant', qui est un peu le morceau emblématique de Renaud, Coeur de Pirate la porte très bien sûr ses frêles épaules."
Le casting est assez hétéroclite: Biolay, Bénabar, Disiz, Thiéfaine, etc.
AL: «Au départ, le but était de transmettre à la nouvelle génération soit le répertoire de Renaud, soit sa personnalité. Aujourd'hui, certains de ses chansons passent mais beaucoup de jeunes ne savent pas qui il est. Nous avons donc demandé à des artistes de la jeune génération, dont Cœur de Pirate, mais aussi Renan Luce, Nolwenn Leroy, Elodie Frégé... Mais aussi à d'autres comme Nicola Sirkis ou Thiéfaine qui, eux, parlent encore à cette génération. Le but, c'était de l'atteindre, mais aussi de faire remonter à la surface des chansons oubliées.»
Renaud a-t-il participé à sa conception ou était-ce un hommage surprise?
AL: «Non, il n'y avait rien de surprise, parce qu'avec Dominique Blanc-Francard, avec qui j'ai réalisé cet album, on ne fait pas de coup dans le dos, d'autant que Renaud est mon ami. On ne pouvait pas le faire sans avoir sons autorisation, bien entendu. Mais il était de toute façon hors de question de le mettre hors de la boucle. Il était quotidiennement informé, soit par moi, soit par ses coups de fil qu'il donnait tous les jours. Il a posé beaucoup de questions, et plus on se rapprochait de la fin plus je sentais chez lui un désir d'être dans cette aventure.»
Cet album pourrait-il le titiller pour se remettre en selle et reprendre l'écriture?
AL: «Je vais vous dire un truc: personne ne le sait, lui seul le sait. En tout cas, c'est une espérance commune.»
Pierre Jacobs
«La Bande à Renaud» (Universal)