Au Cambodge, l'éducation devient un motif de campagne

A l'approche des législatives de dimanche au Cambodge, l'homme fort au pouvoir depuis plus de 30 ans, Hun Sen, a placé l'éducation au cœur de sa campagne de propagande électorale.
par
Camille
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"Je veux que chaque district ait un lycée, chaque commune un collège et chaque village une école", se plaît à déclarer Hun Sen, en pleine campagne pour sa réélection. Dans ce pays jeune, où un tiers de la population a entre 15 et 30 ans selon les chiffres de l'Onu, le régime a compris son intérêt à miser sur l'éducation. 300.000 jeunes Cambodgiens entrent en effet chaque année sur le marché du travail, souvent sans qualification adaptée. "Il y a beaucoup de diplômés mais peu d'emplois", déplore un jeune employé administratif, So Van Veasna, qui gagne 170 € par mois et n'a jamais trouvé de travail à la hauteur de son diplôme de droit.

Hun Sen entend donc montrer qu'il fait tout pour désamorcer cette bombe à retardement, alors que les jeunes avaient voté en masse pour l'opposition, aujourd'hui interdite, aux législatives de 2013. Sam Rainsy, le chef de l'opposition, en exil en France pour échapper à des poursuites, dénonce des "mesures de façade" et l'émergence de formations privées qui se révèlent "des usines à diplômes sans utilité".

AFP

Trouver du travail

"En sortant d'ici, ils trouveront du travail", insiste l'enseignante de littérature khmère Men Solaneth. Un système de tirage au sort permet de départager les centaines de candidats qui se pressent pour être admis dans ces écoles, alors que la majorité d'entre elles fonctionnent avec de maigres moyens.

 

"Cette école a de bons équipements, du coup les élèves prennent du plaisir à apprendre", assure Seng Sreyleak, une lycéenne admise grâce au tirage au sort. Dans ces établissements, l'accent est mis sur la formation scientifique, les nouvelles technologies, dans un pays porté pour l'heure par des secteurs impliquant une main d'oeuvre peu qualifiée comme l'industrie textile.

Il n'y a pas assez de livres

Dans les écoles classiques, "sans même parler des équipements modernes tels que les ordinateurs, il n'y a pas assez de livres", critique Rong Chhun, membre de l'Association des professeurs indépendants. A une centaine de kilomètres de Phnom Penh, dans la province de Kampong Chhnang, la révolution "high tech" des écoles "nouvelle génération" paraît bien loin. Ici, le toit fuit, les tablettes sont en ardoise et souvent le professeur Yi Sareth achète lui-même des craies pour ses élèves.

Une corruption rampante et la pratique courante des cours particuliers, payants, rend le système éducatif encore plus inégalitaire. Et les ravages du régime khmer rouge, qui a vu mourir un quart de la population dans les années 1970, notamment des intellectuels comme les enseignants considérés comme de s ennemis du peuple, ont encore aujourd'hui des conséquences, avec un déficit toujours marqué d'enseignants, les jeunes diplômés étant de surcroît peu attirés par une profession mal payée.