Il en existe plus de 700 espèces en Belgique : les galles, qu'est-ce que c'est ?

Depuis quelques années, un vaste inventaire des galles a lieu sur l'entité de Virelles, et principalement dans les 130 hectares de réserve Natagora qui se déploient autour de l'étang de Virelles. De nombreux naturalistes se sont succédé, pour recenser ces excroissances, bourrelets, enroulements, et autres amas poilus végétaux.
par
ThomasW
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Les galles sont des déformations structurées des plantes, créées par des organismes étrangers. Elles servent de gîte et de couvert aux espèces qu'elles hébergent. Celles-ci, très variées (des acariens, des champignons, des pucerons, des mouches, des petites guêpes ou encore certains micropapillons ou coléoptères), ne peuvent mener à bien leur cycle de reproduction qu'à travers la présence d'une galle. Chacune de ces espèces (qu'on appelle «cécidogène», la galle elle-même étant appelée «cécidie») est habituellement limitée à un nombre restreint d'espèces de végétaux très voisines, voire à une seule espèce. Par leur forme particulière et la plante hôte sur laquelle elles se trouvent, les galles sont le reflet des organismes qui les ont créées. Elles peuvent donc la plupart du temps être identifiées. On a déjà recensé en Belgique plus de 700 espèces de galles, mais il y en a certainement encore beaucoup à découvrir.

Ph. Gilles San Martin

À la croisée de la botanique et de l'entomologie

L'étude des galles (la cécidologie) requiert donc des compétences autant botaniques qu'entomologiques, et parfois mycologiques. Ce qui en fait un domaine peu exploré. Heureusement, la discipline se développe ces dernières années en Wallonie, grâce à la création d'un groupe de travail dédié qui poursuit les travaux du professeur Jacques Lambinon, botaniste réputé et cécidologue averti.

Et le sujet est passionnant. La formation d'une galle est déjà toute une aventure en soi, fruit de centaines de millions d'années d'évolution conjointe. Comment la simple ponte d'un minuscule insecte peut-elle mener à la création de structures aussi exubérantes que le bédégar des églantiers ou solides que la galle-cerise du chêne? Le parasite commence par choisir une partie bien précise de sa plante-hôte: la feuille, le bourgeon, la tige, la fleur ou la racine. Chaque espèce cécidogène étant spécialisée dans cette unique partie. Une série d'actions et de processus vont alors se succéder pour induire la création de la galle.

Ph. Gilles San Martin

Le gîte et le couvert

Dans le cas des cynips (une famille de petites guêpes), les œufs peuvent être pondus à la surface ou à l'intérieur du végétal. La femelle dépose alors une série de sécrétions (enzymes, acides aminés…) qui initient la formation de la galle. L'œuf, ou la larve à l'éclosion, continue ensuite à produire des molécules qui vont interférer localement avec la plante. Les tissus de cette dernière se modifient alors pour créer la structure qui hébergera la larve (ou les nombreuses larves) jusqu'à sa sortie de la galle. Mais l'interaction va plus loin: la galle comporte une série de tissus nourriciers qui permettent à son hôte de se sustenter, même dans un environnement entièrement clos. Certaines femelles de cécidomyies (de minuscules mouches) adoptent une autre stratégie en introduisant des spores de champignons en même temps que ses œufs lors de la ponte. Ceux-ci, en se développant, tapissent l'intérieur de la galle et fournissent nourriture et protection supplémentaires à l'hôte.

Les galles sont donc de petites merveilles de coévolution entre des règnes biologiques pourtant totalement différents. Elles méritent certainement une attention plus poussée de la part des naturalistes. Sensibles aux modifications de l'environnement, elles peuvent jouer un rôle de bio-indicateurs. Il semblerait d'ailleurs, à l'image de l'entomofaune globale, que leur présence soit plutôt en déclin. Des études comme celle menée à Virelles mériteraient d'être multipliées dans d'autres réserves naturelles, dans d'autres milieux, et réserveraient certainement de nombreuses surprises.

Benjamin Legrain