Pourquoi certains oiseaux sont-ils sédentaires et d'autres migrateurs ?

Le fait, pour un oiseau, d'être sédentaire assure la priorité d'accès à certaines ressources indispensables à la nidification. Encore faut-il avoir survécu à l'hiver! Les dangers du voyage ne sont pas négligeables non plus, et le retour n'est pas assuré. Pourquoi, dès lors, certaines espèces, voire certaines populations, se sont-elles orientées vers tel ou tel type de comportement?
par
Clement
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Ce n'est pas parce qu'un oiseau se déplace beaucoup qu'il doit être classé comme migrateur. Prenons deux exemples. Le pinson des arbres qui nichait dans le petit bois derrière chez vous et qui, cet hiver, se sera réfugié aux environs du Pas-de-Calais est bel et bien un migrateur au même titre que cet autre pinson scandinave qui est allé hiverner dans le nord de l'Afrique. En revanche, la buse variable que vous avez vue au-dessus du même petit bois cet été et qu'un Suisse verra survoler son chalet cet hiver, n'est pas un migrateur.

La différence entre migration (notre pinson) et erratisme (notre buse) n'est pas une question de kilomètres. La migration est un mouvement orienté (dans nos régions, généralement vers le sud-ouest en automne) qui implique un aller et (avec de la chance) un retour. Cette migration ramène bien souvent le voyageur sur le même site d'hivernage chaque année. L'erratisme est un déplacement qui s'effectue au hasard des circonstances climatiques et alimentaires et qui peut mener notre voyageur n'importe où.

Adaptations physiologiques

Dans nos régions, la durée du jour augmente du solstice d'hiver (21 décembre) au solstice d'été (21 juin), elle décroît ensuite jusqu'au solstice d'hiver. Ces inversions sont des signaux qui entrent dans le déterminisme de différentes adaptations physiologiques intervenant aussi bien pour la migration que pour la préparation à l'hiver. Les sédentaires, les erratiques et les migrateurs restant dans l'hémisphère nord subissent la suite logique des événements (atténués cependant au fur et à mesure qu'ils se rapprochent de l'équateur). Mais, dans l'hémisphère sud, les saisons sont inversées. Un migrateur au long cours qui hiverne dans l'hémisphère sud sera donc soumis au même signal de départ à l'aller (en «automne») et au retour (au «printemps»), c'est-à-dire des journées diminuant. Nos hirondelles de fenêtre ont donc fui l'automne dans leur voyage vers le sud et elles fuiront également l'automne pour revenir chez nous. Le petit problème est que, chez certaines espèces, des individus peuvent atteindre toutes ces destinations, proches et lointaines, au cours du même hiver! Chacun doit donc être capable d'apprécier le phénomène en fonction de l'endroit où il se trouve!

Pourquoi rester? Les risques liés à un voyage de plusieurs milliers de kilomètres (hirondelles et martinets, limicoles…) sont redoutables et certaines espèces et/ou populations préfèrent donc la sécurité d'un terrain connu. Même si les ressources diminuent en hiver, la bonne connaissance des lieux permet la survie. Évidemment, il ne faut pas être trop rivé à un régime alimentaire. Toutes les espèces hivernant dans nos régions sont capables d'adapter leur régime en conséquence. Et si le temps est vraiment trop épouvantable, il est toujours temps de se déplacer un peu vers le sud.

Adaptations comportementales

Pour résister à l'hiver ou au voyage, des adaptations physiologiques ne sont pas toujours suffisantes. Des adaptations sociales peuvent augmenter les chances de survie: ainsi, les troglodytes qui ne deviennent pas grégaires lorsque les conditions météorologiques deviennent très défavorables sont condamnés à disparaître. L'espèce conserve donc une souplesse d'adaptation indispensable à la survie. Au cours de la migration, un comportement grégaire peut également présenter de nombreux avantages en diminuant l'énergie nécessaire au vol (vol en V ou en ligne), et en facilitant la recherche de nourriture et de la route à suivre. Les grues, les oies, les cygnes… prennent carrément leurs rejetons «par la main» pour leur indiquer le chemin, et ainsi les sites de ravitaillement, vers les zones d'hivernage. C'est ainsi que depuis plusieurs années, un groupe de cygnes chanteurs passe l'hiver près des Barrages de l'Eau d'Heure. Saluez-les de ma part si vous passez par là.