Les nuggets de poulet : le nouvel appât des dealers pour recruter les jeunes

Pour enrôler les enfants dans le trafic de drogue, quoi de plus efficace qu'un nugget de poulet ? Rien visiblement, en tous cas pas d'après les dealers du Royaume-Uni. Ceux-ci recrutent désormais leurs « petites mains » dans les fast food du pays.  
par
oriane.renette
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Offrir de la nourriture gratuite, plus particulièrement des fast-foods, comme appât pour attirer les jeunes. Voilà la tactique des trafiquants de drogue au Royaume-Uni. Celle-ci a été mise au jour par une étude tout à fait sérieuse, puisqu'il s'agit d'une enquête parlementaire.

Les fast-foods représentent des lieux de socialisation pour de nombreux jeunes. C'est donc désormais dans ces établissements que les dealers recrutent leur main d'œuvre. En leur offrant d'abord de la nourriture gratuite, ils créent un lien avec leurs cibles. Ensuite, ils leur proposent des petits billets pour accomplir des tâches simples, comme faire le guet. C'est ainsi que les jeunes mettent le pied dans un engrenage. Très vite, ils se retrouvent menacés s'ils refusent d'accomplir les missions qui leur sont confiées.

10.000 enfants britanniques liés au trafic de drogue

Selon une association de protection de l'enfance, les cibles idéales des gangs ont plutôt entre 14 et 17 ans. Certains trafiquants visent même plus bas, en enrôlant des enfants de… 7 ans. Ces jeunes sont souvent utilisés par les gangs pour faire le lien entre la ville et les zones rurales.

L'enquête souligne que ce sont les enfants en décochage scolaire, ou déjà exclus du système scolaire, qui sont les plus vulnérables à l'exploitation.

Rien qu'au Royaume-Uni, les trafiquants auraient recruté 10.000 mineurs pour participer à ce business juteux, selon un rapport officiel publié en janvier.

« Le poulet gratuit, ça n'existe pas ! »

Des campagnes de prévention à destination des jeunes ont donc été lancées dans des écoles. « Le poulet gratuit, ça n'existe pas ! » prévient ainsi un panneau de sensibilisation. « Les amis de vos amis qui vous offrent quelque chose attendent toujours quelque chose en retour ». Cette campagne a été lancée par une communauté d'écoles et d'autorités locales à Londres. Son responsable sécurité, Mark Bentley, opère aussi un travail de prévention auprès des parents. Il prévient que, même dans des quartiers plutôt favorisés, « les fast-foods de poulet sont légion. Et les enfants adorent s'y arrêter en rentrant de l'école ».

« Ils auront vite fait de penser : ‘super, ça me permet d'économiser quelques pièces' », continue le responsable. « Mais après, ils se retrouvent vite coincés dans le système ».

Du nugget aux menaces 

Natasha Chopra est responsable de la lutte contre l'exploitation des jeunes pour une association londonienne. Dans les colonnes du Guardian, elle décrit avec précision ce processus. Les trafiquants vont « observer les jeunes et se dire ‘Ok, celui-là arrive à cette heure-ci et quitte à cette heure-là. Pourquoi ne rentre-t-il pas chez lui ?' C'est à ce moment-là qu'ils vont entamer la conversation en proposant des nuggets ou des frites.

L'experte explique que le processus d'enrôlement dans un gang se fait ensuite selon plusieurs étapes. Après avoir assuré quelques tâches faciles contre un peu d'argent, les jeunes « montent en grade » et développent un sentiment d'appartenance au gang. Et une fois enrôlé, difficile de quitter la nouvelle « famille » car ils font face à de nombreuses menaces, souligne Natasha Chopra. Les jeunes voient leur famille et leurs amis menacés, ou encore, on les menace de diffuser des vidéos compromettantes.