Faut-il imposer le port du casque à vélo?

C'est un débat qui revient fréquemment: doit-on obliger les cyclistes à porter un casque pour leur sécurité? Paradoxalement, une telle obligation pourrait augmenter le nombre de blessés chez les usagers du vélo.
par
Pierre
Temps de lecture 3 min.

Les députés français se sont récemment interrogés quant à l'opportunité d'imposer le port du casque à vélo. Plusieurs élus de la majorité y voyaient, statistiques à l'appui, une solution pour réduire le nombre de blessures consécutives aux accidents de vélo. La mesure a finalement été rejetée.

En Belgique, une récente étude de l'Agence wallonne pour la Sécurité routière (AWSR) souligne que deux tiers des cyclistes wallons ne portent pas de casque. Sans se prononcer sur l'opportunité d'imposer le port du casque à vélo, l'AWSR insiste sur le fait que le port du casque permettrait de réduire de plus de 65% le risque de blessures à la tête, lesquelles concernent un cycliste blessé sur trois.

"Une fausse bonne idée"

L'Institut belge pour la Sécurité routière (IBSR) s'est récemment positionné, plaidant pour rendre le casque obligatoire pour les cyclistes de moins de 14 ans. Six Belges sur dix seraient favorables à une telle mesure, avançait l'IBSR. Le sondage notait également que les Wallons (74%) et les Bruxellois (68%), sont davantage favorables à une telle obligation que les Flamands (50%), qui ont pourtant plus l'habitude de se déplacer à vélo.

Du côté des organisations de cyclistes, on se montre critique quant à l'intérêt d'une telle obligation. "Nous sommes contre l'obligation du port du casque", explique Aurélie Willems, la secrétaire générale du Gracq. "Soyons clairs: nous ne sommes pas contre le casque. Nous donnons d'ailleurs des conseils sur quel type de casque choisir, pour quel public… Mais l'obligation est une fausse bonne idée."

"Safety by number"

Pour comprendre ce point de vue nuancé, il faut aller au-delà des évidences. "Il est important de distinguer les conséquences de l'obligation d'un point de vue individuel et d'un point de vue collectif. Individuellement, le cycliste qui porte un casque est mieux protégé, c'est une évidence. Mais collectivement, c'est une autre affaire. L'obligation du port du casque va freiner la hausse du nombre de cyclistes. Et moins il y a de cyclistes sur les routes, moins les autres usagers sont conscients du besoin de partager l'espace."

Plusieurs études ont montré que plus il y a de cyclistes, plus ils sont en sécurité sur la route, puisque plus les automobilistes sont habitués à voir des vélos, plus ils y font attention. Ce principe du ‘safety by number' se vérifie d'ailleurs à Bruxelles: le nombre d'accidents à vélo augmente nettement moins vite que le nombre de cyclistes. "Dès lors, nous disons non à l'obligation, mais oui au casque pour ceux qui veulent se protéger plus efficacement."

Chez nos voisins du nord, où près d'un habitant sur quatre se rend au travail à vélo, le casque n'est pas obligatoire. "Ce pays est pourtant un exemple en matière de sécurité routière", reprend Aurélie Willems. "Le faible nombre d'accidents impliquant des cyclistes s'explique par le nombre et la qualité des infrastructures cyclables. Cela montre qu'il y a bien des mesures utiles à prendre pour favoriser la sécurité des cyclistes, mais qu'imposer le port du casque n'en fait pas partie."

Camille Goret