Cet entrepreneur recycle les terres excavées des grands chantiers de Bruxelles

Vous pouvez désormais construire votre maison en briques du pays à Bruxelles! En effet, l'entreprise bruxelloise BC Materials récupère, depuis l'année passée, les terres excavées des grands chantiers de la capitale pour en faire différents matériaux de construction éco-friendly.
par
ThomasW
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«Chaque année, deux millions de tonnes sont excavées à Bruxelles», lance Ken De Cooman, un des trois cofondateurs de BC Materials. L'entrepreneur précise que, d'habitude, ces quantités astronomiques de terres larguées par les entrepreneurs sur le site prévu à cet effet, étaient stockées puis enfouies, par exemple, dans des carrières. «Ces terres sont considérées comme des déchets. On dépense de l'argent pour les caser là où on le peut.» Non-sens total puisque ces dernières seraient, pour 70% d'entre elles en tout cas, non polluées et non perturbées par l'être humain. Un déchet? Non. Une ressource! Bienvenue dans l'univers circulaire.

«CO2 neutre»

En matière de géologie bruxelloise, Ken De Cooman parle de «mine urbaine» et cette dernière est apparemment très qualitative. «Les terres proviennent parfois de couches géologiques très profondes, de huit mètres à vingt mètres de profondeur, comme la couche yprésienne, qui va de Ypres jusqu'à Bruxelles. Au sud de Bruxelles, on a une couche plus argileuse et au nord, une couche plus sableuse.» Une fois récupérées, ces différentes terres, qui n'ont rien à voir avec de la terre de surface -celle du potager- sont mélangées «comme si l'on cuisinait mais dans d'immenses casseroles», pour en faire des matériaux écologiques très performants. Ces derniers sont surtout «CO2 neutre» puisqu'ils sont circulaires et locaux (donc pas d'empreinte écologique liée au transport) et n'épuisent pas les ressources. Avec ce procédé, BC Materials entend recycler plusieurs milliers de tonnes de terre par an.

Haute qualité

BC Materials produit trois types de matériaux différents: un enduit en argile, un bloc en terre comprimée (des briques) et différents «pisés» qui sont des mélanges que l'on peut utiliser sous forme de plaques à poser sur le sol, sur les parois intérieures ou sur les plafonds, comme on le ferait avec du plâtre ou du béton ciré par exemple. Ces matériaux seraient idéaux pour la construction: «l'argile et la terre crue, c'est très respirant. Et il y aura donc moins de charges financières pour des systèmes de ventilation, c'est important de le préciser, car le prix est un peu plus élevé que l'industriel classique.

Il y a aussi une régulation thermique naturelle, donc les variations de température sont plus lissées. Et enfin, ces matériaux ont des propriétés acoustiques intéressantes. L'enduit en argile, par exemple, absorbe six fois plus le bruit que le plâtre, ce qui est idéal évidemment pour la qualité de vie intérieure de la maison. C'est la même chose pour nos trois matériaux», précise Ken De Cooman (photo). Et au niveau prix justement, l'entrepreneur précise que l'on se trouve entre 150 € – 250 € /m² pour le sol en pisé (béton ciré = entre 100 et 150 €) et entre 400 € -600 € /m² pour les murs. Pour l'enduit en argile, vous serez à 35 €/m² (l'enduit en plâtre + peinture = 28 € du mètre carré environ.)

Comme une bière artisanale et bio

C'est un peu plus cher que ce que l'on peut trouver en général dans la construction, mais c'est une offre différente, précise Ken De Cooman: «C'est comme quand vous appréciez de mettre quelques centimes de plus pour avoir une bière artisanale, bio et locale plutôt qu'une bière standard issue de l'industrie multinationale. Vous soutenez une économie différente et l'écologie.»

Leur ambition est également de former et de sensibiliser: «Ce sont des matériaux anciens mais nouveaux dans le sens où l'on a perdu le savoir-faire au niveau de leur mise en œuvre. Donc, nous apprenons aux professionnels à utiliser ces matériaux et nous informons les centres de distributions de matériaux, les entrepreneurs, les particuliers sur leur existence.»

Un filon en béton… D'autant que l'excavation de la ligne 3 du métro bruxellois va leur rapporter un fameux stock de terres à transformer. De quoi réjouir l'entrepreneur.

Lucie Hage

Photos Thomas Nocetto