Européennes 2019 : La poussée eurosceptique semble avoir été contenue

Malgré les victoires de Marine Le Pen en France, Matteo Salvini en Italie et Nigel Farage au Royaume-Uni, la poussée eurosceptique attendue dimanche aux élections européennes semble avoir été contenue. Les libéraux et les écologistes ont le vent en poupe.
par
ThomasW
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Et si le Parti populaire européen (PPE, droite pro-européenne) - avec 179 sièges contre 216 actuellement - et les sociaux-démocrates (S&D) - avec 150 sièges contre 185 - restent les deux principales formations de l'hémicycle européen, ils perdent leur capacité à réunir à eux seuls une majorité pour faire passer des textes législatifs. La fin d'une époque. Ils devront désormais composer avec les écologistes, qui grimpent de 52 à 70 sièges, grâce à leurs bons résultats en Allemagne et en France, et les Libéraux (Alde), dont le parti du président français Emmanuel Macron, qui obtiennent 107 sièges contre 69 actuellement.

Marine Le Pen devance Macron en France

En France justement, le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen a devancé d'environ 1% la liste soutenue par le président Emmanuel Macron. Selon les résultats publiés par le ministère de l'Intérieur, le mouvement d'extrême droite et sa tête de liste Jordan Bardella s'imposent avec 23,3% des suffrages, en deçà de son score des européennes de 2014 (24,9%). La liste Renaissance pro-Macron menée par l'ex-ministre Nathalie Loiseau suit à 22,4 %. Une dizaine de points derrière, les écologistes d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) surprennent en obtenant 13,4%, alors qu'ils étaient donnés sous les 10% par les sondages.

Le président français a immédiatement appelé à la "constitution d'un groupe puissant" au Parlement européen réunissant les formations eurosceptiques, des forces hétéroclites qui n'ont pas réussi par le passé à se fédérer. Alliance d'eurosceptiques De son côté, Marine Le Pen espère, avec la Ligue de Matteo Salvini arrivée sans surprise en tête en Italie avec 32,4% des voix, fédérer une large alliance de partis nationalistes, eurosceptiques et populistes. Difficile cependant d'envisager aujourd'hui un rapprochement avec le groupe populiste EFDD - où siège le Mouvement Cinq Etoiles italien et que devrait rallier le nouveau parti europhobe de Nigel Farage, grand vainqueur des élections au Royaume-Uni avec 31,6% des voix - tant leurs divergences sont parfois profondes.

Les eurosceptiques restent loin de la majorité

Et même en additionnant les gains de ces groupes avec les 58 sièges du groupe ECR (tories britanniques et Polonais au pouvoir du PiS, vainqueurs des européennes), l'extrême droite, les eurosceptiques et les europhobes, restent, avec 172 sièges, loin de la majorité au Parlement européen (376). Les partis d'extrême gauche passent pour leur part de 52 à 38 sièges. Elections anticipées en Grèce "La vague de partis nationalistes et eurosceptiques est très contenue, si on met de côté le RN et la Ligue", estime Eric Maurice, analyste à la Fondation Robert Schuman.

En Hongrie, le dirigeant populiste hongrois Viktor Orban a largement remporté l'élection européenne dans son pays. En Autriche, le parti conservateur du chancelier autrichien Sebastian Kurz est arrivé largement en tête, devant les sociaux-démocrates et le parti d'extrême droite FPÖ, touché par l''Ibizagate', selon des estimations. En Espagne, le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez est le seul socialiste à sortir grand vainqueur du scrutin dans un grand pays. En Grèce, le parti Syriza (gauche radicale) a été devancé de plus de 8 points par le principal parti d'opposition de droite, la Nouvelle Démocratie. Conséquence: le premier ministre Alexis Tsipras a annoncé qu'il convoquerait des élections anticipées.

"Vague verte"

Les élections européennes ont également été marquées par les bons résultats des écologistes, qui espèrent devenir un interlocuteur indispensable dans ce paysage politique plus fragmenté que jamais. Ils finissent, en France, à une inattendue troisième place avec 13,4% des voix. Ce résultat fait écho au score enregistré en Allemagne par les Verts, deuxièmes du scrutin, selon les sondages, juste derrière le camp centre-droit d'Angela Merkel, qui enregistre un plus bas historique avec 28,6%. "Une grande victoire !", s'est réjouie la tête de liste des écologistes au Parlement européen, l'Allemande Ska Keller. "Je suis sur un petit nuage", a renchéri l'eurodéputé belge Philippe Lamberts.

Participation en hausse

Si le taux de participation à ces élections reste inférieur à celui des scrutins nationaux, il atteint cependant, avec 50,5%, son niveau le plus élevé depuis 20 ans, selon le Parlement européen. Cette mobilisation marque un coup d'arrêt à l'érosion continue qui caractérise les européennes depuis 1979. Quelque 427 millions d'Européens étaient en âge de participer au scrutin, afin d'élire pour 5 ans les 751 membres du Parlement européen, une assemblée qui n'a eu de cesse d'accroître ses pouvoirs. Les chefs d'Etat et de gouvernement se retrouvent dès mardi pour un sommet afin d'échanger sur les prochaines nominations.