Élections 2019: Le cdH veut une "meilleure collaboration entre les différents acteurs"

La mobilité sera l'un des enjeux majeurs des élections du 26 mai. Pour Gianni Tabbone, troisième sur la liste cdH à Liège et porte-parole de Navetteurs.be (en congé le temps de la campagne) plaide pour un refinancement du transport ferroviaire.
par
Camille
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La SNCB

Quelle est la première priorité du cdH pour améliorer la mobilité en Belgique, et notamment à Bruxelles?

«Tout le monde se rend compte qu'il y a un besoin de refinancement du rail, via la SNCB et Infrabel. Les usagers font face à de plus en plus de problèmes, qui sont liés à des pannes et à des installations vieillissantes. Les statistiques de retard mentionnent de nombreux problèmes de matériel. Des moyens supplémentaires doivent permettre de limiter les dégâts. Ce refinancement est urgent.»

Tous les efforts doivent se porter sur le matériel?

«Il est également nécessaire de redynamiser l'offre de la SNCB. Nous avons besoin d'une offre plus étoffée, notamment dans les zones rurales. C'est indispensable si on veut qu'il soit possible de se passer de la voiture individuelle. Nous plaidons également pour une offre renforcée sur les grandes lignes, c'est-à-dire toutes celle qui vont vers Bruxelles, ainsi que la dorsale wallonne. Sur ces lignes, on doit avoir au minimum deux trains par heure toute la journée, et quatre en heure de pointe. Sur les lignes rurales, on doit avoir au minimum un train par heure. Le système actuel d'un train toutes les deux heures ne suffit pas.»

Ph. D.R.

Étoffer le réseau rural, cela veut dire ouvrir de nouvelles gares ou points d'arrêts?

«Dans un premier temps, le réseau actuel peut suffire. Surtout, il faut ne plus en fermer. Le gouvernement sortant n'a apporté aune garantie à ce sujet, contrairement à ce qui a été affirmé. Il faut aussi commencer à repenser l'organisation du territoire. Il est nécessaire de densifier l'habitat autour des gares, et ne plus placer celles-ci à l'écart. Tout le monde doit avoir un accès simple à une gare.»

Même en densifiant, il sera difficile de faire vivre tout le monde à proximité immédiate d'une gare…

«Quand ça n'est pas possible, il faut offrir des solutions aux usagers pour qu'ils puissent rejoindre facilement la gare. Ça peut être des parkings, mais aussi et surtout des solutions en transports en commun, ainsi que des pistes cyclables. Les gares doivent devenir des nœuds de correspondance vers lesquels tous les moyens de transport convergent.»

Cela suppose une collaboration renforcée entre les autorités locales et la SNCB…

«Le ministre actuel, François Bellot (MR), a lancé cette collaboration renforcée, et je m'en félicite. Il faut poursuivre cette méthode de travail, afin que les différents niveaux de pouvoir travaillent dans le même sens. Ça ne sert à rien de rouvrir un point d'arrêt SNCB si on ne met pas en place des bus pour s'y rendre. Avec un tel dispositif, le rail pourra devenir la véritable colonne vertébrale du réseau de transports en commun. C'est essentiel si on veut faciliter les déplacements dans le pays, et notamment pour les transports de et vers Bruxelles.»

Les usagers se plaignent parfois des prix élevés de la SNCB…

«J'en conviens, les prix sont élevés pour l'usager occasionnel. Par le passé, il y avait un tarif pour les groupes de quatre ou cinq personnes, on pourrait imaginer le remettre en place. Mais à côté de cela, les abonnements et rail pass sont assez concurrentiels, si on tient compte du coût global d'une voiture (entretien, parking…). Avec les abonnements financés par l'employeur, on est même assez proche de la gratuité pour l'usager. Cela dit, l'offre doit être revue afin de ne pas négliger le créneau loisirs, qui est encore assez peu exploité par la SNCB et pour lequel il y a une demande. Pour cela, on doit donner des moyens à la SNCB…»

 

Via un nouveau contrat de gestion?

«Depuis 2012, on ne fait que prolonger les précédents contrats de gestion. Il faut en établir un nouveau, où on ne donne plus telle ou telle somme, mais où on demande à la SNCB ce qu'elle peut proposer. On attribuera ensuite la somme en fonction des projets retenus.»

LA STIB

À Bruxelles, la construction d'un métro nord est prévue. C'est une bonne chose?

«Le métro est le moyen de transport le plus rapide en agglomération, il faut continuer à le développer. Globalement, tout ce qui peut contribuer à désengorger la ville doit être fait. Mais pour le métro, il est important de veiller à garantir les délais de réalisation, ce qui implique une vision commune entre les différents niveaux de pouvoir concernés. Pas question de revivre l'enfer du RER!»

Vous citez la Stib comme un exemple…

«Les usagers en sont plutôt satisfaits. Elle est très efficace sur l'information en temps réel de ses passagers. Le TEC devrait s'en inspirer. Il ne faut pas négliger cet aspect communication. Il est très important pour les usagers. Ils peuvent comprendre qu'il y ait un retard, mais ils ont besoin de pouvoir s'adapter, décaler leur rendez-vous…»

Plusieurs partis plaident en faveur de la gratuité des transports en ville, notamment à Bruxelles…

«C'est un argument de campagne. Cela aurait un coût important. Si on rend les transports en commun gratuits, on va avoir une hausse du nombre d'usagers. Cela veut dire qu'il faudra répondre à cette demande, avec du personnel, des moyens… ça me semble tout à fait illusoire.»

 

Les bus de la Stib sont parfois lents, du fait du trafic…

«C'est un problème, ils sont englués dans le trafic des voitures. La seule solution, c'est de créer des sites propres. Il faut en faire dès que c'est possible. Malheureusement, ça n'est pas toujours le cas.»

LA VOITURE INDIVIDUELLE

Quid des autres solutions pour limiter le nombre de voitures, comme le péage urbain?

«Nous ne sommes pas favorables à ce système. Nous plaidons plutôt pour un système de ‘péage inversé', comme cela existe déjà à Rotterdam. Les piétons et cyclistes bénéficient d'un crédit d'impôts. C'est un puissant incitant à se passer de voiture.»

Le régime des voitures de société est régulièrement pointé du doigt…

«Au cdH, nous sommes contre une suppression pure et simple du système. Mais il ne doit bénéficier qu'à des véhicules propres. Ne perdons pas de vue que les voitures de société sont des modèles récents, moins polluants que la moyenne. Si les travailleurs qui bénéficient de cet avantage doivent acheter une voiture, ils vont probablement se tourner vers un modèle bon marché, et donc plus polluant.»

Le télétrainvail

Les problèmes de mobilité sont principalement le fait des navetteurs. « Favoriser le télétravail peut permettre de réduire le nombre de personnes sur les routes et dans les transports, et donc de faire de la place aux autres », souligne Gianni Tabbone. Le cdH se réjouit de voir de plus en plus de sociétés laisser leurs employés travailler de leur domicile un jour ou deux par semaine. Il plaide également pour mettre en place le «télétrainvail», un système où le temps passé à travailler dans le train sera pris en compte par l'employeur. «Il faut pousser les partenaires sociaux à discuter de cette question», estime Gianni Tabbone.