Des armes et technologies belges tuent au Yémen

L'armement et la technologie militaire belges jouent un rôle plus important au Yémen que ce que l'on savait jusqu'à présent. L'Arabie saoudite fait en effet usage d'armes et de technologies belges pour ses opérations terrestres et aériennes, ressort-il du projet de recherche #BelgianArms.
par
Camille
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Au cours de l'enquête menée par a maison de presse indépendante Lighthouse Reports, la plateforme de recherche Bellingcat, la VRT, Knack et Le Soir, l'équipe a consulté des données publiques, des documents gouvernementaux et eu recours aux réseaux sociaux. Les sources liées à ces derniers ont été localisées et leur véracité a été vérifiée.

#BelgianArms a ainsi mis la main sur deux vidéos qui remontent à 2016 et 2017 et dans lesquelles on peut voir la Garde nationale saoudienne tirer sur des positions des rebelles houthis. À cette fin, la Garde utilise des véhicules blindés LAV-25 Piranha, équipés depuis 2015 de canons de chars belges. A l'aide d'images satellites, l'équipe est parvenue à situer les combats à Al Raboah, à la frontière entre l'Arabie saoudite et le Yémen.

Les munitions employées par la Garde pour attaquer les Houthis sont par ailleurs produites exclusivement par Mecar, une société située près de Nivelles. L'Arabie saoudite a d'ailleurs acheté pour 160 millions € de munitions belges entre 2015 et 2017.

Demande d'enquête

#BelgianArms est également parvenu à trouver des preuves quant à l'usage par l'Arabie saoudite de fusils FN F2000, armes entièrement automatiques exclusivement produites en Belgique. En 2005, l'Arabie saoudite a ainsi commandé quelque 55.000 F2000 via le programme Foreign Military Sales, par lequel le ministère américain de la Défense arme des régimes amis. La FN Herstal dispose d'une section américaine et peut y participer de cette manière. En mars de l'année dernière, les Houthis ont aussi diffusé eux-mêmes des images sur la récupération de fusils F2000 lors d'une attaque contre un poste de commandement saoudien. Amnesty International demande une enquête suite à ces révélations.

En outre, les avions de combat Eurofighter Typhoon et le ravitailleur Airbus A330 MRTT utilisés par l'Arabie saoudite au Yémen recourent également à la technologie belge. Pour l'Eurofighter, il s'agit d'équipements radar flamands; et pour l'Airbus, d'écrans LCD flamands.

Depuis l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi en octobre 2018, la Wallonie n'a plus délivré de licence d'exportation pour l'Arabie saoudite. Cependant, les exportations d'armes n'ont pas été stoppées. Les rapports de sécurité du port d'Anvers, que #BelgianArms a pu consulter, montrent que depuis l'assassinat de Khashoggi au moins trois autres transports de munitions ont eu lieu.

L'équipe a également constaté que des véhicules blindés belges avaient été déployés à Bahreïn pour disperser les manifestations par la force. Les armes à feu belges sont aussi présentes en grand nombre dans les cartels de la drogue mexicains, notamment le pistolet Five-SeveN de la FN Herstal, connu sous l'appellation «tueur de flics».