L'ortie-culture, une pépinière où toutes les plantes sont comestibles

Nous déclarons la saison des pépinières ouverte! Dans celle de Marie Albert, tout se mange! Plantes et fleurs vivaces ou annuelles, arbustes, aromates… Vous pouvez goûter directement sur pieds, acheter les plants de ce qui vous a séduit, et les replanter chez vous afin de régaler vos yeux et vos papilles tout au long de l'année.
par
ThomasW
Temps de lecture 5 min.

Il y a 30 ans, après une formation en horticulture, Marie Albert et son mari installent, du côté de Mettet, leur projet de maraîchage et de pépinière. «Au début, mon mari et moi avions surtout des plantes annuelles pour jardinières. C'était la mode! Mais nous avions déjà comme créneau de proposer des choses originales.»

Petit à petit, le maraîchage s'est effacé au profit de la pépinière, qui accueille de plus en plus de plantes vivaces… et comestibles. Aujourd'hui, concept unique en Belgique, 100% de leur production peut se mettre sous la dent.

Délicieuse rose trémière

«On s'est dit que c'était plus clair de passer au 100% comestible, de sorte que nos clients soient certains que tout ce qu'ils achètent ici peut se retrouver dans leur assiette», explique Marie qui insiste aussi sur le fait que dans les centaines d'espèces qu'elle propose à «L'Ortie-culture», certaines sont peu intéressantes au niveau goût mais sont magnifiques dans l'assiette. D'autres encore ont simplement des vertus comme celle de favoriser la digestion par exemple. Et en vous baladant dans ce beau domaine, vous serez surpris d'apprendre que certaines plantes et fleurs très courantes dans les jardins, comme les roses trémières ou les hémérocalles par exemple, sont comestibles et même délicieuses!

À la chasse aux semences… pas toujours «légales»

Comme un philatéliste à la recherche du timbre rare, Marie doit dénicher ses précieuses semences chez des petits semenciers et dans des foires de jardins (comme celle de l'Abbaye d'Aywiers à Lasne) ou encore auprès de particuliers passionnés: des clients parfois leur offrent quelques graines, nous confie-t-elle. «On n'est pas toujours dans la légalité», ose-t-elle nous avouer cependant. «Normalement, il faut que les semences soient inscrites au grand catalogue. Quand on achète chez Kokopelli par exemple, un célèbre semencier français qui remet des anciennes semences au goût du jour, on sait que tout n'est pas légal. Ils sont d'ailleurs souvent en procès. Mais on est dans une ère de changement et la législation est en train d'évoluer dans le bon sens. Heureusement! Car si on continue à cultiver des variétés industrielles, on va droit dans le mur, c'est évident», affirme Marie, qui embraye sur la sécheresse actuelle: «Du haut de mes 30 ans d'expérience, j'affirme que la sécheresse de l'été passé n'est pas normale. Il faut prendre conscience qu'il y a un changement dans le climat et que l'Homme a une responsabilité dans ce changement car ce dernier est trop brutal. Les plantes peuvent s'adapter mais pas aussi vite.»

Le remède, selon elle, tourne autour de l'alimentation: «je crois que l'on peut encore éviter le pire, en mangeant local et de saison, donc entre autres en cultivant plus de variétés différentes et anciennes. En mangeant moins de viande aussi, mais de la viande bien élevée… Et je prône le retour à la petite paysannerie familiale. Pouvoir vivre de sa terre, c'est très important, car tout se tient. Il faut arrêter de rémunérer les gros industriels et les actionnaires sinon il sera difficile d'aller vers plus de bio et plus de local.» Depuis une dizaine d'années, un changement positif est visible en tout cas du côté de ses clients: «De plus en plus de personnes ont envie de supprimer de la pelouse pour faire un potager et c'est encourageant!».

Le bio? Une évidence!

«Dès le départ, c'était une évidence de faire du bio. Mais il y a 30 ans, le bio commençait doucement, avec des pionniers comme la ferme Barré, ici dans le coin et c'était difficile de trouver des semences, boutures et plants en bio. Aujourd'hui, il y a beaucoup plus de personnes qui font du bio, ce qui facilite l'accès aux semences bio», explique la pépiniériste qui précise que les semences sont ensuite mises dans du terreau bio et élevées au tout naturel, sans pesticides et engrais de synthèse. «Beaucoup de nos clients sont très regardants et je signale toujours si une plante a été achetée en bio ou non. Si ce n'est pas le cas, c'est vraiment que nous n'arrivons pas à trouver cette espèce en bio», précise-t-elle encore, y voyant finalement une mission: «Au plus nombreux seront les jardiniers amateurs à avoir une espèce dans son jardin, au plus cette dernière aura de chances d'être protégée et cultivée en bio. D'une manière générale, une plante en danger le sera beaucoup moins si 100 jardiniers la mettent dans leur jardin!».

Des restaurateurs du coin font aussi un travail de sensibilisation et de découverte en faisant leur marché à L'Ortie-culture et en mettant des variétés originales à la carte.

Il y a encore de la place!

«Même en hiver, on a beaucoup de variétés en Belgique. Et à la belle saison, on peut mettre en bocaux», insiste Marie qui était d'ailleurs en train d'effectuer cette tâche, aidée par une joyeuse bande de copines au rire communicatif, lors de notre visite. Séparée de son mari, elle vit maintenant avec sa sœur, dans leur magnifique maison en vieille pierre qui jouxte la pépinière, se nourrissant intégralement de leur production. «Et nous arrivons à en vivre aussi financièrement. Et il y a encore de la place pour d'autres pépinières alors lancez-vous!», conclut-elle gaiement.