Félix Radu, l'étoile montante de la scène belge

À seulement 23 ans, Félix Radu a fait des (jeux de) mots sa spécialité. Le tout avec un certain talent, ce qui lui a notamment permis de gagner le Prix Raymond Devos en 2016. Depuis, le jeune homme s'est produit au festival d'Avignon et fait le tour de la Belgique avec son seul en scène «Les mots s'improsent».
par
ThomasW
Temps de lecture 4 min.

D'où vous vient cette passion pour les mots?

«Quand j'étais en fin de primaire, je suis tombé amoureux de Victor Hugo et de sa poésie. Quand j'étais encore plus petit, j'écrivais des poèmes pour les filles dont j'étais amoureux. De fil en aiguille, il y a eu Hugo, Musset et Molière qui se sont ajoutés à la bibliothèque. À ce moment-là, j'ai commencé à écrire de moins en moins de vers et j'ai fait de la prose tout en gardant cet amour profond pour le romantisme.»

Avec vos jeux de mots, vous n'avez pas peur de perdre le public?

«Non, parfois c'est même le but. Je l'ai d'ailleurs écrit dans un texte. ‘Les gens pensent qu'on écrit des jeux de mots pour perdre l'assemblée alors que c'est la raison pour laquelle on écrit qu'on essaye d'égarer.' Donc non je n'ai pas peur de le perdre. Je commence à connaître tellement bien mon texte que je sais les endroits où je le perds, les endroits où je ne le perds pas. Parfois je veux le perdre pour le retrouver et vice-versa. C'est une sorte de jeu dont je suis le chef d'orchestre.»

À part les livres, qu'est-ce qui vous inspire?

«Je crois que quand on veut faire de l'art son métier, il faut être réceptif à tout. Je commence à être de plus en plus inspiré par tout ce qu'il se passe actuellement. Avant j'étais touché par des grands thèmes comme l'amour et la solitude. Et là, je commence à plus m'inspirer de la politique, de l'époque contemporaine, des problèmes écologiques. Ce sont des choses qui me touchent de plus en plus.»

À quel moment vous êtes-vous dit que vous pouviez devenir humoriste?

«Je n'ai jamais vraiment fait le choix de devenir humoriste, je ne me sens même pas humoriste vu que je fais du seul en scène. Dans mes spectacles, il y a de la poésie, de l'humour, de la littérature, de la vulgarisation littéraire. J'ai toujours écrit des traits d'esprit et je me suis rendu compte de leur potentiel comique. Par la suite, j'ai écrit un spectacle qui ressemble à l'enfant que j'étais car je l'ai préparé de mes 16 à mes 19 ans. Donc je ne me suis jamais vraiment posé la question. J'ai écrit, je suis monté sur scène et de fil en aiguille on m'a appelé pour jouer à gauche et à droite. Maintenant, j'écris une pièce de théâtre. Un drame romantique appelé ‘Rose et Massimo'. C'est sur un jeune homme qui tombe amoureux d'une femme très belle mais inaccessible.»

Vous composez aussi des chansons?

«Oui, et je reconnais que j'ai moins de talent pour la musique. Autant dans la littérature je sens que c'est mon domaine et que j'ai des choses à dire. Autant dans la musique, j'admire vraiment les musiciens mais je n'ai pas vraiment cette spontanéité que j'ai dans la littérature. Mais j'adore en faire et je m'entoure de gens très talentueux pour y arriver. J'écris beaucoup de raps et je demande à des amis de m'aider.»

On peut imaginer que vos futurs spectacles seront en partie musicaux?

«Bien sûr! Là, pour ma pièce, j'ai demandé à un mec qu'il compose une musique car je ne sais pas le faire moi-même. J'essaye aussi de voir si je ne peux pas faire un album de rap. Après c'est encore vraiment embryonnaire, mais ça me plairait.»

Vous avez un jour dit que votre spectacle faisait plus sourire que rire, ce n'est pas un problème?

«Non au contraire. C'est un problème si on veut vraiment faire rire mais moi, ce n'est pas mon but. Mon but, c'est d'être plein d'humour, mais aussi plein de poésie et de littérature. Les sourires, je trouve ça très charmant. C'est silencieux, ça ne fait pas de bruit, mais un sourire a tout autant de puissance qu'un rire. Dans mon seul en scène, il y a aussi des moments qui ne sont pas drôles mais qui n'ont pas la vocation d'être drôles. Ce sont plus des petites histoires tendres. Je ne veux pas être humoriste car ils visent le rire comme but. Pour moi, le rire est un moyen d'emmener le public ailleurs.»

En tant qu'auteur, que pensez-vous des humoristes, comme Gad Elmaleh, accusés de plagiat?

«Je suis totalement offusqué. Moi-même j'écris et j'ai déjà eu des problèmes avec des gens qui reprennent quelques blagues ou quelques idées. Je pense qu'il ne faut pas monter sur scène si on n'a rien à dire. C'est mentir à soi-même en se disant qu'en fait, je suis un génie. C'est mentir aux autres qui viennent te voir et c'est mentir à la personne qui s'est fait chier toute une vie pour exprimer son mal-être pour faire rire les gens. Tu lui voles son temps, son existence. Je ne sais pas comment on peut dormir la nuit en ayant fait ça. D'ailleurs je parle de Gad Elmaleh dans mon spectacle. À la fin, je dis: ‘Merci d'être venu car je ne suis pas encore Gad Elmaleh. Malheureusement j'ai un défaut très apparent, c'est que j'écris mes textes.' À chaque fois, cela fait mouche. C'est un comédien formidable mais c'est dommage qu'il ait recours à ces pratiques-là.»

Clément Dormal

Toutes les dates se trouvent sur le site: https://www.felixradu.com/