Grève générale : Pourquoi le pays sera à l'arrêt ce 13 février ?

« Les travailleurs méritent plus que des miettes. Ils méritent du respect », tel est le message de la CSC, la FGTB et la CGSLB pour la grève nationale organisée en front commun syndical ce 13 février.
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Après l'échec des négociations entre patrons et syndicats, la CSC, la FGTB et la CGSLB ont décidé d'organiser une grève nationale ce mercredi 13 février, dans tous les secteurs et à travers tout le pays. L'objectif de ces négociations était d'aboutir à une nouvelle norme salariale et à un accord interprofessionnel (AIP) pour les deux années à venir. Mais la marge maximale d'évolution des salaires, de 0,8 % hors indexation, qu'a définie le rapport du Conseil central de l'Économie (CCE) a rapidement conduit à une impasse. Les syndicats ont dénoncé « la maigre marge salariale », qui est la conséquence des réformes de la loi en la matière du gouvernement actuel.

Les représentants des travailleurs ont également dénoncé la « rigidité sur le banc des employeurs » en matière de flexibilité, de fin de carrière et de salaires minimums. Au-délà d'une augmentation des salaires supérieure à 0,8 %, la CSC, la FGTB et la CGSLB demandent une augmentation significative des salaires minimums, des allocations sociales et des pensions pour, à tout le moins, les porter au-delà du seuil de pauvreté. Ils veulent aussi redessiner le cadre des fins de carrière et de meilleures possibilités de combinai-son entre le travail et la vie privée. Ils souhaitent enfin des mesures concrètes permettant une amélioration de la mobilité, comme la généralisation du tiers payant pour les transports en commun et le remboursement de l'indemnité vélo.

C'est pour ces différentes raisons que le front commun syndical CSC-FGTB-CGSLB organisera dans tout le pays la grève générale du 13 février. Les syndicats du secteur public appuient pleinement la grève du 13 février. Eux aussi ressentent fortement les conséquences de la politique de ce gouvernement.


Marie-Hélène Ska, secrétaire générale de la CSC

« Le cadre de la négociation la rendait impossible »

Pourquoi faire grève ?

Les travailleurs de ce pays méritent mieux que des miettes. Ils méritent un salaire qui se négocie dans les entreprises ou dans les secteurs. La loi votée début 2017 avec toute une série de paramètres cadenasse très fortement la négociation des salaires. Aujourd'hui, elle ne permet plus que les salaires suivent la réalité de la dynamique du marché du travail. Le cadre de la négociation la rendait impossible et c'est la contestation de ce cadre qui nous a conduits à la grève du 13 février.

Par ailleurs, nous souhaitons pouvoir travailler à des solutions durables en matière de mobilité. Nous voulons aussi un relèvement des salaires minimums. En effet, aujourd'hui, le salaire minimum reste inférieur à 10 € brut par heure pour pratiquement 68.000 travailleurs en Belgique. Enfin, nous voulons vraiment pouvoir dessiner un cadre de gestion de la carrière, y compris les fins de carrière.

Qu'attendez-vous de la grève ?

D'abord que les responsables politiques prennent conscience de la difficulté qu'il y a de vivre dignement aujourd'hui, que les fins de mois sont difficiles et qu'on ne peut pas être un citoyen content et épanoui si chaque mois il faut se poser la question de savoir comment on va le finir. Tout cela alors que dans le même temps, les dividendes ne connaissent pas de limite et les revenus les plus hauts continuent à s'envoler. C'est un appel aussi à l'ensemble des élus pour qu'ils se rendent compte qu'être élu c'est aussi représenter la population et pas seulement une petite partie très favorisée de la population.

Quelle est la valeur ajoutée d'un front commun syndical ?

Cela envoie un signal très fort. Cela montre que l'ensemble du monde du travail est concerné, que l'ensemble des travailleurs, quelle que soit leur affiliation ou leur philosophie, sont vraiment derrière ce mouvement.


Robert Vertenueil, président de la FGTB

« Il faut mettre les entreprises devant leur responsabilité »

Pourquoi faire grève ?

Nous sommes arrivés à un point où la négociation n'en était plus une. Nous étions autour d'une table où le monde patronal se retranchait autour d'une loi avec une attitude extrêmement provocante à notre égard. À un moment donné, il faut mettre les entreprises devant leur responsabilité. Faire grève, c'est mettre sous pression la vie économique pour faire comprendre qu'on ne peut pas continuer à prendre en compte uniquement le développement économique, sans prendre en considération les besoins des travailleurs. Les travailleurs aussi ont besoin de développement.  Développer l'économie suppose la création de richesses et une part de ces richesses doit revenir aux travailleurs. Nous allons donc prendre les patrons à la gorge, là où ça fait mal, c'est-à-dire dans leurs ressources.

Qu'attendez-vous de la grève ?

Le message est clair : « Messieurs les employeurs, est-ce que vous êtes disposés à revenir autour de la table pour négocier sérieusement un partage des richesses avec les travailleurs, un partage de ce que vous avez gagné et un partage des cadeaux que vous avez reçus du gouvernement? ». La manipulation de la loi de 1996 qui a été faite en 2016 par le gouvernement actuel est aujourd'hui comme un entonnoir dont nous ne pouvons plus sortir. Quand la loi est mauvaise, il faut la changer. Je propose de travailler en deux temps. Dans un premier temps, il faut débloquer la négociation actuelle par une dérogation à la loi et dans les deux ans, il faut changer la loi en tenant compte de la réalité pour les accords futurs.

Quelle est la valeur ajoutée d'un front commun syndical ?

Quand les trois syndicats parlent d'une seule et même voix et qu'ils sont arrivés au constat qu'il n'y avait plus moyen de négocier, c'est que nous avons réellement été poussés par les employeurs à faire une action de grève. Ce n'est pas par plaisir, c'est par nécessité et par ce que nous n'avons plus d'autres solutions pour faire bouger le patronat.


 

Olivier Valentin – secrétaire national de la CGSLB

« C'est une question d'équité sociale et salariale »

Pourquoi faire grève ?

Notre première revendication est de faire changer la loi de 1996, qui a été révisée en 2017, relative à la sauvegarde préventive de la compétitivité. Nous avons lancé le mouvement de grève pour bien faire comprendre que, avec ce qui résulte du calcul fait par le conseil central l'économie, à savoir 0,8 % d'augmentation sur deux ans, nous ne pouvions pas nous y retrouver. D'autant plus lorsqu'on constate que les entreprises recrutent, qu'elles distribuent des dividendes toujours plus importants et qu'il y a un certain nombre de pénuries sur le marché du travail. C'est compliqué, voire incompréhensible, pour le travailleur de se dire que l'économie va bien et qu'en participant à cette création de richesse, il ne reçoit pas grand-chose. Ce n'est pas juste, pas logique.

Qu'attendez-vous de la grève ?

Notre objectif premier est d'avoir plus de liberté dans les négociations salariales. C'est une question de cohérence et d'équité. Si une entreprise va bien, qu'elle fait des bénéfices, qu'elle génère des dividendes pour les actionnaires, il est normal que ceux qui ont contribué à la création de la richesse en aient aussi une part. C'est pour cela que nous demandons de sortir du cadre fixé par cette loi de 1996. C'est important que les employeurs comprennent que c'est un carcan artificiel duquel nous devons sortir. Nous demandons aussi un effort de solidarité pour l'augmentation des salaires minimums et de réelles possibilités d'aménagement des fins de carrière.

Quelle est la valeur ajoutée d'un front commun syndical ?

La valeur ajoutée est d'envoyer un signal fort à tous les employeurs en disant qu'il n'y a pas de divergence d'appréciation entre les organisations syndicales. On peut avoir des visions différentes mais notre objectif est le même. C'est très important de pouvoir le faire en front commun syndical pour qu'il n'y ait pas de doute sur le sens et la force du message envoyé aux organisations patronales et aux employeurs.