Brexit : Quels scénarios après le report d'un vote clef à Londres?

Le report sine die d'un vote sur l'accord de Brexit au Parlement britannique annoncé par la Première ministre conservatrice Theresa May, qui était assurée de le perdre, ajoute à l'incertitude sur le processus de sortie de l'Union européenne. Voici les prochaines étapes et scénarios.
par
Camille
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Retour à Bruxelles

Theresa May a annoncé lundi qu'elle rencontrerait ses homologues de l'UE et les autorités européennes avant le sommet des 13 et 14 décembre et chercherait à obtenir «des garanties supplémentaires» sur le mécanisme permettant d'éviter le retour d'une frontière entre la province britannique d'Irlande du Nord et le reste de l'île. «Il n'est pas question d'une renégociation», a fait savoir immédiatement un porte-parole de la Commission. Mais rien n'empêche les deux parties de «se rabattre sur un protocole ou une clarification sur un point jugé important pour ensuite revenir devant le Parlement. Cela pourrait alors passer à cause de la peur des conséquences d'un départ sans accord», estime une source européenne.

Le président du Conseil européen a convoqué un sommet consacré au Brexit jeudi à Bruxelles, au premier jour du sommet européen. «Nous ne renégocierons pas l'accord, y compris le filet de sécurité, mais nous sommes prêts à discuter de la manière de faciliter la ratification britannique», selon M. Tusk.

Vote au Parlement

Theresa May une fois revenue de Bruxelles soumettra -à une date encore indéterminée- le texte aux députés. Soit la Première ministre aura obtenu de nouvelles assurances de Bruxelles et elle parvient à convaincre les députés, qui adoptent le texte, et une sortie ordonnée s'ensuit. Soit ils le rejettent et le gouvernement aura alors 21 jours pour indiquer ce qu'il compte faire.

D'autres scénarios d'accord, tel celui sur le modèle de la Norvège, qui dispose d'un accès au marché unique sans être membre de l'UE, sont évoqués comme susceptibles d'obtenir le soutien d'une majorité de députés.

Pas d'accord

Si le texte est rejeté par la Chambre des Communes, cela pourrait entraîner un Brexit sans accord au 29 mars 2019. Les relations économiques entre le Royaume-Uni et l'UE seraient alors régies par les règles de l'Organisation mondiale du commerce et une multitude de contrôles douaniers et réglementaires devraient être mis en place en urgence.

Theresa May a souligné que son gouvernement «accélère les préparatifs» en vue de cette hypothèse, redoutée tout particulièrement des milieux économiques. Cela entraînerait une nouvelle chute de la livre, qui a déjà accusé le coup lundi, et plongerait les entreprises dans l'incertitude. Pénuries de médicaments, embouteillages monstres aux abords des ports, avions cloués au sol, perte de croissance... Ces perspectives sont balayées par certains députés de la majorité pour qui «une absence d'accord vaut mieux qu'un mauvais accord».

Elections

Le rejet de l'accord pourrait signer la fin de Theresa May. Elle pourrait être confrontée à un vote de défiance au sein de son propre Parti conservateur où les candidats pour la remplacer ne manquent pas. Certains veulent renégocier avec Bruxelles, d'autres sortir sans accord. Mme May pourrait aussi démissionner si une écrasante majorité rejette son texte.

Une motion de censure contre le gouvernement pourrait également être soumise au vote du Parlement et aboutir, étant donnée la faiblesse de la majorité d'une dizaine de voix sur laquelle s'appuie Theresa May. Elle conduirait alors à la formation d'un nouveau gouvernement dans les deux semaines, ou à l'organisation de nouvelles législatives, ce que souhaite le Labour, principal parti d'opposition. Une arrivée au pouvoir de Jeremy Corbyn, le leader travailliste résolument ancré à gauche, est la perspective qu'agite Theresa May pour convaincre les députés de son camp de se ranger derrière son accord.

Pas de Brexit?

La Première ministre a toujours fermement rejeté une telle consultation, souhaitée par bon nombre d'europhiles. Le Labour a prévenu qu'au cas où de nouvelles élections ne seraient pas à l'agenda, il pourrait se positionner en faveur de l'organisation d'un second référendum, une hypothèse qui pourrait alors disposer du soutien d'une majorité hétéroclite à la Chambre des Communes.

La mise en oeuvre d'un nouveau vote prendrait toutefois des mois et repousserait la date du divorce. Enfin rien ne dit qu'une telle consultation annulerait le Brexit, voté par 52% des Britanniques le 23 juin 2016.