Le commerce équitable, la garantie d'un prix minimum pour les producteurs

Les produits issus du commerce équitable connaissent chaque année une croissance des ventes. Il reste pourtant fort à faire pour sortir les producteurs de la pauvreté et leur donner un revenu décent. Nicolas Lambert, directeur de Fairtrade Belgium, plaide pour l'extension du système de prix minimum garanti.
par
Camille
Temps de lecture 3 min.

Comment évolue le marché du commerce équitable ?

«Globalement, il y a cette année encore une croissance de 10%. C'est dans la lignée de ce qu'on a observé les années précédentes. C'est une belle croissance, dans un marché, celui des biens de grande consommation, qui stagne. En valeur, cela représente environ 145 millions €. C'est important, cela veut dire que le commerce équitable n'est plus un marché de niche. Mais ça reste assez léger par rapport à ce que pèse l'ensemble du marché agroalimentaire. Il nous reste beaucoup à faire.»

Le cacao est l'un des produits emblématiques du secteur. Comment expliquer cela ?

«Cela vient, entre autres, du fait que le chocolat est un secteur avec un ‘modèle en sablier'. On a, d'un côté, de nombreux consommateurs, et de l'autre, de nombreux producteurs. Entre les deux, on retrouve quelques grosses entreprises. Par leur taille, elles ont un rôle majeur dans la fixation du prix. Cette structure explique le déséquilibre entre le prix payé par le consommateur au bout de la chaine, et le prix payé au producteur. Cela se constate aussi dans le domaine des bananes et du café, d'autres produits emblématiques du commerce équitable.»

AFP

Ces intermédiaires apportent, eux aussi, de la valeur au produit qui sera vendu…

«Tout à fait, et il est normal qu'ils touchent une partie de la valeur ajoutée. Mais cette répartition doit être équitable. Pour le moment, les producteurs ne touchent que 6 à 7% de la valeur ajoutée créée, c'est très peu. Dans ces conditions, il est difficile pour eux de sortir de la pauvreté.»

 

En quoi la labellisation commerce équitable peut-elle les aider ?

«Le label assure un prix de vente minimum pour le producteur et une prime pour la coopérative (voir ci-dessous). Dans le cadre de la labellisation, nous aidons également les producteurs à améliorer leur productivité. Si on prend l'exemple du chocolat, il y a actuellement une grande différence de productivité entre l'Amérique du sud, avec plus de 1.000 kg par hectare, et l'Afrique de l'Ouest, avec près de 450 kg sur la même surface.»

AFP / D. Gannon

Augmenter la productivité des agriculteurs est souvent mis en avant par les grandes entreprises qui communiquent sur leur politique de développement durable.

«C'est effectivement une solution, c'est pourquoi nous y travaillons. Mais il ne faut pas suivre uniquement cette piste. Si on augmente la productivité sans que la demande ne fasse de même, on va se retrouver avec une baisse des prix sur le marché, et rien ne va changer pour les producteurs. C'est ce qu'il vient de se passer avec le cacao, qui a connu une saison 2016-17 difficile. Il est donc indispensable, en parallèle, de travailler à la fixation d'un prix minimum. Il n'y a que comme cela que les producteurs du sud verront leur qualité de vie augmenter.»

Le commerce équitable, comment ça marche ?

Un prix minimum : les produits vendus avec le label Fairtrade ont été achetés à un prix minimum au producteur. Cela doit lui assurer un niveau de vie décent. Pour le café, c'est 1,3$ par livre. Le cours du marché est actuellement inférieur à 1$. Grace au label, le producteur va donc quand même recevoir 1,3$. Lorsque que le prix du marché dépasse ce seuil minimum, le marché reprend son rôle et fixe le prix.

La prime Fairtrade : Les produits vendus avec le label Fairtrade entrainent également le versement d'une prime. Celle-ci est versée sur un compte séparée, et finance le plan de développement durable que chaque coopérative labélisée doit avoir adopté. Cela peut servir pour des projets sociaux, comme construire des écoles, un puits… Mais aussi pour des projets économiques, comme acheter un camion pour ne plus dépendre d'un prestataire extérieur, une formation pour améliorer la productivité…