Connaître son cerveau pour un meilleur apprentissage

Une méthode d'apprentissage plus active, qui mobilise les sens de l'apprenant et tire parti du fonctionnement cérébral, c'est l'objectif de la neuropédagogie.
par
Pierre
Temps de lecture 4 min.

Ces dernières années, l'évolution des neurosciences n'a cessé de nous apporter de nouvelles informations sur le fonctionnement de notre cerveau. Les acteurs de la pédagogie s'en sont progressivement emparés pour bâtir ce qu'on appelle la neuropédagogie. L'objectif? Tenir compte du fonctionnement du cerveau, des neurones, de la mémoire dans la façon d'enseigner… et d'apprendre.

"Dans l'apprentissage actuel, celui d'une classe traditionnelle, le professeur est debout devant ses élèves, qui restent assis et l'écoutent. Les élèves, dans cette situation, mobilisent très peu de canaux dans le triangle pensée-comportement-émotion", explique Chantal Vander Vorst, fondatrice de Humanix et également coach et formatrice.

"Ils mobilisent beaucoup la pensée, mais très peu les émotions et pas du tout le mouvement. Pour bien faire, il faudrait mobiliser les trois."

Voilà donc le Saint-Graal de la neuropédagogie : lier le ressenti, les émotions et le mental serait la clé pour un apprentissage plus performant.

Trois zones cérébrales primordiales

Pour Chantal Vander Vorst, "on gagnerait beaucoup à apprendre aux jeunes et à leurs professeurs la façon dont le cerveau humain fonctionne car il permet bien des choses".

Il faut en effet savoir que notre cerveau est activé par trois gouvernantes principales: les territoires reptiliens, le cortex automatique et le territoire préfrontal.

La partie reptilienne nous dote de nos instincts de survie. "Le problème, c'est que cette gouvernante cérébrale n'a aucune mémoire. Elle se contente seulement de lancer des signaux d'alerte qui se manifestent sous forme de stress", explique Chantal Vander Vorst.

Pour tenter de contrecarrer ce stress néfaste à notre mémorisation, quelques solutions s'offrent à nous, notamment le fait de prêter attention à sa respiration ou de méditer.

"On apprend mieux dans la joie que dans le stress"

Vient ensuite le cortex automatique, celui qui veut que nous nous retrouvions parfois, tels des robots, à effectuer des tâches du quotidien sans en avoir réellement conscience: faire ses lacets, retrouver son chemin, ou se brosser les dents, par exemple.

"Le couac avec cette partie de notre cerveau, c'est qu'elle se souvient très fort de ce qui est négatif et le rejette un maximum", prévient la coach.

Un élève qui aura eu du mal avec sa première récitation risque de développer un réel blocage par la suite. Car son cerveau lui fera penser, à tort, que parler devant un public est quelque chose de plutôt dangereux.

A contrario, les émotions positives seront un terreau propice à un apprentissage efficace. "Que ça soit la joie de l'enseignant, sa passion ou sa motivation, tout cela est fondamental", avertit Chantal Vander Vorst.

Notez que cette zone a besoin d'être réactivée: il faut répéter les choses sous différentes formes, par exemple avec des petits jeux de ballons où l'on répète ce que l'on vient d'apprendre quand on reçoit la balle. De la même façon, un beau film va générer des émotions positives chez l'apprenant, et le marquera davantage qu'une situation d'apprentissage traditionnel.

Expérimenter de la nouveauté, prendre des risques

La troisième gouvernante est celle du territoire préfrontal: cette zone nous permet de nous adapter, de prendre du recul, de déstresser. Et surtout, de fabriquer de nouvelles informations. Elle va être très utile pour gérer de nouvelles choses, comme une formule mathématique encore jamais utilisée.

"Cette zone est mature vers 25 ans, mais l'enfant l'utilise dès l'âge de 7 ans, parfois même plus tôt", explique Chantal Vander Vorst. "Il faut arriver à stimuler cette zone préfrontale, en permettant à l'enfant d'être plus curieux, de lui donner l'envie d'exprimer pleinement son opinion même si elle dérange, etc."

Si la neuropédagogie promet de belles avancées en matière d'apprentissage, son champ d'application potentiel reste énorme. La discipline est encore trop peu connue et les écoles ont un long chemin à parcourir.

Pour Chantal Vander Vorst, "l'apprentissage dans les écoles est encore très automatique et ancestral. Le cours universitaire en auditoire en est l'exemple le plus criant. Avec la neuropédagogie, on parle beaucoup de 'classe inversée', où les apprenants font d'abord émerger leurs connaissances de base sur le thème abordé avant de bâtir de nouvelles connaissances cérébrales. C'est un changement culturel qui doit s'opérer."