Pronostics animaliers: mensonges organisés ou divins devins?

Comme bon nombre de compétitions sportives, la Coupe du Monde voit fleurir des pronostics en tous genres. Les passionnés s'appuient sur leurs connaissances et les novices sur le hasard ou les mathématiques pour prophétiser défaites et victoires. Certains, avec succès alors que d'autres plongent dans le ridicule et perdent jusqu'à leur froc sur des sites de paris en ligne.

Aujourd'hui la science du pronostic se professionnalise. Aux côtés des ces prophètes du dimanche, les études prolifèrent pour désigner le vainqueur du Mondial à coups d'outils d'analyse et de statistiques diverses. Et tout le monde s'y met: universités (Innsbruck, de Gand, Dortmund, Munich, etc.), médias (BBC), banques (UBS) ou assureurs (Lloyd's), cabinets d'audits, jusqu'à l'intelligence artificielle (Goldman Sachs)…

Pour leurs prévisions, ces organismes se basent sur les matchs amicaux, le tirage au sort, les blessures, les évolutions à court terme de l'équipe, etc. Et nous ne pouvons pas nier le fait que certains modèles ont déjà fait leur preuve.

Cette année, plusieurs pays ont récolté les faveurs des pronostics: la Belgique, la France, le Brésil, l'Espagne ou même l'Allemagne qui a pourtant été éliminée.

Nouvelle bête dans l'arène

Parmi ces oracles, les animaux tentent de tirer leur épingle du jeu. Le poulpe 'Paul' était entré au panthéon de la discipline divinatoire en 2010, lors du Mondial en Afrique du Sud en signant un sans faute pour les matches de la sélection allemande: le célèbre mollusque avait même prédit la défaite de la Mannschaft face à l'Espagne en demi-finale.

Avant et après le succès de 'Paul', d'autre espèces animales s'y sont également essayées sans jamais parvenir au niveau du céphalopode: on retiendra le manque de régularité du cochon d'Inde suisse 'Madame Shiva', de l'éléphant allemand 'Nelly', de l'otarie française 'Watson', du dromadaire dubaïote 'Shaheen', de l'aigle mexicain 'Atila', du kangourou australien 'Flopsy' ou même du piranha britannique Pelé. (Vous avez bien lu).

Un zoo russe

Cette année, la Russie a désigné le chat 'Achille' comme sa pythie officielle. Et avouons que le félin blanc, bien que sourd, a le nez fin lorsqu'il doit choisir entre deux gamelles à l'effigie d'équipes différentes.

Ses deux premières prédictions pariant sur un succès russe face à l'Arabie saoudite et une victoire iranienne sur le Maroc se sont concrétisées. Reste à savoir si le matou aura du flair pour la suite de la compétition.

Plus que jamais, ce mondial offre au phénomène une ampleur inégalée puisqu'un véritable zoo -11 bêtes selon l'agence russe Interfax- a été mobilisé: un cerf, un lapin, un tapir, un louveteau, une loutre ou encore deux hippopotames.

Si les méthodes diffèrent, peu de crédit est à apporter à ces oracles selon l'éthologue Julie Willems. "On ne peut attribuer ces succès qu'au hasard. C'est comme si on présentait deux plats de pâtes à un homme. Le choix se fera en fonction du contexte. Un plat apparaîtra plus beau, plus grand ou aura une odeur plus forte. L'appétence sera plus grande."

La comportementaliste n'exclut en outre pas quelques manipulations. "C'est le principe de l'effet Pygmalion. Parce que le maître est dans une posture d'attente, il envoie un message inconscient à son animal et peut ainsi l'inciter à choisir un camp plutôt qu'un autre", commente Julie Willems qui tient toutefois à préciser que toutes les espèces ne sont pas douées de la même intelligence.

"D'accord pour un chien, voire un chat, car ces animaux sont particulièrement sensibles, et à l'écoute de la communication non-verbale de leurs maîtres. Mais un piranha ou un poulpe, n'exagérons rien (rires)."

Fiables ou pas, ces pronostics animaliers ont encore de beaux jours devant eux. Reste à voir ce que nous réservera le Mondial qatari. Chez Metro, nous misons sur un oryx ou un faucon. Les paris sont ouverts!

Gaëtan Gras