En Turquie, un zoo investi dans la préservation des espèces

Sa tête blanche dans le goulot d'une bouteille en plastique en guise de masque anesthésiant, le petit singe se fait examiner sous toutes les coutures par le vétérinaire du zoo de La Palmyre.
par
Laura
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Né en Charente-Maritime voici deux ans, il est en partance vers le zoo de Bursa, en Turquie, pour s'y reproduire. Ce tamarin de Geoffroy (Saguinus geoffroyi), vingt centimètres pour 500 grammes, "fait partie d'un programme d'échange européen", souligne Thierry Petit, vétérinaire qui officie depuis 1989 à La Palmyre. Au total, le parc participe à des programmes européens pour la sauvegarde de 55 espèces de tout poil.

AFP / X. Leoty

Conservation, recherche et sensibilisation

Spécialisé dans les grands singes, le zoo de La Palmyre finance en outre une vingtaine de projets de conservation, en particulier pour l'orang-outan de Bornéo et les quatre sous-espèces de gorilles d'Afrique. "La conservation, c'est l'une des trois missions d'un zoo avec la recherche et la sensibilisation", martèle la responsable pédagogie et conservation du zoo, Florence Perroux.

Pendant longtemps, "les zoos faisaient de la reproduction surtout pour montrer des bébés au public", reconnaît Thierry Petit. Mais avec la multiplication des espèces en danger, "on a constitué la population captive comme un stock génétique, pour éventuellement des réintroductions dans la nature".

Livre généalogique

Une politique de mise en réseaux des zoos qui a débuté dans les années 1980, avec l'association européenne des zoos et aquariums (EAZA), dont les programmes ont permis d'éviter la disparition de nombreuses espèces menacées, comme l'oryx d'Arabie, le tamarin lion doré ou le bison d'Europe.

Les transferts d'animaux entre les parcs zoologiques européens sont gérés par un coordinateur référent chargé de suivre une espèce via "un livre généalogique". "C'est lui qui dit où vont les animaux, à partir d'une analyse de la population pour éviter la consanguinité. Les zoos ne décident que de la période de départ", explique Thierry Petit.

Conception difficile

A La Palmyre, cela se traduit chaque année par une centaine d'arrivées ou de départs, sur quelque 1.600 animaux au total. Pendant que le tamarin se réveillait, deux grands koudous femelles, cousines des antilopes, prenaient ainsi la direction du zoo du bassin d'Arcachon. Et un éléphant mâle devait prochainement arriver en Charente-Maritime pour s'y reproduire. Une politique à ce point fructueuse "que pour certaines espèces on en arrive à parler de contraception", souligne le Dr Petit.

S'il est relativement aisé de faire se reproduire certaines espèces, les panthères par exemple, d'autres sont nettement plus regardantes. C'est le cas des guépards, pourtant cousins des précédentes : "C'est très différent. Un mâle et une femelle ne vivent pas ensemble. Le soigneur a alors un rôle déterminant. Il doit détecter la chaleur d'une femelle, qui dure de 24 à 36 heures", parfois sans signe distinctif, explique le vétérinaire.

Le personnel a le coup d'oeil car dans les années 1990, un guépard sur quatre dans les zoos d'Europe venait de La Palmyre, dit-il, en injectant une hormone à une femelle tapir pour stimuler sa fertilité.

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Préserver le milieu naturel

Chaque année, plus de 200 animaux voient le jour dans les 18 hectares de forêt protégée du zoo, dirigé par Pierre Caillé, petit-fils de celui qui l'a fondé en 1966.

Mais aujourd'hui, la remise en liberté de spécimens dans leur biotope, souvent lui-même menacé par les activités humaines, n'est plus la seule stratégie envisagée. "Le transport ou le suivi coûtent très cher alors qu'il est plus efficace de préserver un milieu, de replanter des forêts ou de créer des parcs naturels", explique Florence Perroux.

"A Madagascar, on finance trois programmes pour des lémuriens qui ont pour effet de sauvegarder le milieu naturel. Par exemple, pour le lémur aux yeux turquoise, le programme AEECL a conduit en 2007 au classement en parc naturel de la zone où il vit sur l'île", explique-t-elle.