Le champignon, champion de la dépollution

Grâce aux technologies de plus en plus poussées, le « biomimétisme » devient une des clés de l'écologie future. Une toute jeune entreprise wallonne de dépollution des sols, par exemple, s'est inspirée de la façon dont le mycélium des champignons « digère » les matières toxiques.
par
Camille
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Un des défis de l'industrie moderne c'est de pouvoir dépolluer les sols souillés. «En général, soit ces terres sont dépolluées de manière physico-chimique, ce qui est très énergivores et donc très cher, soit elles sont brûlées, ce qui les rend inutilisables par la suite. Soit, et c'est la solution malheureusement la plus courante, elles sont déplacées et stockées dans des endroits plus ou moins autorisés», explique Caroline Zaoui, co-fondatrice et directrice scientifique et innovation de la société Novobiom.

Biomimétisme et bioassistance

Lorsque l'on reproduit ce que la nature a mis en place, comme lorsque l'on crée le profil de l'aile d'un avion en s'inspirant des oiseaux par exemple, on parle de biomimétisme ou de bioinspiration. Lorsque l'on utilise directement le vivant, on peut parler de bioassistance. C'est le cas ici pour ces réseaux de mycélium qui, une fois propagés sur les sols pollués, vont nettoyer ces derniers. «Dans les écosystèmes terrestres naturels, les champignons ont un rôle clé dans le renouvellement de la matière organique. C'est eux qui s'attaquent aux molécules les plus difficiles», explique Caroline Zaoui. «L'humain produit des molécules chimiques toxiques et nous travaillons directement avec les organismes vivants pour effectuer le service que l'on veut réaliser», dit-elle, en précisant que ce que l'on entend par champignon c'est le fruit du réseau mycélium. Ici, c'est le mycélium, pas le fruit, qui est utilisé.

Plus de trois millions de sites à dépolluer

«Il y a plus de trois millions et demi de sites identifiés comme potentiellement pollués en Europe et on en a traité que 15%. Cela coûte chaque année plus de six milliards d'euros pour les administrations publiques et les entreprises, selon une étude Ernst & Young et une étude européenne», explique Caroline Zaoui. Leurs clients potentiels sont les propriétaires de sites industriels qui comportent des pollutions de type organiques, hydrocarbures lourds et hydrocarbures aromatiques polycycliques. «Souvent, ce sont des pollutions mixtes, organiques et métaux lourds. Parfois, le taux de métaux lourds n'est pas problématique mais parfois, si», précise la jeune femme qui explique que pour les métaux lourds, la technique demande encore des tests en laboratoires.

L'avenir de la dépollution

La dépollution par le vivant que propose Novobiom n'est pas encore une solution fréquente à cause du contexte actuel du marché de la dépollution. «Cela coûte moins cher d'envoyer ces terres se faire stocker dans des États qui autorisent et même s'enrichissent avec ce stockage», déplore la scientifique. Les terres belges par exemple, sont envoyées en Allemagne ou aux Pays-Bas. Cependant, le terrain semble de plus en plus propice pour ces techniques vertes, se réjouit-elle: «Dans un contexte global où il ne sera plus tenable de stocker ces terres toxiques et où finalement les énergies fossiles utilisées pour la dépollution finiront pas ne plus être bon marché, la dépollution par le vivant, qui est beaucoup moins énergivore, et qui permet de ne pas déplacer les terres ainsi que de ne pas les maltraiter, sera la meilleure solution.»

Lucie Hage

 

D'autres exemples de biomimétisme

Ph. Pixabay

Boeing: l'aviation, est, avec l'architecture, le domaine qui utilise le plus la bioinspiration. Boeing réfléchi en ce moment à des structures de matériaux inspirés des os humains car ces derniers étant plus denses aux points de force, des structures aux densités différenciées permettraient d'alléger le poids total des structures.

 

Le «Scratch»: velcro est une des pionnières des marques bio-inspirées. Son système d'accrochage inventé à Lyon s'inspire directement de la forme des «crochets» de la fleur de Bardane.

 

 

Nissan Note: Nissan vient de sortir une nouvelle voiture autonettoyante. Son revêtement s'inspire de la feuille de Lotus, qui est hydrophobe. Les gouttes, en plus de ne pas stagner et sécher sur la surface, glissent sur le revêtement en emportant avec elles poussières et autres impuretés.

Train japonais: Le dernier TGV japonais s'inspire directement de la morphologie du Martin-Pêcheur. Ce dernier est spécialement conçu pour encaisser les changements d'états (air-eau), tout comme doit le faire le train japonais qui est sans cesse en train de sortir et entrer dans des tunnels, subissant donc des changements de pression constants.